Chapitre 8

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Le village était peuplé et animé lorsque nous arrivâmes. Tout le monde nous observa en murmurant. La foule se fendit et trois hommes nous rejoignirent. Le premier était le plus âgé. Son visage était lisse et seule une fine barbe l'assombrissait. Ses yeux étaient d'un bleu nuit inhabituel et profond. Ils me transpercèrent de part en part et je fus certaine de le voir hocher légèrement la tête en retenant un sourire en coin.

- Je me doutais qu'il allait falloir venir te rechercher, Ryker, se moqua un jeune rouquin derrière son chef.

Il donna une tape dans l'épaule de Ryker qui sourit. Malgré tout, je vis dans son regard qu'il ne partageait aucune réelle amitié avec le roux. Il faisait semblant. Je le connaissais trop pour ne pas le voir.

- Je suis heureux de voir que tu as réussi à les récupérer sans y laisser ta vie, dit posément le chef du groupe.

- Le plus compliqué a été de retrouver le chemin jusqu'ici, répondit simplement le jeune roi.

Une forme d'animosité pulsait entre eux comme s'ils avaient déjà eu des différends. Ils semblaient même être à la limite de se comporter comme des ennemis.

- Enchanté, mesdames, poursuivit le chef en se tournant vers Addy et moi. Je suis Valtar, le chef de ce village.

- Sixtine Marchetta et ma sœur, Addy, répondit Ryker, nous empêchant de nous présenter nous-mêmes.

Valtar me fixa avec un air qui me disait qu'il savait que je ne m'appelais pas Marchetta. Se pouvait-il que mon origine soit connue dans toute la Faerie ?

Ce qui me perturbait le plus, cependant, c'était cette étrange alliance entre l'héritier du trône des Madsen et des Demi-Sangs. Comment Ryker en était-il venu à s'allier à des Faes ? Certes, les Demi-Sangs étaient à moitié humains mais ils vivaient en Faerie et ce détail changeait tout, à mes yeux. Ils vivaient aux milieux des Faes, ils avaient été enfermés avec eux dans la Cage de Fer. Une telle proximité devait forcément laisser des traces.

- Venez, vous devez mourir de faim.

Il nous enjoignit d'un signe de la main à le suivre et j'eus une hésitation avant de céder. Je me sentais... prise au piège. Encore plus que je ne l'avais été à la Cour Fae. Les cinq acolytes de Valtar nous encadraient comme des barreaux nous gardant prisonniers. J'avais quitté une prison pour une autre.

Valtar nous fit entrer dans ce qui ressemblait à une taverne. Et je ne m'étais pas trompée. La taverne était pleine, bruyante et l'odeur d'alcool était insupportable. Elle me retourna l'estomac. Valtar slaloma entre les bancs pour atteindre le fond de la pièce et ouvrit une porte par laquelle il nous fit passer. Le rouquin referma derrière nous.

Nous remontâmes un couloir obscur dont la majorité des torches étaient presque éteintes, seules des braises brûlaient encore, laissant à peine échapper des lueurs rougeâtres sur les murs, sur le sol. C'était tout juste ce qu'il fallait pour que l'on puisse mettre un pied devant l'autre sans se rentrer les uns dans les autres.

Valtar ouvrit une porte sur sa droite et s'effaça pour nous laisser entrer. Je lui jetai un regard en passant, tentant de sonder ces yeux bleu-noir. Mais il ne laissa rien transparaître si ce n'était son amusement. Il se doutait que je l'avais percé à jour. À croire qu'il me connaissait déjà, qu'il savait déjà me lire.

La pièce était vaste, brillamment illuminée par des bougies posées sur toutes les surfaces possibles. Il y régnait une chaleur presque insupportable. Valtar nous enjoignit à nous asseoir sur les quelques chaises en bois qui étaient alignées contre le mur. C'était définitivement un bureau qui voulait adopter un aspect officiel. Mais ça restait une pièce au fond d'une taverne. L'odeur d'alcool et de sueur s'était infiltrée jusqu'ici et ça cassait toute l'image qu'il essayait de se donner.

L'Arme du Roi (Le Grand Royaume #2)Where stories live. Discover now