Untitled part

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                                                                                          II

Le lendemain, alors qu'ils prenaianet le petit déjuuneren famille, il demanda à son père quels villages se trouvaient aucentre des montagnes.

Des villages ? Il n'y a rien là-bas, répondit le vieil homme. Rien à part de la caillasse et des sales bestioles. Franchement fils, à ton âge, il serait temps que tu apprennes un peu plus que les alentours directs du village.

Ce n'est pas faute d'avoir tenté de te le faire rentrer dans le crâne, dit son frère.

Tu frappais trop fort lors des leçons Léandre, c'est ressortit.

L'aîné éclata de rire.

Tu entends ça père ? Avec ma force j'ai supprimé la mémoire de mon petit frère. Attends, peut-être que si je tape de l'autre côté, ça va revenir.

Il avanca la main vers Alessandre mais celui-ci lerepoussa. Ils se chamaillèrent pour savoir qui réussirait àfrapper l'autre sur la tête le premier, sous le regard amusé deleur père, et déconcerté de leur mère.

De vrais gamins à vos âges. Au fait, dans quelques jours nous avons une autre cérémonie. J'espère que vous ne l'avez pas oubliée, dit leur mère Méline.

Les deux garçons cessèrent leurs chamailleries etAlessandre regarda le bracelet qu'il portait au poignet gauche.Accroché par un fil de cuir, un petit sachet en cuir brun pendait,entouré de trois plumes. Il caressa le sachet. Un silence pesants'était abattu sur la pièce.

Non, mère, nous n'avons pas oublié, dit Léandre.

Nous devrons partir à l'aube dans quelques jours afin de pouvoir être rentrés pour la nuit, dit leur père Alep.

Et nous allons vous distribuer des tâches à tous les deux afin de préparer notre petit voyage familial, dit Méline.

Pendant que le père débarrassait la table, la mèredonna ses instructions aux garçons.

Le jour dit, alors que le soleil n'était pas encorelevé, la famille d'Alessandre sortit du village. L'air était froidet ils pouvaient voir leur souffle s'élever en volutes devant eux.Méline se serrait contre son mari, grelottante malgré les couchesde vêtements qu'elle portait. Ils se mirent en marche rapidement.Ils observèrent le soleil monter lentement dans le ciel au fur et àmesure qu'eux même grimpaient les sentiers escarpés de la montagne.Peu avant midi, ils arrivèrent à l'entrée d'une grotte dont lesparois avaient été recouvertes de symboles gravés. Deux poteaux debois auxquels étaient pendus des tissus colorés flottants aux ventsmarquaient une frontière symbolique. Alessandre observa les symbolesqui évoquaient la mort et la renaissance. Si il n'était pas douéen géographie, il se débrouillait relativement bien en lecture.Mérine et Léandre disposèrent différentes offrandes dans unpanier au pied des poteaux, puis Alep sortit un couteau et s'entaillale doigt et versa une goutte de son sang sur les offrandes. Chacundes membres de la famille suivit le même rituel. Ils entraient surle territoire des morts, la coutume voulait que les vivants laissentune partie d'eux même en offrande avant de pénétrer. Alessandre etson père récitèrent une courte prière afin de demander pardon auxdéfunts de troubler leur repos, puis ils entrèrent. L'intérieur dela grotte était en fait un long couloir qu'ils suivirent pendant unbon quart d'heure avant de déboucher sur une salle gigantesquetaillée dans la roche. En son centre, un énorme trou plongeait enligne droite vers les entrailles de la terre. Si on était assezcourageux pour regarder dedans, on pouvait voir un fin cour d'eau aufond. Les murs étaient tapissées de critaux de glace qui laissaientpasser la lumière du soleil, projetant sur la pièce une pâle lueurbleutée, conférent à l'endroit une atmosphère quasi fantomatique.Selon la coutume de Silmaris, on plongeait le corps du défunt dansle trou central, renvoyant la chair à la terre afin que les partiesqui le composent puissent être réabsorbées et redistribuées parles divinités. L'âme quand à elle, s'envolait par le cheminéenaturelle creusée dans la voûte afin de rejoindre le ciel. Onconservait du mort un objet symbolique, mèche de cheveux ou objetlui ayant appartenu. C'est précisément cet objet que Méline sortitd'un petit sac. C'était un bracelet orné d'un petit sachet de cuiret des plumes, en tout point semblable à celui d'Alessandre. Maiscelui-ci avait appartenu à son frère jumeau, décédé à l'âge desix mois. Alessandre était trop jeune pour s'en rappeler. Il n'avaitaucun souvenir d'avoir eu un jumeau. Mais ses parents, eux, serappelaient sans cesse qu'ils auraient pu avoir trois enfants. Samère déposa le bracelet sur un petit autel de bois et tous prièrentpendant de longues minutes. La coutume voulait que l'on laissel'objet pendant un mois afin de permettre à l'âme du mort de goûteraux plaisirs terrestre une fois par an. Aussi ne furent-ils passurpris de voir d'autres objets sur l'autel. On pouvait les laisserici sans crainte. Personne dans les montagnes n'était assez stupidepour voler un mort.

Lorsque la prière fût finie, la famille ressortit dela grotte. Alessandre plissa les yeux sous le soleil de l'après-midi.Ils déjeunèrent rapidement avant d'entamer le voyage de retour.Ils atteignirent le village alors que lourds nuages s'amoncelaientdans le ciel, à l'est, et que le soleil déclinait. Alep déclaraque dans un mois, Léandre devrait retourner à la grotte chercher lebracelet. Le jeune homme soupira mais accepta la mission car ilrespectait les coutumes du village. Et, en tant que futur chef, il sedevait aussi de montrer l'exemple. Alors qu'ils empruntaient lechemin du retour, Alessandre regarda derrière lui, vers lesmontagnes cramoisies. La colonne de lumière qu'il avait vu venait dequelque part par ici, il en était persuadé. Un sentiment bizarres'empara de lui, sans qu'il puisse se l'expliquer. Mais un rappel deson frère eu vite fait de le ramener à la réalité.


Erevia: Fragments du passéWhere stories live. Discover now