Would you Like to Travel the world, with me ? (en français)

Le grand Départ ...

Je suis assise sur le sol du Terminal Départ de Londres, à tenter de cacher les larmes qui coulent sur mes joues. S'il est si sûr de lui, alors je dois l'être aussi. La distance, et nos vies foncièrement différentes, auront eu la peau de notre couple. Être séparés pendant 6 mois, c'était un pari. Et aujourd'hui, j'ai tout perdu : le pari, l'homme et ma foi en l'amour.

Je me retrouve à l'aéroport avec mes deux valises pleines à craquer et une boîte de mouchoirs, achetée à la douane. Pour venir jusqu'ici : j'ai quitté mon job. J'ai voulu lui faire la surprise de le retrouver chez lui, dans "l'autre pays". Malheureusement, il m'attendait pour m'annoncer que c'est fini entre nous. Julie m'avait prévenu, c'était trop soudain de ma part : j'aurais dû "sécuriser ma vie" avant de tout lâcher, démissionner, rendre mon appartement et laisser derrière moi 24 ans dans la même ville, avec les mêmes ami(e)s et les mêmes repères. Dans ma tête c'est cette routine de 24 ans qui m'a poussée à faire le grand saut, à faire un "truc fou". "Si je le fais pas maintenant, je le fais quand ?" - "Si à 24 ans, je ne décide pas à me lancer et à changer de vie, je le fais quand ?". Apparemment, ce n'était la meilleure de mes idées ...

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L'avion que j'ai réservé à la hâte pour rentrer s'annonce surbooké. Qui va se porter volontaire pour rester quelques heures de plus sur le sol bien frais de l'aéroport, en laissant partir les familles et les hommes d'affaires pressés de rentrer ? C'est moi.
De toute façon, est-ce que j'ai mieux à faire ? A quoi bon me presser ? Je vais retourner en France, aller chez mes parents et les entendre me dire "On t'avait prévenue". 

Dieu, faisons plutôt durer le plaisir sur le sol froid de l'aéroport ! Petit point positif à soulever : j'ai une prise de courant pour mon téléphone. Comment en 2022, on peut encore avoir si peu de prises dans un lieu public ? Qui est l'Homme qui a décidé que, non seulement l'avion serait surbooké, mais qu'on serait tous en train de serrer les fesses pour avoir assez de batterie ? Je lui toucherais bien deux mots à celui-là.

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Est-ce que l'Imbécile qui tape sur la vitre derrière moi peut arrêter, bon sang ?! C'est agaçant, je suis agacée, je suis au bout. C'est inévitable : je repleure, merci l'Imbécile à la casquette plate. Mais qui porte sa casquette avec tant d'aplomb, alors que je ne vois pas de vélo ou de maillot jaune à l'horizon ? J'ai un message pour l'Univers : "Laissez-moi tranquille !". Laissez-moi pleurer contre la vitre de l'aéroport, laissez-moi recommencer une énième partie de Sudoku. Laissez-moi ...

Si je me lève, je perds ma place. Je ne bois pas, je ne mange pas, je ne bouge que mes pouces sur mon téléphone. Pas besoin d'aller aux toilettes, pas besoin de bouger ; mon corps est de toute façon déjà complétement engourdi. On pourrait faire le moulage d'une statue, pour représenter l'aire moderne : "la Femme éclatée sur le sol, avec son téléphone". Dans les musées, on commenterait "son époque était banale, facile. Les Hommes s'accrochaient à cette petite boite qu'ils appelaient : téléphones. Elle devait être triste, probablement engourdie par la vie, par sa vie.". J'en ferais une belle de statue : vie vide, amour incertain, avenir bancal et ambition nulle. Magnifique histoire à la Zola, on pourrait passer des heures à me décrire et m'analyser en surface, sans jamais avoir le moindre soupçon d'action. Et quand on arrivera aux péripéties, on pourra classer le roman dans la section "Amour", puis rapidement le déclasser en "Vie de merde". Dieu, je pleure, encore. Finalement, c'est de mouchoirs que je vais rapidement manquer ...

L'Imbécile tape encore une fois et je lui fais regretter d'être né. J'ai pas de solution de violence, mais à cette heure-ci, je suis défraichie et à fleur de peau. Il me suffira de me retourner et de coller mon visage tout entier contre la vitre : film d'horreur assuré ! Je le vois dans l'écran de mon téléphone, il ricane comme un Imbécile, il porte sa casquette comme un Imbécile, et il fait des grands gestes comme un Imbécile : j'ai absolument pas besoin de ça maintenant.
Qui sont ces gens de l'autre côté de la vitre ? Où vont-ils ? Certainement une autre destination. Peu importe, bon voyage à eux. J'ai l'impression qu'un volcan de pense-bêtes bouillonnent en moi. J'ai tellement de choses à penser, à faire à mon retour. Tellement de choses que je pensais faire ici, en Angleterre, avec Thomas. Je dois retrouver un appart', un boulot, une vie stable. Je dois empêcher les ragots, je dois faire bonne figure, je dois ... ARRÊTER CE MEC QUI TAPE CONTRE CETTE P***** DE VITRE !