Liste Trouble

27.

Conley avait une belle maison, il fallait l'admettre. Elle n'était ni trop petite, ni trop grande, mais optait pour le style que l'on pourrait appeler victorien. Il y avait une petite tourelle à l'avant de la maison qui donnait vue sur la rue paisible de la banlieue dans laquelle il vivait. Les murs étaient tous fait de briques et de pierres et une grande baie vitrée se trouvait dans le salon. Conley m'avait fait visiter l'ensemble des pièces, dont l'immense cuisine aurait fait mourir de jalousie ma mère, tout comme la salle à manger qui avait une table de bois franc ainsi que six énormes chaises du même genre. Dans la maison, le salon était situé au rez-de-chaussée et comportait une télévision, des divans en cuir rouge presque neufs et une petite table basse en bois. À l'étage se trouvait la section que j'avais assez rapidement identifié comme étant la zone « danger ». C'était à cette étage que les chambres se trouvaient, y compris celle de Conley qui était située face à celle de son frère ainé, mais qui était souvent inhabité selon Conley, car son frère était maintenant à l'université et qu'il revenait rarement à la maison. La chambre de Conley était petite, quant à elle, nous laissant dans un espace un peu trop restreint à mon goût. Rajouter à cela qu'il y avait un lit double et que les parents de mon sois-disant copain étaient absents. Les murs de la chambre de Conley étaient bleus pâles et dénudés d'affiches et de décorations. Pour l'admettre, aussi ridicule que cela pouvait paraître, j'aurais plutôt vu un mur entier recouvert de photos de Becca, de Mary Ann Aberline, de Dave Thompson, de Catherine Hunt (même si j'ignorais de quoi elle avait l'air), de Dan Caius, et peut-être des photocopies de la liste et du carnet et des documents officiels comme ceux que m'avait refilés Thomas Grant, un peu plus tôt ce jour-là. Mais non, rien de ce genre ne semblait se trouver dans sa chambre. Jacob Conley était beaucoup plus futé que ça.

« Tu veux quelque chose à boire peut-être? Ou bien tu as peut-être faim, je peux... » marmonna Conley, alors que j'étais assise inconfortablement sur le bout de son lit.

« C'est gentil, mais non merci. »

Il bougea inconfortablement avant de venir s'asseoir à mes côtés, sur le lit dont les draps avaient été fraichement lavés. Trois heures plus tôt, j'étais toujours dans les bois en compagnie d'Alicia et de Becca. Je n'avais parlé à ni l'une ni l'autre de mon rendez-vous avec Conley. Maintenant, je le regrettais. Conley était fou et dangereux. Il avait laissé quelqu'un mourir pour un stupide plan de vengeance. Il avait commis l'irréparable. Ma vie était en jeu et s'il ne s'agissait pas de l'instinct de survie, je n'aurais pas répondu à son baiser, lorsqu'il pressa ses lèvres aux miennes. À mon grand malheur, le baiser s'amplifia, me faisant perdre l'équilibre sur le matelas. Le voilà qui était au-dessus de moi, me mettant très mal à l'aise. Heureusement, il s'arrêta un instant et me regarda, comme s'il analysait chaque parcelle de ma peau.

« Tu es vraiment magnifique. » murmura-t-il tout près de mon oreille.

Je ne répondis pas, détournant le regard, sachant que ce qu'il disait était probablement un autre mensonge. Tous ses mensonges... Tous ses regards.. Et nos quelques baisers... Il n'y avait rien de vrai là-dedans. Jacob Conley était décidément un très bon acteur - ou un très bon menteur.

Mes cheveux blonds et lisses encadrant mon visage, je penchai la tête sur la gauche et regardai par la fenêtre, ne voulant que partir de cet endroit de malheur.

« Je crois que j'ai faim, tout compte fait. » dis-je subitement, en me redressant, bousculant Conley au passage.

« Ok, c'est assez clair de ce côté-là. » marmonna ce-dernier en se grattant la nuque.

« Est-ce que tu veux jouer à un jeu? »

Conley s'approcha de moi, plus prudent cette fois. Ses cheveux bruns aux reflets de cuivre étaient ébouriffés de manière à faire craquer n'importe qui et ses yeux bleus perçants me fixaient avec une telle intensité... J'étais pathétique et minable face à son charme.