Les gardiens des murs et le passe-muraille

CHAPITRE CINQUIEME (2)

Lorsque Lucy se leva ce matin-là, elle sut que son enquête pour trouver ce mystérieux fantôme allait commencer rapidement.

La nouvelle avait commencé à tourner, et certains esprits, comme Annie ou Mme Sharp, ont déclaré avoir cru apercevoir ce fantôme traversant les murs, mais qu'elles n'avaient pas oser le dire de peur d'être prises pour des folles.

Désormais, Mme Sanders ne pouvait pas renier cette vérité flagrante : un fantôme pouvant traverser les murs rôde dans le Castel, et il faut trouver au plus vite de qui s'agit-il ! Lucy n'avait aucune piste concrète, les témoignages de plusieurs esprits ne servent pas à grand chose. La seule manière de le piéger serait de le revoir une nouvelle fois et de le prendre en flagrant délit. En tout cas, Lucy serait prête à le faire, même si elle ne pouvait pas traverser les murs, elle saurait l'attraper.

En réfléchissant durant la matinée, la jeune femme se dit qu'Edgar savait peut-être quelque chose. C'était un petit garçon très discret qui n'osait jamais parler devant les autres. Seule Lucy acceptait de l'écouter. Peut-être avait-il vu l'inconnue et savait-il plus de choses que les autres...Edgar sait toujours plus de choses que les autres ! Il avait également la capacité de faire des rêves prémonitoires, des rêves lui permettant d'annoncer aux autres membres du Castel un événement à venir. Souvent, les premiers esprits de certains lieux hantés se voyait attribuer ce pouvoir, mais en règle générale, ils en profitaient pour en parler à tous les résidents du lieu, ce qui n'était pas le cas d'Edgar...

Lucy monta les escaliers et frappa contre la porte de la chambre du garçon.

- Edgar ? C'est moi, Lucy. Tu peux ouvrir, s'il te plaît ?

Une longue minute se déroula avant que le garçon n'ouvre la porte. Lucy avait l'habitude qu'il mette beaucoup de temps pour faire certaines choses, il était très lent et malheur à celui qui venait le perturber.

Lucy s'installa sur un siège à côté du miroir de la chambre de l'enfant et se tourna vers celui-ci qui s'était déjà allongé dans son lit.

- Edgar...j'aurais une question à te poser à propos des événements étranges qui ont eu lieu au château récemment.

- Je t'écoute, dit-il calmement.

- Eh bien...tu sais, ce fantôme qui traverse les murs, plusieurs personnes l'ont aperçu, dont moi, mais malheureusement, nous ne savons pas comment s'y prendre pour le retrouver et l'attraper, et comme tu as des capacités de vision, tu pourrais peut-être nous aider.

Edgar ne répondit pas immédiatement.

- Oui.

- S'il te plaît, Edgar, nous avons besoin de toi.

- Oui.

- Tu es notre seule espoir pour coincer cet esprit qui hante le Castel.

- Oui.

Lucy se leva d'un bond en fixant le garçon d'un œil noir.

- Dis-moi ce qu'on doit faire !

Le visage d'Edgar se crispa, et il se mit en position assise tout en observant Lucy du même regard que celle-ci lui faisait.

- Je ne l'ai pas vu.

- Tu mens.

- Je te dis que je ne l'ai pas vu.

- Tu mens !

- Je ne l'ai pas vu !

Sans s'en rendre compte, Edgar s'était levé de son lit et avait crié suffisamment fort pour que Jade et Clarisse jettent un œil dans la chambre.

- Tout va bien ?

- Oui, oui, ne vous inquiétez pas, les filles, fermez cette porte s'il vous...

Soudain, Edgar se mit à trembler avant de s'effondrer sur le sol, inanimé. Lucy se rua vers lui, sa peau devint pâle, comme s'il perdait son âme. «Comme Molosse» pensa Lucy, terrifiée à l'idée que le garçon quitte le Castel pour rejoindre un autre monde que personne ne connaissait.

C'est alors qu'Edgar ouvrit grand les yeux, fixa Lucy de l'air le plus angoissant que la jeune fille ait vu, et cria :

- Le septième jour approche. Dans cinq jours, il viendra, il hantera nos esprits jusqu'à les éteindre. Le Passe-Muraille aura vaincu les Gardiens des Murs et les jours du Castel verront leur fin !

Edgar s'endormit aussitôt terminé sa prédiction terrifiante...

- Comment va-t-il ?

Annie se tenait au chevet du jeune garçon qui ne s'était toujours pas réveillé. Lucy avait accouru dans la chambre après avoir passé près d'une heure à s'en vouloir de l'avoir poussé à bout.

- Il se réveillera, dit-elle à la jeune femme pour la rassurer, son âme a besoin d'un peu de repos.

- De combien de temps ?

Annie se leva doucement et regarda la jeune femme.

- Cinq jours.

- Cinq jours ?!

- Oui, c'est cela, et il serait peu probable qu'il se réveille avant.

- Mais...comment peut-on vaincre cette prophétie qu'il a dit avant de s'endormir s'il ne peut pas nous aider.

- Je suis désolé, Lucy...je ne peut pas le réveiller comme par magie.

Soudain, Lucy vit Edgar ouvrir doucement les yeux avant de la désigner et de murmurer :

- Tu seras notre guide, Lucy. Protège-nous face à l'Empereur...

Il s'endormit une nouvelle fois, mais cette fois-ci, il ne se réveilla pas.

Le soir venait. Lucy rejoignit son lit et tenta de reprendre sa lecture, mais elle n'y arriva pas. Ce qu'il s'était passé durant cette journée l'avait marqué telle une cicatrice. Elle ne pouvait rien faire pour Edgar, et avait parfaitement compris les déclarations macabres du jeune garçon. Avant de s'endormir, elle nota à l'aide d'un crayon noir sept chiffres, du premier jusqu'au septième. Elle cocha le premier, et le deuxième. En-dessous, elle nota la prophétie en lettres capitales :

LE SEPTIEME JOUR APPROCHE. DANS CINQ JOURS, IL VIENDRA, IL HANTERA NOS ESPRITS JUSQU'A LES ETEINDRE. LE PASSE-MURAILLE AURA VAINCU LES GARDIENS DES MURS ET LES JOURS DU CASTEL VERRONT LEUR FIN !

Et, dans le coin, en petites lettres :

protège-nous face à l'empereur

«Protège-nous face à l'Empereur»... Lucy tourna cette phrase de nombreuses fois dans sa tête, sans réussir à en comprendre le sens. Elle resta frustré de cette manière jusqu'à tard le soir, avant que le sommeil l'assomme et la force à s'endormir pendant quelques heures avant d'entamer une enquête qu'elle n'était pas prête d'oublier !