1. Première rencontre

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Le soleil se lève à peine et je suis déjà dehors. Bien qu'on soit un jour de semaine, ce n'est pas dans mes habitudes d'émerger à cette heure. Tout au contraire ! Ce qui signifie que l'affaire qui m'occupe est d'une extrême importance. Depuis le temps que j'attends de pouvoir enfin concrétiser ce projet. Jamais, je n'en ai été aussi proche.

Me voilà donc, assis sur un banc, à boire un café médiocre, devant une petite maison dans une ville négligeable. Difficile d'imaginer plus ennuyeux ! J'ai tout planifié depuis des semaines, repéré tous les lieux qu'elle côtoie au quotidien afin de déterminer le plus propice pour notre première rencontre.

En dépit de toute cette préparation, j'ai tardé à passer à l'action. Mais bon sang ! Non seulement, il s'agit d'une gamine, mais en plus elle habite encore chez ses parents ! Sérieusement, je ne pouvais pas tomber sur une fille un peu plus intéressante ?

Pourtant, cela ne change rien, je dois mener à bien ce projet. Il est essentiel que j'aille jusqu'au bout. Et ce, même si l'entreprise se révèle beaucoup moins amusante que prévu. Même son prénom transpire l'ennui : hyacinthe. Non, mais à quoi ont bien pu penser ses parents ?

En effectuant mes recherches au préalable et en la suivant en toute discrétion pour déterminer ses habitudes, je n'ai rien découvert digne d'intérêt. Au moins, je ne risque pas de m'attacher un minimum à elle. Le contraire rendant ma tâche plus difficile. Là, je vais pouvoir me distancer suffisamment de tout cela pour pouvoir aller jusqu'au bout. Et avec de la chance, cela ne prendra pas très longtemps. Plus vite je m'en débarrasse, plus vite je reprends le cours de ma vie.

Par chance, elle n'a pas l'air très fine ! Elle ne se rendra sans doute compte de rien. Au moins un élément positif dans toute cette histoire pour laquelle je ne prends aucun plaisir. Je ne vois pas comment agir autrement compte tenu des circonstances. Je le dois pour Emma. Si seulement, j'avais pu empêcher ce qui est arrivé.

L'une des premières choses que j'ai faites avant de me rendre dans ce trou paumé, a été de surfer sur le web en quête des premières informations. De fait, un tour du côté des réseaux sociaux s'est imposé. Et là, horreur ! Elle n'y figure que très peu, ne publiant rien de personnel hormis quelques rares photos de groupe. Et en prime, elle appartient à cette catégorie des amateurs de vidéos de chats ! Ces trucs débiles que les internautes partagent à tout bout de champ sur leur mur. Par pitié, achevez-moi ! Jeune, dépendante et insipide, le tiercé gagnant ! Rien de mieux pour mettre ma détermination à l'épreuve.

Tout ce que j'ai déniché, en plus, concerne son parcours scolaire sans faute, avant d'intégrer une université prestigieuse, payée à l'aide de nombreuses bourses fonctionnant sur le mérite.Une intello, en prime ! De mieux en mieux. Puis, elle a décroché un stage dans une grande boîte d'affaires. Manifestement, elle n'avait pas su gérer, car une fois ses études terminées, elle s'est empressée de retourner vivre chez ses parents. Il va donc falloir que je fasse attention à ne pas effrayer cette pauvre chose !

Mais pour l'heure, le moment est venu d'agir et c'est ce que je m'apprête à faire ce matin. Voilà pourquoi je patiente sur ce banc tandis que cette très chère demoiselle ne daigne pas sortir son cul quelconque de chez ses parents. Certes, je suis arrivé en avance afin d'être sûr de ne pas la manquer. Ça aurait été vraiment crétin de la rater.

Réglée comme du papier à musique, je la vois sortir à sept heures quarante-cinq comme tous les matins. Je la laisse me dépasser, puis me lève pour me diriger à sa suite vers l'arrêt de bus. Le trajet pour son travail dure près de trois quarts d'heure. Ce qui est parfait pour une première prise de contact. Plus court, on ne pourrait qu'échanger des banalités et plus long, le silence pourrait s'installer.

