Chapitre 14

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-C'est super leur idée de cueillir des fleurs et tout, mais ils comptent faire quoi après ? A demandé Esther.
Elle avait ressorti ses cartes, Ethan était parti dans une dépression nerveuse et s'était assis au bout de la table avec une tasse vide. Gracie était rentrée avec Kirsten chez elle, qui avait immédiatement remarqué à ma tête qu'on n'allait pas avoir des discussions marrantes. Quand à moi, j'avais pris un morceau de pain et réfléchissait avec Esther tout en essayant de rassurer un peu Ethan.
-Récupérer le reste de l'île.
J'ai agité mon morceau de pain au-dessus de la carte avant de faire un mouvement circulaire pour désigner l'île entière. Esther a épousseté les miettes que j'avais semées avant de me jeter un regard sceptique.
-Graham semble être malade du pouvoir, me suis-je justifiée. donc ça ressemble à un truc qu'il pourrait faire, non ?
-J'ai peur de la mort, a balancé Ethan.
-Et comment on enraye ça ? A demandé Esther.
-J'en ai aucune idée, et désolée Ethan, mais je dois t'avouer qu'on va tous être obligés d'y passer.
-Peut-être en allant cueillir des fleurs aussi, continue Esther, absorbée par ses réflexions. Mais les pouvoirs ne font même pas mal pour l'instant, donc comment ils comptent nous menacer avec ?
-Mais t'as déjà considéré l'idée de mourir, genre, de plus exister ? A enchaîné Ethan.
Esther a pris la carte qu'on parcourait toutes les deux et s'est assise en soupirant bruyamment. Visiblement, qu'Ethan reste oisif alors que nous deux nous creusions la tête à la recherche de quoi sauver la ville l'agaçait. C'est vrai que c'était un peu frustrant, mais j'étais prête à accepter que chacun d'entre nous pouvions avoir un passage à vide de temps en temps. Surtout après une mort.
-Oui, Ethan, ai-je répondu, et je me suis dit que je serais pas la première à le faire et que si c'était si terrible que ça, on nous aurait déjà prévenu. Et peut-être que les pouvoirs ne peuvent faire de mal que si on le veut, non ? Ça aurait du sens. Et ça pourrait expliquer un certain meurtre présumé.
-Elle aurait voulu lui faire du mal ? Fait Esther comme si c'était débile.
C'était un truc d'intello. Les intellos étaient toujours agacés facilement, parce qu'ils se sentaient instinctivement plus intelligents que la moyenne, et que les gens d'une intelligence « inférieure » les énervaient.
-Mais genre, si moi je suis différent et que ça marche pas pareil ? La mort ça a l'air d'être un truc important, j'ai pas envie de me paumer, s'est plaint Ethan.
-Bon, deux secondes là ! Ai-je coupé. On résout un meurtre, on sauve la ville ou on s'occupe de sa thérapie ?
Tout les deux étonnés, m'ont dévisagé. J'ai soupiré et ai fini mon pain, en m'efforçant de paraître un peu énervée. C'était fatiguant, deux conversations à la fois.
-Ça n'a pas marché pareil pour lui ! S'est soudainement exclamée Esther. C'est ça !
-Pardon ? A fait Ethan.
-On a résolu le meurtre, a finalement lâché Esther. Mettons que ce mec...
-Daniel, a coupé Ethan.
-Mettons que Daniel aie une anomalie quelconque, une malformation cardiaque, un groupe sanguin différent, ou même n'importe quoi d'autre. Il aurait pas supporté la mutation et serait mort.
-Ça fait juste une hypothèse de plus.
-Mais la plus plausible qu'on aie jusqu'à maintenant. Bon, la ville. Qu'est-ce qu'on fait ?
-On crame tout, comme ça ils n'auront rien, ai-je proposé.
J'ai eu droit à deux regards noirs. Ethan a admiré le fond de sa tasse avant de se renverser en arrière pour s'enfoncer dans le dos de sa chaise.
-C'est bon, hein ! C'était une blague ! Me suis-je défendue.
-Mouais, a marmonné Esther. Et en plus ça s'appelle la politique de la terre brûlée.
-Ceci dit, c'est un plan, a fait Ethan.
-On peut faire quoi d'autre ? A poursuivi Esther.
-Les combattre, a proposé Ethan.
-Suicide collectif, ai-je dit.
-Bon, Jana, je sais pas ce qui t'arrive mais tes blagues macabres... tu vas te calmer, hein !
-Celui-ci n'était pas une blague.
Elle a répondu à ma pique par une moue agacée et s'est replongée dans ses cartes. Je me suis servie de mon reflet dans la vitre pour me recoiffer. J'allais me sortir un verre quand quelqu'un a frappé. C'était Melanie.
-Je venais te demander de voir ma fresque. Je voulais ton avis.
-C'est super, mais je ne m'y connais pas beaucoup en pein...C'est quoi, ça ?
Un Post-it était collé sur la porte.
-Je sais pas, a dit Melanie. J'avais pas remarqué.
-Et ça dit quoi ?
Avant qu'elle ne réponde à ma question, je décolle le carré orange fluo. Melanie m'a demandé ce que ça disait, mais je n'ai pas répondu et suis allé le coller sur la carte d'Esther.
-Bonne nouvelle, ai-je annoncé ; on a encore une chance avant d'en arriver au suicide collectif.

Échoués (FR)Where stories live. Discover now