Kill Your Darlings

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Il l'entraîne jusqu'à sa voiture en ayant des frissons chaque fois que Louis s'arrête de pleurer pour prendre un grand coup d'air. Il a pitié pour lui. Il se demande la raison pour laquelle il est si malheureux. Il est aussi soulagé car il n'est pas le plus triste du monde comme il en était persuadé, il y a apparemment des cas bien pires. Il a du mal à ouvrir la portière et tenir Louis en même temps. Il le fait finalement et pousse délicatement Louis à l'intérieur. Il fait le tour jusqu'au siège conducteur. Le suicidaire est replié sur lui-même. Il ne l'entend plus pleurer. Harry le regarde sobrement. Il démarre la voiture sans savoir la destination. Il longe le pont et arrive sur la route principale.

"Où habitez-vous ?"

Il ne répond pas. Il ne bouge même pas. Harry aurait cru qu'il était mort si son torse ne se soulevait pas régulièrement. Il est confus, qu'est-il censé faire maintenant s'il ne connaît pas l'adresse de cet inconnu. Et après tout, pourquoi lui a t-il proposé de le ramener chez lui ? Il le regrette maintenant. Il n'aurait pas dû. Cet homme pourrait être un malade, un psychopathe. Il pourrait très bien jouer un jeu pour le piéger ou encore il...

"En...En face du café Minnie's, au Nord."

Harry était surpris. Il l'a eu sa réponse. Il ferait très bien de le conduire rapidement pour se débarrasser de lui au plus vite. Mais Louis paraît différent. Il a l'air d'une victime tout comme lui. Ils ont beaucoup de points en communs, tout compte fait. Ils se comprendraient peut-être, l'un et l'autre. Il a peut-être des problèmes similaires à ce de Harry. Il a peut-être souffert autant que lui, même plus. Si la derniere option est valable, il pourrait peut-être lui expliquer, lui montrer comment continuer à vivre avec ses malheurs derrière lui. Harry, perdu dans ses pensées, conduisait sans se concentrer sur la route. Puis il remarque que le domicile de Louis est à plus de 12 kilomètres de leur point de rencontre et il se demande comment Louis fait pour marcher autant. Harry, lui, est habitué à  la voiture. Il veut aller quelque part ? La voiture est là pour le conduire. Il l'emmène partout où il veut, quand il veut en un bref moment. Alors que marcher peut prendre des heures... Il arrive alors devant Minnie's. Il ne l'avait encore jamais remarqué jusqu'à maintenant, peut-être parce qu'il ne monte jamais si haut, au Nord. Harry déverrouille les portes et aide Louis à sortir. Il le tient bien contre lui jusqu'à traverser l'allée puis le décolle délicatement de son torse. Louis sort une trousse de clés de sa poche et elle tombe parterre produisant un son aigu. Harry les ramasse à sa place et en tourne une au hasard dans la serrure. La coïncidence le rencontre. C'est bien l bonne. Il se demande ce qu'il doit faire maintenant. Doit-il l'accompagner jusqu'à l'intérieur ou quitter sans entendre un 'merci' ? Il hésite puis finalement cède.

"Je vais vous aider."

Il le tient par le bras et l'aide à longer le couloir. Louis s'engage dans la première pièce à droite et Harry le suit. Lorsqu'il y entre, il allume les lampes et la surprise le gifle.

Des dizaines, ou même des centaines de morceaux de papier journal, pages de livres, et feuilles écrites à la main avaient envahis les murs, donnant l'impression d'avoir des murs tapissés de papiers. L'immensité de la pièce l'avait surpris encore plus. Harry cherche désespérément une partie sans décoration mais en vains. Il se demande si ce 'Louis' est écrivain. Peut-être qu'il est juste passionné de textes ? Harry aimerait tellement avoir une réponse mais cela lui semble impossible. Louis se couche sur le lit au milieu de la pièce en laissant Harry planté là.

"Vous allez... mieux ?" demande t-il d'une voix claire.

"Non."

