Chapitre 4 : L'ordinaire

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Après lui avoir tout dit, sans jamais entrer dans les détails, ma mère m'avait pris dans ses bras et je savais qu'elle se retenait de pleurer. Elle se sentait désolée de ne pas avoir pu me protéger cette fois-ci, mais elle ne pouvait pas être constamment être à mes côtés pour qu'il ne m'arrive rien.

Le reste de la journée, nous avions tenté de faire comme si de rien n'était, essayant de garder de bons rapports, mais je voyais la douleur dans son regard. Elle ne voulait juste pas que je repense à tout ça, sauf que c'était déjà trop tard. Chaque nuit me rappelait chaque seconde de cette soirée... Ma mère devint alors de plus en plus protectrice, me demandant régulièrement si tout allait bien et à chaque fois que je sortais, elle insistait pour savoir où j'allais, et si ce n'était pas chez Saoirse, elle tenait absolument à m'y conduire, mais j'arrivais, heureusement, toujours à l'en empêcher.

Alors que j'étais sur le point de franchir la porte, elle m'interrompit, posant la main sur la porte et me bloquant ainsi le passage.

— Où est-ce que tu vas ? s'enquit-elle, plus inquiète que jamais. Il est super tard, il fait nuit !

— Je vais au travail, tu le sais bien.

— Attends, je vais prendre ma veste et t'y conduire, me prévint-elle, ne voulant pas me laisser le choix.

— Maman ! S'il te plaît, arrête ça ! la suppliai-je.

Elle enleva sa main de la porte et me regarda d'un air dépité. Mes mots avaient été bien plus forts que d'habitude. La plupart du temps, je trouvais un moyen détourné pour lui faire comprendre que j'étais en sécurité, mais après plusieurs jours ainsi, j'avais un peu perdu patience.

— Ce n'est pas en me suivant continuellement que tu vas éviter que ça se reproduise, poursuivis-je à bout de souffle.

Elle restait muette et j'avais l'impression d'y être allé un peu trop fort. Ne supportant pas de la voir ainsi, je la pris dans mes bras. Soudainement, elle se mit à sangloter, relâchant la pression depuis mes aveux.

— Je suis une mauvaise mère, lâcha-t-elle d'une voix tremblante.

Je la relâchai, la regardant dans les yeux. Avais-je bien entendu ?

— Je t'interdis de dire ça, affirmai-je fermement. Ce n'est pas de ta faute. Que tu sois là ou pas n'aurait rien changé.

— Bien sûr que si, j'aurais pu éviter ça. On se parlait à peine, j'aurais dû remarquer quelque chose. J'aurais dû le sentir.

— Non, ce n'était pas à toi de faire ça... De toute manière, les faits sont les faits et on ne pourra plus rien y changer... Je n'ai pas besoin de ça...

— Mais tu n'en dors plus la nuit, rétorqua-t-elle faiblement.

Elle avait posé une main sur sa poitrine et sa respiration s'était accélérée. Parfois, quand je la voyais dans un tel état, je regrettais de lui en avoir parlé, mais ça aurait pu être pire si j'avais tout gardé pour moi, ce que je faisais bien trop souvent ces derniers temps.

— Parce que la même scène me revient toujours en tête et à chaque fois, j'ai l'impression que c'est vrai... Alors c'est tout à fait normal si je dors à peine. Maintenant, je vais être en retard alors je suis désolé, mais je dois vraiment y aller.

Elle s'écarta d'un pas, à contrecœur, et après un dernier regard coupable de ma part, je quittai l'immeuble. J'avais encore tellement de choses à régler...

*

Après avoir enfilé ma tenue de travail, je croisai Caterina à l'accueil. Nous travaillions dans le même coin de l'hôpital et nous occupions de toutes les visites urgentes tout comme des coups de fil imprévisibles. A priori, gérer l'accueil d'un hôpital n'avait rien de bien compliqué, sauf lorsque les urgences étaient bondées, ce qui arrivait assez fréquemment le soir.

Le Corbeau et la Colombe - Tome 1Where stories live. Discover now