Conserver une certaine distance entre nous s'avère difficile, en dépit de ses longues jambes fines, mon rythme est plus rapide que le sien. Nous arrivons quasi en même temps que notre transport.

Hélas, la chance ne semble pas de mon côté aujourd'hui. Je monte dans le bus juste derrière Hyacinthe, quand une jeune femme me bouscule. Elle s'excuse prétendant ne pas avoir fait attention. Mais j'en doute. La manière dont elle m'a reluqué juste avant ne m'a pas échappée. Evidemment, c'est le moment que choisit le chauffeur pour démarrer. Du coup, déséquilibré, je m'écroule à moitié sur Hyacinthe. Cette dernière tourne la tête pour me fusiller du regard. Génial, comme première approche, c'est idéal !

D'ordinaire, j'ai toujours la côte avec la gente féminine, et ce pour mon plus grand plaisir. Jamais de difficulté particulière. Si je désire une femme, elle ne me résiste pas. Un peu plus et je n'aurais qu'à me baisser pour en ramasser une.

Attention, ce n'est pas pour autant que je n'aime pas un peu de difficulté. Sans parler de celles aux moeurs un peu trop libérée. Je n'apprécie pas de me savoir interchangeable à leurs yeux.

Les déconvenues ne sont pas terminées. Le temps de valider mon ticket, un type un peu enrobé d'une quarantaine d'années, le front bien dégarni, me coupe le chemin pour venir s'asseoir à côté de ma proie, me reléguant ainsi sur le siège arrière ! Bon, je n'ai pas entièrement fait chou blanc, puisque le contact est établi. J'aurais souhaité qu'il soit plus positif.

De là où je me situe, je ne parviens pas à voir ce à quoi elle occupe son temps durant le trajet. Est-elle en train de lire un bouquin ? Si oui, en connaitre le titre m'aiderais à l'aborder lors de notre prochaine rencontre. Pour le moment, ça me parait cuit. J'en profite alors pour vérifier mes mails sur mon téléphone portable. Etant l'un des fondateurs de mon entreprise, je me dois de me tenir informé au quotidien sur les affaires en cours, bien que la période soit assez calme d'où mon absence. Je réponds aux messages les plus urgents.Inutile d''y consacrer plus de temps que nécessaire. après tout, ne suis-je pas sensé me trouver en congés ?

Je décide de descendre au même arrêt que Hyacinthe. De là, je pourrais récupérer ma moto. Sur une impulsion, je la rattrape sur le trottoir et décide d'engager la conversation :

- Salut,

- Hum

Ce simple son représente tout ce que j'obtiens d'elle. Il est clair qu'elle ne souhaite pas me faciliter la tâche. Peu importe, je sais me montrer persévérant quand la situation l'exige. Je n'en serais pas arrivé aussi loin dans le monde du travail si je m'étais arrêter au premier obstacle !

- Encore désolé pour tout à l'heure. Je n'ai pas anticipé la bousculade.

- Hum.

- Ça t'arrive de faire des phrases pour répondre quand on s'adresse à toi ?

- Uniquement si j'ai envie d'engager la conversation.

Elle ne me laisse pas le temps de répliquer et avance d'un pas rapide. Je juge plus sage de ne pas persévérer pour aujourd'hui. De toute évidence, je l'ai quelque peu sous-estimée. Il faut dire qu'elle ne doit pas avoir l'habitude qu'un mec comme moi la remarque et encore moins lui adresse la parole. Pas étonnant qu'elle soit sur la défensive.

Décidément, il fallait vraiment que j'aborde cette fille autrement qu'à l'accoutumée, sans quoi je n'arriverais à rien. Ce qui n'était pas une possibilité. Je n'avais pas pour habitude de ne pas atteindre les objectifs que je m'étais fixés.

Le rire du destin !Where stories live. Discover now