Harry laisse tomber. Il n'a pas envie d'engager la conversation. Ce type lui semble antipathique. En sortant, un morceau de page de livre lui tape à l'oeil. Il s'empresse de le lire.

Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme et m'aurait répondu ?

"Alfred de Musset... c'est Alfred de Musset..." se dit-il d'une voix claire. "Non... Alphonse de Lamartine.." ajoute-t-il.

Après un dernier regard vers Louis, il quitte ce lieu étrange. Mais il l'intrigue, follement.

Arrivé chez lui, il ignore sa mère et entre sous la douche, laissant les filets d'eau glisser le longs de son corps.

"Alphonse de Lamartine" répète-t-il plusieurs fois à lui-même.

Il enfile son slip et se faufile sous sa couverture, dégageant juste son visage. Cette nuit-là, il n'est pas en paix. Il a cette constante sensation d'étouffer dans l'air. Il rêve de ce pont. Il se noye dans l'air jusqu'à se laisser tomber du haut de cette architecture. Le contact avec l'eau glaciale le retire de son rêve en sueur. Il a l'impression que sa poitrine est prête à s'arracher. Il décide de se lever. Il rejoint sa feuille sur le bureau. Il ajoute quelques mots. Puis il retourne dans son lit, mais ses yeux refusent de se refermer. Il attend le soleil. Il attend la lumière. Il attend l'agitation dans les rues. Il attend le monde qui recommence à tourner. Il sait que la Terre est immobile durant la nuit. Les étoiles règnent sur l'univers. Il regarde l'heure.

04 h 07

La nuit n'est pas faite pour les amoureux qui dorment dans les bras l'un de l'autre. La nuit est faite pour les personnes seules qui aiment sans être aimées en retour.

Harry ne pense pas correspondre à cette description. Mais il essaye de les accompagner dans cette claire obscurité. Il aimerait tant aimer quelqu'un. Il aimerait tant vivre pour quelqu'un. Or, cela paraît impossible. Impossible car ses émotions l'ont quittés depuis longtemps. Tout est mort en lui, chez lui. Il ne vit qu'à travers les paroles. Il ne vit qu'à travers sa feuille blanche.

~

Le lendemain il n'a pas le courage de se lever pour s'emmêler dans toutes ces personnes. Il veut simplement rester cloué au lit. Il prétend être malade et sa mère lui propose d'appeler un médecin. Il refuse. Il ne mange pas. Il ne boit pas. Il ne respirerait même pas si ce n'était pas un réflexe. Il tape Kill Your Darlings sur la barre de recherche de son ordinateur. Il l'a regardé plusieurs fois et il l'a adoré toutes ces fois. Quand il regarde ce film, il sait, sans savoir pourquoi, se mettre dans la peau de Lucien Carr. Il se sent proche à Dane DeHaan qui incarne ce personnage, il aime se mettre à sa place, de penser à toutes les choses qu'il pourrait faire avec Daniel Radcliffe, sans même en rougir. Il se surprend en train de sucer sa lèvre inférieure. Il se la frotte à l'aide de son index. Il regarde ce même film en boucle, sans en avoir assez. Il éteint finalement le portable. Ses yeux se referment naturellement. Sa tête retombe sur l'oreiller.

Il se réveille à une heure imprécise. Le soleil est absent.

21 h 49

Il s'habille très vite et monte dans sa Range Rovers. Il s'arrête à la place que la veille. Un petit être est penché sur le fleuve.

"Louis" Il murmure à soi-même.

Il s'approche délicatement et s'éclaircit la voix pour parler.

"Peut-être l'avenir me gardait-il encore/Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu?/Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore/Aurait compris mon âme et m'aurait répondu?"

Louis se retourne, et Harry perçoit ses yeux. Il n'arrive pas à déchiffrer ce qu'ils reflètent.

"Je pourrais, peut-être, être cette âme?..."

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Merci à ma prof de français qui m'a fait connaître ce poème magnifique, je suis tombée amoureuse du mouvement classique..

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Hopeless [Larry Stylinson]Where stories live. Discover now