Tentation & bullets

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Johnny

J'ouvre les yeux sur des cheveux noirs et parfumés et une nuque pâle et douce. Ma main est posée sur sa hanche nue et je prends plaisir à la presser délicatement. Après qu'elle a éclaté en sanglots pendant la nuit, bourrée et troublée, j'ai fini par la coucher. Je lui ai ôté son jean trop grand et l'ai glissée sous les couvertures, avant de la rejoindre. Elle n'a cessé de pleurer que lorsque je l'ai entourée de mes bras et pressée contre mon torse. Je me suis endormi dans cette position. D'habitude, j'aime garder mon espace vital dans un lit ; je déteste qu'on me colle plus que nécessaire en dehors du sexe, mais le velouté de sa peau a eu raison de mes lubies.

Je ne peux pas bouger sans risquer de la réveiller, sa tête reposant sur mon bras – bras que, d'ailleurs, complètement ankylosé, je ne sens plus du tout. Je jette un coup d'œil vers la fenêtre aux rideaux beige qui laissent filtrer un épais flot de lumière, ce soleil qui m'a brûlé la peau durant toute mon enfance, me tannant la couenne aussi bien que celle de Siana.

J'essaie de penser à autre chose qu'au corps menu de Cheyenne blotti dans mes bras, mon érection matinale habilement lovée contre ses fesses. Cependant, au moindre mouvement, elle se renforce et ma raison se fait la malle. Il faut que je me lève, sinon je risque de commettre une bêtise et Cheyenne est loin d'être la nana lambda que je me tape d'ordinaire. Cheyenne est fermée, prisonnière, tremblante et farouche. Elle ressemble à un verre fêlé qui menace de céder sous mes doigts et de me trancher la peau au passage.

La première fois qu'on a fait l'amour ensemble, on était allongés dans le parc, près de mon ancienne école, à Wild High City. Couchée sur l'herbe, écrasée sous mon poids, ses cheveux noirs éparpillés autour de sa tête comme une couronne sombre, elle paraissait si fragile que, lorsque je la touchais, j'avais peur de la casser. Alors, j'avais été aussi doux que possible. Jamais de ma vie, je n'avais fait l'amour à une femme de cette façon, en ayant toujours la trouille de la blesser. Elle n'avait pas bougé d'un pouce, telle une statue de marbre, seules ses cuisses étaient remontées le long des miennes. Elle a serré les poings tout du long, mais elle s'est forcée à garder les yeux ouverts sur moi, comme pour se rappeler que je n'étais pas l'un de ces connards qui lui avaient fait du mal. Et je l'ai regardée aussi, pendant que je l'embrassais, pendant que je la prenais. C'était à la fois puissant, dérangeant et troublant.

Cheyenne possède ce petit artifice qui trompe le cerveau. Elle dégage le charme captivant d'une Amérindienne sans même en avoir conscience. Elle s'arrange tellement pour passer inaperçue, espérant devenir invisible, qu'elle en oublie sa beauté profonde, pourtant, moi, je ne vois qu'elle. Ses immenses yeux noirs en amande, sa bouche rose et pleine, ses pommettes hautes, ses seins petits et bien galbés, son ventre doux, légèrement rebondi...

Je bande plus dur. Je dois arrêter de penser à ce qu'elle m'inspire, toutefois, ma main, indépendante de ma volonté, glisse sur sa peau le long de ses côtes. Je me mords la lèvre inférieure. Je dois m'éloigner rapidement, mais au lieu de ça, je me rapproche encore, jusqu'à appuyer mon érection de plus en plus douloureuse contre ses fesses. Elle laisse échapper un gémissement à mon contact envahissant.

Merde...

J'arrache mon bras de sous sa tête et me relève précipitamment hors du lit, la queue si tendue qu'elle menace de s'extirper de mon caleçon. Je traverse la chambre sous les yeux ahuris et pleins de sommeil de Cheyenne qui se redresse sur un coude sans comprendre, et claque la porte de la salle de bains derrière moi. Appuyé sur le rebord du lavabo, la tête penchée en avant, j'observe mon boxer tendu en grinçant des dents, puis je le retire rapidement et fonce sous la douche. J'ouvre le robinet, fais cracher et vrombir la tuyauterie et laisse le jet me calmer, puis ma main, jusqu'à ce que toutes les multiples images qui polluent mon cerveau en surchauffe retournent à l'arrière de mes pensées.

Hot Gun (paru chez BMR)Where stories live. Discover now