Chapitre 1

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« Bactéries et Bio-électricités, un sujet d'avenir ? » Peut-être bien, mais j'avais tendance à penser que l'avenir avait d'autres chats à fouetter. Non pas que le sujet de ce maudit devoir était particulièrement ennuyeux, j'étais certaine qu'un grand nombre de gens trouvaient ça fascinant, j'avais simplement du mal à comprendre comment les bactéries allaient bien pouvoir nous sauver d'une guerre qui durait déjà depuis six décennies. Notre professeur n'était de toute évidence pas du même avis étant donné le coefficient aberrant qu'il avait donné à ce devoir et aux trois derniers qu'il avait demandés les semaines passées. Je me trouvais donc le nez enfoui dans des bouquins tous plus gros et barbants les uns que les autres pour définir si oui ou non, il était possible de charger une pile à l'aide d'un tas de terre. Réponse ? Peut-être bien... Du moins si cette terre était suffisamment riche en bactéries et qu'on disposait d'un bon siècle pour la charger.

Heureusement pour moi, Elena qui était au grand dam de toutes les filles de la faculté aussi belle qu'intelligente, m'avait généreusement donné ses notes. Je m'évertuai donc à reprendre une grande partie de celles-ci pour combler les trous laissés par mon incompétence et sauvegardai mon fichier. Il était rare qu'elle m'aide de cette manière, autrement ma moyenne aurait été nettement supérieure, mais aujourd'hui était un jour spécial. Nous devions fêter son anniversaire à elle et à son frère jumeau, Arthur, et elle tenait absolument à ce que je m'y rende malgré le retard monstre que les examens de fin d'année faisaient peser sur mes épaules. Elle m'avait donc soudoyé à base de notes et de fiches sur les prochains devoirs et j'avais évidemment accepté. Qui donc préférerait rester enfermé à travailler alors que tous ses amis seraient en train de faire la fête ? Certainement pas moi, je n'étais pas assez bonne élève pour avoir des remords à ce sujet.

Je refermai mon vieil ordinateur avec précipitation, jetai un coup d'œil à l'horloge numérique qui me servait de réveil et me levai d'un bond. Être en retard était ma spécialité, cette fois-ci ne ferait pas exception malgré les efforts d'Elena. Il me fallut quelques minutes avant de trouver un jean propre sous le tas de vêtements qui trônait au pied de mon lit et une dizaine d'autres pour dompter mes cheveux. Pour ce qui était du maquillage, j'abandonnai l'idée sans trop de difficulté, ces trucs là ce n'était pas fait pour moi, je manquai à chaque fois de me crever un œil et tout ça pour un résultat médiocre. De toute manière, ce n'était qu'une soirée entre amis, je n'avais pas besoin d'aggraver mon retard pour une histoire aussi stupide qu'un peu de mascara.

Je fis une dernière fois le tour de mon appartement à la recherche de ma veste et la trouva nichée à côté de l'unique plante verte qui avait survécu à mon manque d'attention. Cette chose n'avait pas besoin d'eau, ou alors elle en trouvait sans mon aide, mais la voir encore vivante restait pour moi un grand mystère. Je claquai la porte et dévalai les escaliers en bois de l'immeuble sans prêter attention aux cris de mes voisins de palier ou aux bruits douteux qui s'échappaient de ceux du dessous. Je ne payai pas très cher pour vivre ici, du moins pas aussi cher que mes amis, ce qui m'octroyait le droit d'avoir des murs en carton, des fuites d'eau toutes les semaines et mon lot de nuisibles chitineux. Arthur m'avait bien conseillée cent fois de changer d'appartement en me rappelant sans arrêt que s'il le fallait, il était prêt à m'accueillir chez lui un temps, mais j'avais toujours refusé. Déjà parce que je n'avais aucune envie de vivre chez lui et sa sœur, mais surtout parce que ma tante ne serait jamais d'accord pour que je dépense inutilement son argent dans un appartement hors de prix. Elle était généreuse, du moins autant que pouvait l'être une femme qui avait pris soin d'une enfant qu'elle ne connaissait pas et n'appréciait pas pendant dix ans, mais pas assez pour me fourrer une cuillère en argent dans la bouche.

Elle était difficile à cerner, nos relations étaient souvent tendues et désagréables, mais je ne pouvais pas nier qu'elle m'avait donné bien plus que ce que je méritais après la mort de mes parents. Parfois je la plaignais, parfois je la détestais et souvent je me contentais de l'ignorer, mais ça elle me le rendait plutôt bien.

Aloys (Tome 1) : lightning and shadowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant