Chapitre 27

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Merde.
Pendant une bonne minute, ce seul mot m'est revenu en tête, rien d'autre. J'avais mal, partout sans exception. Mes oreilles bourdonnaient furieusement.
Puis le choc du réveil a commencé à s'évaporer, et j'ai pu faire le tri. Mes oreilles ? Désagréable. Ma tête ? Désagréable. Mon épaule gauche et mes bras ? Mal. Côté gauche ? Mal. Ma cuisse ? Entre les deux. Mes pieds ? Rien. Je me sentais compressée ; pour une bonne raison, j'étais ensevelie sous des débris. Fallait que je me sorte de là.
Après ce rapide check-up, je me suis préparée mentalement à ouvrir les yeux, ayant des doutes quant à ce que je risquais de voir. Puis je les ai finalement ouverts. Il faisait terriblement noir, donc ça ne changeait pas grand chose. J'ai réfléchi autant que mon état me le permettait, puis j'ai finalement fait s'étendre aussi loin que possible mon point de lumière, ce qui a déjà arrangé la luminosité. Comme c'était sur le bras où j'avais mal, je ne l'ai en revanche pas déplacé.
Je remplacé le « merde » par un « d'accord », et j'ai soulevé mon bras valide et commencé à pousser contre la voûte de pierre qui s'était formée au-dessus de mon visage. J'ai commencé par y imprimer une certaine traction, puis lorsque ça a commencé à bouger, j'ai pressé plus fort. Ma côte me faisait hyper-mal, mais elle ne se soignerait pas si je restais ici, alors j'ai serré les dents et j'ai continué.
Après une trentaine de secondes, le haut de la couche de caillasse a lâché et j'ai entendu plusieurs pierres ricocher sur le reste de la couche à l'extérieur, et des gens parler. J'ai continué à pousser, et bientôt les personnes qui parlaient sont venues m'aider à m'en sortir.
Cinq minutes plus tard, avec l'aide d'Ethan, de Graham et d'une autre fille, le haut de mon corps était totalement dégagé. Sans la pression des pierres, j'avais déjà moins mal au bras, mais maintenant que j'étais assise, ma côte me lançait atrocement. Pour éviter de perdre encore du temps à dégager mes jambes, je me suis tout simplement relevée dans un ruissellement de débris.
J'ai jeté un coup d'œil circulaire au lieux. C'était exactement ce à quoi je m'attendais ; des débris et des corps. L'hôtel de ville avait été complètement soufflé ; l'explosion avait dû partir du sous-sol du bâtiment, ce qui prouvait bien qu'ils avaient prévus ce genre de dispositifs d'urgence. Une quinzaine de personnes avaient déjà été tirées des débris. Pour les presque cent cinquante qui étaient parties se battre, c'était misérable.
-Donc le plan, m'a expliqué Ethan, c'est qu'on identifie qui est mort et qui est vivant. Les blessés et les gens encore vivants, on s'en occupe. Le reste peut attendre.
-Ça marche. Vous avez trouvé combien de...morts, pour l'instant ?
-Trois.
-OK.
Le ratio s'est inversé encore plus vite que ce que je ne craignais. Nous découvrions des morts à une vitesse terrifiante. Des gens étaient partis chercher Melanie pour s'occuper des blessés, mais ils traînaient et on ne savait pas pourquoi.
J'aidais du mieux que je pouvais à sortir les gens, malgré mon bras et ma côte. La plupart du temps, ça consistait à illuminer les décombres le plus possible pour que les gens évitent de marcher inconsciemment sur quelqu'un. La nuit allait bientôt tomber, et nous n'avions pas vu l'ombre d'une seule aide. Les gens de VWR s'étaient barrés comme des voleurs.
-Soit ils se sont dit que ça ne servait à rien vu notre état, soit ils sont au courant qu'on a appelé de l'aide, a répondu Ethan quand j'ai fait la remarque.
-Enfin, en tout cas on est débarrassés, a ajouté Graham.
Pile avant la tombée de la nuit, nous avons terminé de quadriller les décombres. Il nous fallait encore faire le tour de l'île pour réunir les déserteurs, et aussi aller chercher la petite bande de pacifiste au bord de mer. Selon les estimations, nous n'étions plus que cent vingt sur les deux cent cinquante personnes qui étaient sur l'île au début. Ça faisait beaucoup. Plus de la moitié.
Mais tous ceux qui étaient encore sur le site de l'éboulement, ensevelis sous les pierres, étaient donc décédés. Je réussissais à me contenir, jusqu'à ce que je remarque un bout de chevelure rousse et sale, dépassant entre deux pierres. M'éclairant à l'aide de mon pouvoir, j'ai marché jusque là, et soulevé de la pointe du pied la pierre.
J'en avais vu des saletés aujourd'hui, mais là, j'étais à ça de vomir. Esther avait dû tomber, et se cogner la tête sur une pierre et en recevoir une sur le haut du crâne en même temps. Son crane était concassée, comme si elle était passée par un casse-noisettes géant.
Pendant un premier temps, j'étais trop sonnée pour réagir. Pendant un second temps, les secours sont arrivés -un peu trop tard.

Échoués (FR)Waar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu