Chapitre 7

1 0 0
                                    


Un instrument. Peut-être. Mais alors, tout devenait pire – parce que comment comprendre ? Si la réponse se trouvait dans le passé de quelqu'un d'autre, peut-être la personne qu'elle suspectait le moins, alors, comment savoir ? Comment blâmer cette personne, comment, comment –

-Je vais rentrer en France.

Elle regardait ses mains croisées. Les détachant l'une de l'autre, elle commença à jouer avec l'élastique passé autour de son poignet gauche. Elle n'osait pas regarder Marc. Il ne déclencherait aucune crise, aucune dispute, elle le connaissait à présent trop bien pour craindre cela – mais la déception dans ses yeux, la déception dont elle devinait aisément la présence, la rendait honteuse.

-Ah, fit-il.

Elle ne s'attendait pas à une tirade éloquente.

-C'est un voyage de plus, ajouta-t-elle, en haussant les épaules.

-Ouais, je suppose, marmonna Marc.

-C'est...

Elle prit une profonde inspiration.

-Après ce qu'il s'est passé... je ne sais pas, je crois, je crois que j'ai besoin de rentrer. De changer. Encore.

-Sans moi, compléta-t-il.

Elle traça une forme abstraite sur le sol, du bout de son pied.

-Pourquoi tu t'exilerais au fin fond de la campagne ? Ca ne te ressemble pas.

-Non, c'est pas trop mon truc.

-Tu as tout un monde à avaler.

-Tout un monde, oui.

Toujours sans le regarder en face, Edith se lança en avant, et enlaça l'homme au béret aux motifs étranges. Il lui rendit l'étreinte. C'était plus facile de s'exprimer ainsi. Il comprenait. Oui, elle l'entendait au rythme de sa respiration, au mouvement imperceptible de ses mains contre son dos, il comprenait. Il acceptait. Un bonjour s'accompagnait forcément d'un au revoir. Ce dernier n'avait pas besoin d'arriver tout de suite, il leur restait du temps. Edith n'avait même pas encore cherché de vol, pour son retour. Elle pouvait demeurer avec lui plusieurs semaines encore, peut-être même un ou deux mois. Elle les apprécierait plus encore que le reste.

-Oh, ne t'inquiète pas, murmura-t-elle au creux de son cou, on restera en contact. On fera de nouvelles randonnées improbables dans quelques années.

-Bien sûr, s'esclaffa-t-il.

Mais le rire sonnait faux. Tout comme la promesse d'Edith.

-On pourrait retourner à Québec ? demanda-t-elle soudain. J'ai envie de retourner sur les quais.

-Au coucher du soleil ? écouter les musiciens de passage ?

-C'est ça.

-D'accord.

-Fais en sorte de n'avoir rien à regretter, avait dit Lili. Le moins possible. Crois-moi, quand l'heure vient, ce sont les regrets qui tourmentent le plus.

Sa chevelure, autrefois un amas de rayons de soleil, s'était tellement amincie qu'elle recouvrait à peine le crâne rond sur lequel elle se plaquait. La jeune femme ne prenait plus la peine de se coiffer depuis longtemps ; au lieu de cela, elle calait les mèches gênantes derrière ses oreilles. Des cheveux plus courts dépassaient, ça et là. Dans leur adolescence, Edith avait tant envié la chevelure de sa meilleure amie – et, même assise à côté du lit d'hôpital, elle se rappelait des reflets qui l'avaient parcourue sous le soleil couchant, dans la beauté de l'après-midi où Lili avait escaladé le cerisier. Le temps avait passé. Il ne leur avait pas fait de cadeaux.

Aucune raison de s'inquiéterUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum