Premiers sceau : Entre les cimes écarlates

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I

     "Ilbrûle" lança quelqu'un dans la foule. Aussitôt, desacclamation, des cris de joie et des huées se firent entendre. Eneffet, le mannequin de paille, suspendu par le cou, voyait son corpss'enflammer et se consumer dans les flammes ardentes. Le visage ausourire un peu niais commençait à noircir doucement. Cette année,les villageois avaient eu la bonne idée de remplir le fétu deplantes et d'huiles qui dégageaient une agréable odeur tandis qu'ilse décomposait. C'était Naëlis qui avait eu cette idée. Naëlisqui, attachée à un second poteau quelques mètres plus loin faisaitsemblant de hurler de terreur. Comme chaque année, depuis maintenantquatre ans, Naëlis se portait volontaire pour jouer le rôle d'unemage lors de la fête de l'Epuration. Elle se cachait alors, avecd'autres habitants, quelque part dans le village ou dans les boisenvironnants. Puis, les enfants du village se lançaient à leurrecherche et devaient les attraper avant midi, heure à laquelle onbrûlait l'Alisaän, le mannequin de paille censé représenter leplus grand traître que l'histoire ait compté. Bien entendu, tousles participants se laissaient découvrir les uns après les autresavant d'être amenés sur la place. Puis, une fois le mannequinentièrement consumé, ils étaient libérés. On considérait que lerituel avait purifié les mauvais mages et protégé le village. Lesfigurants partaient alors dans l'entrepôt à grain non loin, oùils enlevaient leurs masques et leurs costumes avant de retourner semélanger au reste du village pour attendre le banquet qui suivaitl'exécution du mannequin."Sitoutes les sorcières étaient aussi jolies, je suis sur que le monde en serait rempli",pensa Alessandre. Perché dans un arbre pour mieux voir malgré lafoule, il observait la scène du bûcher depuis le début. Des six"sorciers" de cette année, Naëlis était vraiment la plusjolie. On distinguait son abondante chevelure blonde comme les blésd'été sous les longs amas de cheveux noirs de la perruque. Et lemasque affreux qui lui cachait la moitié du visage laissaitnettement voir ses lèvres qui s'étiraient en un large souriremalgré les cris répétés de la belle. Alessandre observait sescourbes gracieuses lorsqu'une voix derrière lui le fît sursauter« Et bien alors, on rêve en plein jour maintenant ?». Lejeune homme se retourna, surpris. Son frère aîné était juste là,l'observant avec un amusement non dissimulé.

De quoi tu parles Léandre ?

Oh ne joue pas à ça avec moi. Il te reste encore un peu de bave sur le coin de la lèvre.

Alessandre s'essuya prestement la bouche mais sa mancheresta sèche. Son frère éclata de rire et Alessandre s'empourpra.Il avait parfois l'impression que son frère pouvait lire dans satête et il détestait cela. Encore plus lorsqu'il s'agissait deNaëlis.

Un jour je te dénoncerai pour usage de la magie, lança Alessandre.

C'est ça, répliqua Léandre, un large sourire aux lèvres. Il escalada rapidement l'arbre où se tenait son frère et vint s'asseoir à ses côtés. En attendant j'espère que tu t'es occupé d'un problème bien plus urgent que mes 'dons de mage', petit frère.

Il fit quelques passes avec les mains, mimant, ce quiétait selon lui un sort de magie.

Ah Ah, très amusant. Et quel est ce problème urgent dont je devrais me préoccuper ?

Léandre fît un signe du menton vers l'estrade.

Tu l'as invitée pour ce soir ?

Pas..pas encore balbutia Alessandre.

Elle ne va pas t'attendre, tu le sais ?

Je sais lança Alessandre, énervé. Je sais. Arrête de me faire la morale.

Le sourire de Léandre s'étira un peu plus. « Ohmais c'est qu'il s'énerve le petit » dit-il en ébouriffantles cheveux de son cadet. Alessandre le repoussa vivement de la main.

Erevia: Fragments du passéWhere stories live. Discover now