I comme Iris

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Je traçais mon trait d'eyeliner. Merde, encore foiré. Rectification, je tentais de tracer mon trait d'eyeliner.

À Noël, il n'y avait pas grand chose à faire chez moi. Je marchais dans le couloir qui débouchait jusqu'à ma chambre. Je retrouvais enfin mon lit, ma jolie robe et mes escarpins. Ce soir, apéro chic de Noël chez tante Jane. Je me brossai une dernière fois les cheveux, me vêtis de la robe longue achetée pour l'occasion et enfilai mes talons.

Superbe, j'étais époustouflante. La tenue m'allait divinement bien. Je passai en revue la pièce en serrant davantage avec mes mains vides ma queue de cheval sophistiquée. Ce soir, je faisais mon entrée dans le monde adulte, les proches de ma tante avaient ramené des supérieurs de Yale et Washington.

La voiture roulait lentement, je divaguais sur le net, complètement subjuguée par la beauté des mannequins auxquels je m'étais abonnée et de leurs maquillages composés de contouring tendances. Le rendu donnait bien mais l'étape de l'estompage avait l'air crevant.

Arrivée dans le lieu des festivités, je m'empressai de rejoindre ma tante et de la serrer rigoureusement dans mes bras. Elle sentait la vanille, parfum un peu trop sucré pour moi.

- Oh Iris, te voilà enfin, je t'attendais avec impatience! Seigneur, tu es sublime. Lança-t-elle en mimant un évanouissement.

Je rougis et la remerciai chaleureusement. Je n'étais pas laide, je le savais, mais un compliment de ma tante se révélait être plus efficace que tous les concours de beauté remportés dans ma jeunesse.

- Mon filleul est là-bas. Souffla-t-elle avec un petit sourire malicieux.

Je levai les yeux au ciel et cherchai des yeux Lykos. Je le vis en train de boire une boisson, accompagné de plusieurs nanas canons. Je m'approchai, déviant les nombreuses prétendantes de mon ancien petit-ami.

- Salut Iris. Lâcha-t-il en me souriant gentiment.

Ce mec pouvait être accompagné des plus jolies et insupportables filles de la Terre, il restait quand même impeccablement adorable et gentil. Je fis un petit geste de la main poliment puis me dirigeai vers le buffet. Je remarquai la présence familière d'un gars au fond de la salle, sur son portable.

Dante aka le misanthrope du bahut. Il était plutôt canon dans son costume. J'aurais aimé me mordre la lèvre continuellement en le matant mais le rouge à lèvres aurait été gâché. D'une démarche calme et assurée, je me plantai face à lui.

- Bonsoir monsieur à qui je ne parle jamais. Commençai-je avec un sourire bienveillant.

Il haussa un sourcil puis mima un « ouste » déplacé.

-  Félicitations pour la victoire de ta sœur, j'avais voté pour elle et son programme. Essayai-je alors que je n'avais pas du tout voté pour sa pimbêche de demi-sœur.

Son indifférence se mua en antipathie.

- Tu sais, fermer ta gueule serait plus simple parce que ta connerie est juste trop haute pour être dans la norme. Marmonna-t-il.

Je lui souris, acceptant l'idée qu'il puisse se ficher de moi. Je n'avais qu'à me ficher de lui.

- Bien joué Dante, c'était bien lancé. Remarquai-je en m'asseyant aussi contre le mur.

Ce mec était le mystère de toutes les nanas du lycée. Il avait tout pour plaire mais semblait réticent à chaque effort féminin, à croire qu'il était juste attiré par les poissons rouges des labos.

- Ta présence est franchement désagréable. Ajouta-t-il d'un ton snobe.

J'essayais d'être gentille. C'était lui le désagréable dans l'histoire.

- Qu'est-ce que tu fais ici au fait ? Interrogeai-je en cherchant dans la salle une autre personne familière qu'autre que Lykos et cet empoté de première classe.

Il afficha un petit sourire espiègle.

- Je ne vois pas pourquoi je raconterais ma vie au premier venu. T'es chiante, tu peux me laisser tranquille la pot-de-colle ?

Sur ces bonnes paroles, je me relevai. Ce mec ne voulait pas parler, j'abandonnais.

- Trois minutes, wow t'as tenu très longtemps. Bon effort social, sois fière de toi. Termina-t-il en me désignant sa montre.

Ses mots me firent changer d'avis, je reposai mon fessier par terre, me surprenant moi-même.

- Tu es inadmissible comme gars. Affirmai-je en haussant les sourcils.

Il sortit une petite bouteille d'eau de sa poche. Il en but une gorgée, goulûment.

- Tu ne sais vraiment pas draguer ton mec. Tu devrais commencer par mettre une tenue moins chic, cette robe te grossit exagérément les hanches, un vrai carnage. Puis ton haleine sent la fraise. Dégueulasse. Pour t'aider à te décoincer, bois un peu de potion magique.

Il me tendit la bouteille avec son air haut, supérieur. Je ne toucherais sûrement pas à ce truc, il me tendait clairement un piège.

- C'est de la poliakov, patate. Finit-il de façon crue.

Après de longues minutes d'hésitation, je bus de longues gorgées, ayant besoin d'alcool pour oublier Lykos et les folles canons encore postées sur ses cuisses. Bordel, j'avais envie de leur tirer les cheveux. Boire de façon illégale à une soirée remplie d'adultes me remettait du baume au cœur.

- Tu pourrais te passer pour mon nouveau copain ? J'aimerais impressionner mon ex. Tentai-je en lui rendant la bouteille.

Sa réponse fut négative.

- Tu m'as pris pour le bouche-trou de la soirée ou quoi ? Va voir ailleurs. Oh y a mon père à mille à l'heure, fais gaffe, il mord. Annonça-t-il en fronçant les sourcils à la vue d'un homme qui s'approchait vivement.

Je ne savais pas que Dante avait pour papa le directeur de l'université de la région. Cet apéro devenait soudainement plus intéressant.

- Tu peux disposer. Ordonna le crevard en souriant.

Il me prenait pour sa servante. Je me levai malgré tout, ne voulant pas participer à une discussion familiale. L'alcool brûlait encore ma gorge mais cela ne m'empêcha pas de me tourner vers le responsable de Yale, près du buffet.

C'était ma chance, à moi d'assurer.

Quelques heures plus tard, assise sur mon lit, le formulaire d'inscription parrainé de Yale dans la poche, je m'endormis le cœur plus léger. À la rentrée, j'allais certainement faire chier ce gars qui se croyait tout permis et récupérer mon Lykos. Mais ça, cela restait bien plus compliqué.


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