Chapitre 33

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Les jours qui suivirent furent emplis de silence et de solitude pour Elhéa. Elle se retirait dans sa chambre, cherchant refuge dans ses pensées et ses émotions tumultueuses. Elle repassait en boucle les paroles du roi, essayant de trouver des réponses à ses questions sans fin. 

Pendant ce temps, Harim ne pouvait s'empêcher de se tourmenter par l'impact de sa révélation précipitée. Il regrettait profondément de ne pas avoir été à la hauteur de la situation, de ne pas avoir préparé Elhéa à cette nouvelle déconcertante.

Le roi était accablé par une profonde tristesse et par un mélange de colère et de dégoût en apprenant cette vérité macabre. Il se maudissait de ne pas avoir pris conscience plus tôt de la détresse d'Elhéa, de ne pas avoir écouté ses appels silencieux à l'aide. Maintenant, il était confronté à une réalité qu'il ne pouvait plus ignorer.

Le roi réalisait qu'il avait commis une grave erreur en révélant son lien de parenté avec Elhéa de cette manière brutale. Il se sentait coupable de la léser ainsi, mais il savait qu'il devait lui expliquer plus en détail et partager les sombres secrets qu'il avait découverts.

Il prit alors la décision de mettre sous une forme manuscrite ce qu'il voulait partager à la jeune fille. Il n'aurait jamais cru que cette jeune femme qu'il avait tant méprisée, était réellement la sœur qu'il chérissait lorsqu'il était enfant. Il ne s'attendait pas à faire des découvertes si horrifiantes en menant une enquête sur elle.

Ce qui était le plus exacerbant, c'est que la mère de la jeune fille était celle qui avait livré son enfant aux mains des malfaiteurs, telle une brebis muette que l'on conduit à la boucherie. À des hommes qui se réjouissaient de la manière dont ils pouvaient connaître intimement des enfants. Il se demandait comment une femme qui semblait si douce et aimante avait pu commettre une telle trahison.

Il écrivait chaque mot avec précaution, tentant de contenir l'amertume qui étreignait son cœur.

Les heures s'écoulèrent alors que le roi griffonnait des explications détaillées sur les horreurs subies par Elhéa autrefois, la traîtrise de sa mère et les conséquences tragiques de ce passé douloureux. La plume glissait sur le papier, laissant derrière elle le poids d'une révélation presque insoutenable.

 Il voulait que ses paroles soient empreintes de vérité, de regret et de compassion.Après des heures de travail acharné, le roi acheva enfin sa lettre. Il la relut une multitude de fois, cherchant à améliorer chaque phrase, chaque sentiment exprimé. Dans cette missive, il dévoilait les vérités cachées depuis si longtemps, les secrets de leur sang, les douloureuses révélations qui devaient être partagées. Il y avouait sa propre négligence et son manque de compassion envers Elhéa. Sa plume tremblait, les larmes coulaient sur le manuscrit, pensant qu'il purifiait son âme tourmentée.

Lorsque le roi eut terminé, il relut attentivement chaque ligne, se demandant si les mots qu'il avait choisis étaient suffisamment doux pour atténuer la douleur d'Elhéa. Il ne voulait pas qu'elle se sente encore plus abandonnée, encore plus trahie.

 Une fois la lettre finalement scellée, il la fit livrer par le biais de son ami à Elhéa. Les secondes semblèrent des heures alors qu'il attendait avec anxiété sa réaction. Son cœur se serra en imaginant la peine et la confusion qui devaient l'envahir.

— Soen, peux-tu lui lire la lettre, je te prie ?

— C'est ce que je vais faire, répliqua ce dernier en soupirant avec un violent désir de raccrocher. Je t'avais pourtant prévenu Harim, pourquoi ne m'as-tu pas écouté ?

— Je pensais bien faire, je ne m'attendais pas à ce qu'elle soit dans un état si fragile à mon arrivée chez toi.

— Tu m'exaspères, prononça Soen en mettant fin à l'appel. Il espérait que la jeune fille accepterait qu'il lui lise la lettre et que son ami avait bien pris soin d'écrire ce qu'il devait exprimer convenablement.

Avec précaution, Soen toqua à la porte de la chambre de la jeune fille qui s'était enfermée depuis plusieurs jours sans vouloir parler. Elle ne voulait pas parler de sa confrontation avec le roi, mais aussi de ces deux expériences qui la marquèrent indélébilement.

— Tu peux rentrer, prononça la jeune fille d'une voix presque inaudible.

— Je ne suis pas venu te forcer à quitter cette pièce, ne t'inquiète pas. Je suis simplement venu te lire quelque chose que je crois que tu devrais entendre et surtout connaître réellement. Ce ne sera pas simple à entendre, mais tu en as besoin.

Le jeune homme lui présenta la feuille de papier qu'elle prit délicatement entre ses mains, fixant les mots calligraphiés avec crainte et curiosité. Il lui fit savoir qu'il provenait du roi et qu'elle devrait essayer de mettre sa colère de côté un seul instant.

— Tu peux la lire pour moi, s'il te plaît. Prononça-t-elle, le regard vide de joie.

Il acquiesça tout en prenant place auprès de la jeune fille.

Elle écoutait le jeune homme attentivement, laissant les mots pénétrer son esprit et révéler la vérité si longtemps dissimulée. Alors que les phrases s'enchaînaient, les larmes commencèrent à couler sur les joues d'Elhéa.

Chacune des confessions du roi secouait son monde, brisant les fondations sur lesquelles elle avait construit son identité. Elle avait grandi dans l'ignorance de sa véritable histoire, trompée par les mensonges de ceux qui l'avaient élevée.

En écoutant ses mots, Elhéa réalisa que sa mère était une complice des horreurs qu'elle avait endurées. Une colère profonde s'empara d'elle, mais au fond de son cœur, une part de douleur viscérale s'installa.

Au fur et à mesure que Soen lisait, les révélations se succédaient, plongeant Elhéa dans un abîme de noirceur. Les larmes coulaient sur ses joues alors qu'elle apprenait les machinations perfides de sa mère et la tragédie de sa propre histoire.

Elle découvrit des connexions troublantes entre sa mère et un réseau de trafiquants d'enfants, déterminés à exploiter leur innocence à des fins maléfiques.

Elle avait vécu dans l'ignorance de ses origines, sans connaître l'amour ni la chaleur d'une famille. Chaque révélation lui était un coup de poignard, ébranlant les fondations de son existence. Elle se sentait perdue, trahie par celle qui aurait dû la protéger. Elle n'allait jamais connaître la prostitution si seulement elle avait été protégée. . .

Soen laissa Elhéa pleurer, lui donnant le temps de digérer l'ampleur du choc. Il lui offrit son soutien silencieux, brisant le silence oppressant qui avait enveloppé la maison depuis les révélations précipitées.

Pendant ce temps, le roi, tourmenté par la gravité de ses paroles prononcées dans le passé, déambulait dans les couloirs du palais sans pouvoir trouver de repos. Il se sentait prisonnier et piégé dans une toile complexe de secrets et de trahisons. 

La culpabilité le hantait jour et nuit, sans relâche.

Dans l'ombre de leurs pensées tourmentées, le roi et Elhéa étaient liés par leur sang, mais aussi par une profonde douleur. Ils étaient à la croisée des chemins, face à une décision cruciale quant à la direction que prendrait leur relation.

Ils devaient trouver le courage de guérir de leurs blessures et de reconstruire leur lien, ou bien sombrer définitivement dans les abysses des souvenirs douloureux.



𝗠𝗜𝗘𝗟 & 𝗙𝗜𝗘𝗟Where stories live. Discover now