11 - Heigh-ho!

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Hello ! Alors je tenais à vous remercier d'avoir lu... si loin ! Je remercie également les votants et les reviewers (enfin la revieweuse ^^). Toutes les critiques me sont très utiles, donc n'hésitez pas à en faire, surtout que l'ellipse narrative étant assez importante... j'espère n'avoir perdu personne ! Je ne me rends pas bien compte de ce qui est compréhensible ou non lorsque j'écris, ce qui endort etc... Donc si vous vous ennuyez ou que vous trouvez qu'il y a trop de scènes avant le retour à la narration de Heath, signalez-le-moi.

Mis à part ça : bonne lecture !

Sea

*

Attention : la scène suivante est susceptible de heurter la sensibilité de candidats au djihad. Merci pour votre compréhension.

*

Mossoul, 2015

- Attention ! Attention !

La charge massive de dynamite que les djihadistes avaient placée sans beaucoup de discernement contre les bas-reliefs du palais royal de Ninive explosa, faisant voler en éclats le gypse et le marbre, détruisant à jamais plus de trois mille ans d'histoire ainsi qu'une jeune recrue qui avait tenté de prendre un selfie sans tenir compte de la puissance de l'onde de choc.

    Mutilées, les grandes sculptures des bêtes ailées qui faisaient si peur ; envolées les inscriptions cunéiformes que plus personne ne savait lire – si tant est que les spectateurs de cette scène sussent lire quoi que ce fût. Le corps du djihadiste qui avait tenté de prendre un selfie était déjà enseveli sous la poussière asphyxiante et les lourdes décombres, et ses camarades ne cherchèrent pas à l'en dégager. Leur sultan lui trouverait aisément un remplaçant dans la soirée, au détour d'une conversation Facebook. Ils déchargèrent de nouveaux barils de dynamite d'un pick-up qui était garé à distance respectable et les portèrent près des murs qui avaient été épargnés, répétant à la poussière et à l'énorme lion qui les observait tranquillement depuis le bas-relief combien leur dieu était grand. 

    L'un d'eux, peut-être moins convaincu que les autres, fut frappé au visage par un éclair. Il s'interrompit dans sa marche et regarda vers le sol, là d'où l'éclair était parti.

- Eh ! Attendez ! Regardez ça !

Ses acolytes s'immobilisèrent. Eux aussi avaient vu. Ils posèrent avec précautions au sol la dynamite et, tandis que certains faisaient signe à ceux qui étaient restés près des véhicules de venir, d'autres glissaient dans un trou béant formé par l'explosion. 

- Vous avez vu ça ?! Ça brille ! C'est quoi ?

- Vous pensez que c'est de l'argent, ça doit valoir un paquet...

- Avec ça, on va pouvoir s'acheter au moins... trois... non. Quinze... Non, attendez... Euh... Combien ça fait, déjà, neuf fois trois ? Quinze ? Non... Pas quinze...

Le mathématicien en herbe tirait la langue, tout à ses comptes, et les autres l'ignorèrent et se mirent à déterrer la plaque hérissée de lances. C'était sur le métal gris et brillant que le soleil s'était reflété, frappant ainsi l'un des djihadistes au visage.

- C'est de l'argent ? répéta un autre, plus matérialiste. Oh, c'est un pavé, en fait !

- Non, crétin, c'est un long coffre !

- M'insulte pas ! exigea le matérialiste.  

Il avait les bras et le visage couverts de poussière, à présent, à l'instar de tous ceux qui l'entouraient. Affairés et bien moins pressés de détruire le palais d'Assurnazirpal, les djihadistes déterrèrent le coffre sur quelques centimètres. Exténués, ils décidèrent de s'accorder un instant de repos.

- Pourquoi il y a des lances plantées dans le pavé ? questionna le matérialiste. Oh, regardez !

Dans un sifflement métallique, il tira presque sans effort la longue et large lance d'argent du coffre. Il ne fallut que quelques minutes à ses ataviques partenaires pour tirer du fameux coffre toutes les lances. Tandis que le mathématicien se lançait dans un décompte, espérant qu'elles fussent en argent massif, les autres réalisèrent que le couvercle du coffre s'était un peu descellé. Ils commencèrent donc joyeusement à imprimer de grands coups de pieds sur le coffre, faisant voler la poussière coupante dans les yeux du voisin et déchaussant rapidement le couvercle en déclarant régulièrement que leur dieu était grand. 

- J'ouvre ! lança le matérialiste lorsqu'il s'aperçut que l'entreprise était possible.

Tous retinrent leur souffle : certes il était fort divertissant de réaliser des travaux de voirie à Ninive, mais si l'on pouvait réveiller l'enfant qui sommeillait en chacun et découvrir un coffre au trésor, c'était tout de même mieux.

    Le couvercle grinça lourdement – pour sûr, de l'argent massif ! – et glissa, écrasant au passage les pieds d'un malheureux djihadiste qui ne s'était pas reculé à temps. Ce dernier, les métatarses réduits en bouillie, s'apprêta à hurler de douleur et à abreuver les responsables de sa souffrance d'injures bien senties lorsqu'une terreur sans pareille lui ôta toute envie de se faire plus remarquer qu'un autre.

    Le coffre était loin de contenir ce que tous espéraient. Lorsqu'ils virent la créature qui gisait, allongée dans ce qui était en réalité un cercueil, étirer ses longs bras squelettiques sur lesquels des lambeaux de chair putréfiée se trouvaient encore, les djihadistes s'envolèrent comme une nuée de moineaux en hurlant de terreur. L'un d'eux crut judicieux de se saisir de sa kalashnikov et il ouvrit le feu sur la créature, ne manquant pas de toucher celui qui n'avait pu fuir, faute de métatarses fonctionnels.

    La créature ressemblait plus ou moins à un humain, si ce n'est que son visage semblait avoir fondu et que de longues griffes noires jaillissaient du bout de ses phalanges jaunies. Ici et là, sous la chair pourrie, apparaissait le squelette du monstre.

    Et le monstre vivait.

    Une pluie de balles s'abattit sur le cercueil, à nouveau, mais cela ne sembla pas gêner la créature. Le djihadiste aux métatarses brisés sentait du sang remonter le long de sa trachée lacérée, mais la douleur n'était toujours rien face à la terreur qu'il ressentit lorsque le monstre encore allongé le saisit à la gorge, exactement comme un dormeur mal réveillé s'empare de la bouteille d'eau qu'il a posée au pied de son lit. Le djihadiste gargouilla une prière à la créature, espérant qu'elle l'épargnât, mais rien n'y fit. D'une poigne de fer, le monstre – qui se trouvait quelques minutes auparavant dans un cercueil empalé par plusieurs lances d'argent – écrasa lentement la gorge de sa victime, y enfonçant ses griffes noires. Il n'y aura que l'auteur de ce livre pour le confirmer, car les djihadistes épouvantés qui avaient réussi à s'échapper tiraient de trop loin pour remarquer le détail suivant, mais de la chair rouge et fraîche vint s'ajouter au patrimoine corporel quelque peu réduit de la créature. Une fente apparut à la place de ce qui pouvait avoir été la bouche du monstre et lorsqu'elle s'ouvrit, un liquide jaunâtre, purulent et nauséabond en coula aussitôt. Le djihadiste qui était en train de mourir d'asphyxie n'avait pas encore perdu connaissance. Ses yeux exorbités injectés de sang eurent le temps d'envoyer à ce qui lui restait de conscience le visage monstrueux de la créature qui se rapprochait de plus en plus du sien, lui faisant monter aux narines une effroyable odeur. Et la dernière chose que le djihadiste entendit avant de sentir la bouche tiède du monstre se refermer sur la sienne, fut une voix joyeuse et sirupeuse à souhait qui semblait monter de ses propres entrailles :    

- Et maintenant, fils, qui est grand ?

*

A suivre...

Vampire ConsultantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant