Chapitre 27

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— N'est-ce pas plus simple de me dire où tu me conduis ? Demanda Elhéa après s'être apprêtée comme le lui avait demandé Soen. Elle portait une robe blanche qui recouvrait l'entièreté de son corps. Elle avait honte des multiples balafres qui zébraient son corps. Dans ce pays, les femmes sont d'une pudeur inégalable, elle se sentait comme étant une intruse d'une certaine manière. Elle avait l'allure de la pureté, mais sa nature témoignait le contraire.

— Profite de la vue tout en dégustant ton thé, répondit Soen en posant une main sur sa cuisse gauche. Nous avons un long trajet à effectuer avant de parvenir à notre destination finale.

— Vaincue, elle décida de se taire tout en se focalisant sur ce paysage qui s'offrait à elle. Elle essayait de masquer sa gêne causée par le toucher du jeune homme sur sa cuisse, sans succès, car ses joues devinrent cramoisies.

— Elle se regardait dans le rétroviseur, vérifiant chaque détail sur son visage. Elle avait l'impression qu'elle portait chaque trace de son passé dans son regard. Elle se demandait même si les autres ne pouvaient pas la sonder au simple fait de poser leurs regards sur elle.

— Tu es très silencieuse, tout va bien ?

— Je n'arrive pas à saisir ce que tu trouves d'élogieux en moi pour que tu m'accordes une quelconque forme d'intérêt. Je pense que la classe sociale relève d'une grande importance dans ta famille, je suis très loin d'avoir le même statut que toi. Je n'ai rien de bon à t'apporter !

— Je pensais que nous ne parlerions plus de telles choses, je crois que je n'ai pas été assez clair.

— Je suis navrée, je n'arrive toujours pas à concevoir que tu...

— Que je puisse t'aimer ? L'interrompit-il.

Prise de court, elle répondit par un simple hochement de tête. Elle n'avait pas songé à l'amour, qu'est-ce que l'amour ? Elle n'avait pas la moindre idée de ce que cela voulait dire.

— Je ne suis pas en mesure de te sonder comme tu peux le faire, Elhéa. Tu es la seule à avoir honte de toi-même. Je n'ai pas honte de toi, il n'y a pas de raison pour que je le sois !

— Il y en a de multiples pourtant, murmura-t-elle alors que des perles se formaient au coin de ses yeux. Comme tu viens de le dire, puisque je suis la seule à pouvoir me sonder, je sais donc que je n'ai rien de bon à t'apporter.

— Je pense qu'il faut que tu cesses de penser et de vivre le moment présent. Plus tu essaies de trouver des raisons pour que je perde mon intérêt pour toi, plus mon amour pour toi croît.

Surprise par cet aveu, Elhéa ne put décrocher son regard du jeune homme. Elle n'arrivait pas à saisir ce qu'elle avait pu faire de bien dans sa vie pour mériter d'être aimée, alors qu'elle exécrait chaque détail en elle.

— Nous devrions profiter de cet instant, l'invita-t-il en lui offrant un doux sourire.

Elle acquiesça d'un hochement de tête tout en essuyant les larmes qui s'échappèrent de ses yeux. Ils ne discutèrent plus des tourments de la jeune fille face à leur relation durant le reste du trajet qui se termina assez rapidement.

Ils arrivèrent dans un lieu assez éloigné de la capitale. Il y avait là des chalets luxueux et des champs de fleurs à perte de vue.

— Que faisons-nous dans ce lieu ? Questionna la jeune fille tandis que Soen l'entrainait à l'intérieur d'un chalet qui donnait l'impression d'avoir fait un saut dans le passé tant que les détails de chaque élément était subtil, luxueux et d'une simplicité qui créait une harmonie étonnante.

— C'est dans cette ville que les produits cosmétiques de l'entreprise de ma famille se fabriquent, il y a des laboratoires à quelques minutes à pied. En ce moment, je prépare le lancement d'une nouvelle gamme produit à base de lotus noir.

— C'est pour cette raison que tu étais tout le temps en déplacement ces derniers jours ?

— En partie, oui.

— Cela n'explique pas ma présence ici. Tu craignais de me laisser seule à nouveau ? Je ne m'ennuie pas quand je suis seule.

— Je voudrais que tu sois le visage de cette nouvelle collection.

— Tu plaisantes ? Je ne peux faire une telle chose Soen.

— Bien sûr que tu le peux, dans le cas contraire, je ne te le demanderai point. J'estime que tu es la personne parfaite pour cette nouvelle collection. Les anciens Romains considéraient la fleur de lotus comme la fleur à utiliser pour les ensevelissements. Les fleurs de lotus blanches et noires sont censées représenter la vie passée, présente et future, la mort et la renaissance. Alors que pour les Chinois, c'est la représentation du bonheur dans un couple et la féminité.

Tu englobes toutes ces choses, lui dit-il en prenant sa main pour l'inviter à s'asseoir dans le salon. Tu ne le vois peut-être pas encore, mais tu commences à renaître. Tu me souris maintenant, tu n'as plus le teint pâle. Ces changements sont, pour moi, signes d'espoir, dit-il en prenant sa main. Elhéa l'écoutait sans prononcer un mot. Il ne se percevait visiblement pas de la manière que cet homme la voyait.

— J'aimerais que tu transmettes ce changement que je vois en toi dans la campagne pour cette nouvelle collection, poursuivit-il. Je ne vois personne d'autre que toi pour cette tâche. À mes yeux, tu es la représentation de la beauté, de la féminité et de la renaissance. Et tu fais mon bonheur depuis le premier jour que je t'ai rencontré.

La jeune fille ne sut que dire face à ce nouvel aveu. Elle avait l'impression que ses pensées étaient complètement embrumées. Il lui avait confessé son amour quelques instants plus tôt. À présent, il lui demandait de représenter la nouvelle collection de la marque la plus florissante du pays et de toute l'Asie. Elle avait peur de faire une erreur en se montrant au monde. Mais, elle avait aussi peur de décevoir Soen. Il avait tant fait pour elle, elle ne s'imaginait pas lui dire non après de telles déclarations.


— Quand est-ce que je commence la séance photo ? Lui demanda-t-elle en esquissant un faible sourire.

— Tu acceptes ?

— Oui, je pense que ce sera un bon moyen de sortir de ma zone de confort, confie-t-elle en dirigeant son regard vers lui.

— Je te promets que tout se passera dans les meilleures conditions, tu n'auras rien à craindre. Je serai près de toi, déclara le jeune homme en saisissant la taille de la jeune fille qui tressaillait de surprise dans ses bras. Sans qu'elle ne s'y attende, il lui murmura un, « je t'aime » avant d'entreprendre de l'embrasser avec passion. Elle ferma les yeux tandis qu'il décida d'approfondir leur baiser, tout en se disant qu'elle n'avait rien à perdre en se donnant à cet homme.

Elle avait plutôt tout à perdre si elle le laissait s'échapper. Personne n'avait pris soin d'elle autant qu'il le faisait. Et même si tout s'effondrait, ce ne serait probablement pas pire que ses expériences du passé.


𝗠𝗜𝗘𝗟 & 𝗙𝗜𝗘𝗟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant