Chapitre 20 (1/2)

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Bon. J'étais définitivement dans une impasse. Nier ce qui se passait entre Aaron et moi tournait au ridicule. J'ignorais à quel moment les choses avaient changé entre nous, son pouvoir m'avait été vitale, c'est vrai, mais même si c'était lui qui m'avait poussé vers Aaron, ce n'était pas son don qui avait rendu son contact aussi addictif. Alors quoi ? Ses sourires moqueurs et son petit air supérieur ? Non, ça, ça me donnait plutôt des envies de meurtre. Je soupirai, à quoi bon chercher à comprendre ? Au fond ça ne changeait rien, mon plan était toujours de m'enfuir. Aaron me plaisait, je me damnerais pour un autre de ces baisers, mais soyons honnêtes, aucun homme ne pourrait rivaliser avec ma liberté, aussi beau soit-il.

Sauf qu'il allait me chercher. Pas parce qu'il ressentait hypothétiquement quelque chose pour moi, mais parce que c'était son rôle. Aaron Melchior, le fidèle général de l'ANH n'allait pas laisser un membre de son escouade déserter sans réagir. Il serait furieux. Un sourire m'échappa à cette idée. Tant pis pour lui, il n'avait qu'à jouer avec les sentiments de quelqu'un d'autre !

Peut-être fallait-il simplement que je parte, que je prenne mon courage à deux mains et que je me décide enfin à tenter quelque chose. Avec un peu de chance il me laisserait tranquille et ne s'apercevrait de mon départ que demain. D'ici là, je pourrais être loin. Pourtant je n'arrivais pas à m'y résoudre. Quelque chose clochait, c'était trop facile. Ils avaient sûrement un moyen de localiser leurs soldats, un P-gène avec un pouvoir de pistage ou de simples puces électroniques. Je ne les avais jamais vus m'en installer une mais j'avais été inconsciente tellement de fois qu'ils auraient très bien pu le faire sans que je m'en aperçoive.

Ma réflexion s'arrêta au moment où j'entendis des pas lourds provenant de l'hôtel. L'idée qu'Aaron puisse émerger du bâtiment d'une seconde à l'autre me fit bondir sur mes pieds. La dernière chose dont j'avais besoin c'était d'avoir une explication avec lui maintenant. Je me faufilai derrière un petit muret en pierre qui bordait la place et vis avec soulagement un soldat en uniforme vert sortir de l'hôtel. Rassurée, je me redressai et m'éloignai davantage de la place. Marcher m'aiderait peut-être à prendre une décision. Etais-je prête à prendre ce risque ? Je maîtrisais mieux mes pouvoirs, mais de là à me défendre contre Aaron ou les autres ? C'était du suicide.

Je n'avais pas fait vingt mètres que quelque chose attira mon attention. Une petite ruelle qui donnait sur l'arrière d'une vieille boutique aux vitrines brisées dégageait une intense lumière blanche. Je m'en approchai discrètement et m'aperçus que la lumière provenait d'une dizaine de spots lumineux placés en cercle autour de quelque chose que je ne parvins pas à identifier. Je jetai un bref coup d'œil autour de moi et constatai que j'étais seule. Profitant de l'occasion, je me glissai dans la ruelle.

Il s'agissait d'un ancien parking dont on discernait encore quelques bandes blanches indiquant les places de stationnement, mais à la place des voitures se trouvaient d'énormes caisses qui contenaient probablement des équipements militaires. Au centre du parking, enfermées dans de solides cages en métal se trouvaient six créatures aux formes humanoïdes. Je n'eus pas besoin de m'approcher davantage pour comprendre de quoi il s'agissait. Ils avaient fait des prisonniers. Ces six élémentaires étaient les seuls qui avaient échappé au carnage sur la plage. Le souvenir de la peur et de la tristesse que j'avais vu en eux lors de l'attaque me revint. Mon estomac se noua douloureusement, convaincue que la place de ces créatures n'était pas dans une cage, mais je me souvenais également de la vague immense qui avait menacé de balayer la ville et de tuer tous ces innocents et ce fut suffisant pour m'empêcher de les libérer. J'avais ressenti la colère de certains d'entre eux, mais pas le genre de colère qui pousse au meurtre et à la guerre. Non, ce genre de colère je ne l'avais ressentie que chez les membres de mon escouade et tout particulièrement chez Aaron. Alors pourquoi ? Pourquoi nous attaquer si cela les effrayait tant ?

Aloys (Tome 1) : lightning and shadowWhere stories live. Discover now