Chapitre 4 ~ S'échapper

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Début de magie, trop tôt, trop vite, trop beau ; alors l'enfant est scellé dans le tourment de l'oubli.

Je veux que lorsque je sorte de cette salle de bain tout redevienne comme avant. Je le pense très fort sachant pertinemment que ce serpent peut lire mes pensées, j'espère que le message est clair. Alors je commence à me brosser les dents et me peigne les cheveux qui descendent en une belle cascade. Puis en enlevant mon pyjama j'ose soulever mes cheveux et regarder plus attentivement mon tatouage dans le miroir au-dessus de mon lavabo. Pour une hallucination il est très bien conçu. Cette marque qui, si je ne rêve pas, me suivra toute ma vie, il faut que je commence à l'accepter.

Malgré qu'elle me fasse peur, elle est magnifique avec ses couleurs qui s'accordent à merveille à celles de mes cheveux et de mes yeux. Je n'aime pas les maths mais cette forme géométrique m'inspire tellement de bien être, je me sens apaisée rien qu'en la regardant. Je détourne le regard pour pouvoir m'habiller.

Si à partir de cette fin de journée j'ai toujours ce tatouage, je veux bien commencer à croire tous ce qu'Olly a pu me dire. Sincèrement.

Je n'ai pas beaucoup d'habits le strict minimum pour paraître avoir une hygiène de vie correcte. On va dire que je ne m'attarde pas trop dans les magasins remplis de monde, de bousculades, de cabines d'essayage pleine à craquer et des regards critiques des autres filles du magasin. Jalouse de mon physique alors qu'il n'y a aucune raison pour. Surtout en cette période de soldes. J'ai lu que faire du shopping rendrait plus heureuses les femmes alors pour moi c'est le contraire. Le sur-chauffage des magasins me fait devenir rouge pivoine tellement il y fait chaud. Discrétion 0 - Exubérance 1.

J'ouvre la porte avec appréhension. Olly est partie mais étrangement ce n'est pas du soulagement que je ressens mais une pointe de peine que je chasse vite en regardant l'heure. Huit heures vingt. Je fais mon sac. Aujourd'hui j'ai anglais, la matière que je supporte le plus. Alors Let's go!

En ouvrant la porte je me retrouve face à un amas de neige. Il a neigé cette nuit et dire que dehors il faisait un froid hivernal moi j'avais aussi chaud que lors d'une canicule. Je marche avec difficulté jusqu'au lycée pour me retrouver face à un portail fermé pour cause de neige. Pour une fois que je suis légèrement heureuse d'habiter pas très loin, il faut que la neige vienne tout gâcher.

Et puis ce n'est pas si grave finalement, je décide de me dégourdir les jambes, il faut que je m'isole et que je réfléchisse. Qu'est-ce que je vais faire ? Je ne sais même pas qui je suis à l'échelle des sorciers et si je n'étais qu'une simple erreur de la nature je serais à coup sûre exilée de tous les mondes existants. Je veux bien croire en Olly mais j'ai terriblement peur de ce que mon avenir me réserve. Je rêvais qu'une fois le lycée terminé et toutes les économies que j'avais rassemblées je pourrais m'échapper, partir à l'aventure dans différentes parties du globe terrestre. Mon plus grand souhait jusqu'à présent était de voyager loin de tout. Mais maintenant je veux absolument savoir pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ?

Je n'aurais sûrement pas dû marcher vu mon état déplorable de la veille car de nouveau je sens ma fièvre qui remonte et mon mal de tête qui se manifeste plus fortement que hier. Je tousse et sur la neige trois petites gouttelettes rouges s'incrustent dans la masse immaculée. Choquée je me précipite en direction de ma maison pour consulter mon ordinateur. Mais c'est sans compter une nouvelle vague de vertiges.

Je me sens partir quand une main forte me rattrape le bras alors que l'autre me rattrape à la taille. Une décharge électrique, que si elle avait une couleur serait probablement celle des écailles d'Olly, me traverse entièrement de haut en bas mais plus intensément sur ma nuque. Je sens mon tatouage me brûler. Alors j'essaye de me dégager de cet homme sentant le danger. Quand je sens le souffle régulier de l'inconnu proche de mon tatouage me chuchoter à l'oreille, je fonds comme neige au soleil.

- Alors on tombe encore ?

Cette voix, c'est lui, l'homme au regard insistant, celui de la bibliothèque et à l'égo surdimensionné. Mon corps se calme... étrange. Alors un excés de colère prends possession de moi.

- Lâche-moi et vas-t'en. Je le dis d'un ton sec dénué d'émotions.

- Si je te lâche, tu tombes et si je pars tu vas te dégrader plus vite et tu seras morte d'ici ce soir.

Faisant la sourde oreille alors que ce qu'il me disait toujours positionné au creux de mon cou me donnait de doux frissons de printemps. Je lui réponds toujours sur le même ton pourtant au fond je suis terrorisée.

- Qu'est-ce que ça peut te faire? C'est pas comme si ma mort t'importait

Voyant visiblement que j'ai repris mes moyens il desserre son emprise sur moi. Je n'ai pas remarqué que mon cœur battait la chamade, je parie qu'il fait cet effet là avec toutes les filles. Certaines assez bêtes pour croire qu'elles sont les seules. Ce qui doit expliquer cette énorme confiance qui émane de son être

- C'est simple je veux voir de quoi tu es capable, j'aime les défis, laisse-moi t'escorter jusqu'à chez toi.

Je ne me retourne pas, je ne veux pas avoir la moindre tentation de me noyer dans ses yeux aussi vert que ceux d'Olly. Il faut que j'arrête de le comparer à elle-même si je suis sûre qu'il est dangereux et que son venin est aussi mortel que plaisant. Il peut m'hypnotiser d'un seul regard s'il le veut. Exaspérée je lui lâche aussi catégorique que possible.

- Jamais de la vie, dégage et va faire ton numéro à des filles qui oseront te croire. Et je m'enfuis à nouveau de cet Apollon aux paroles tranchantes. Je l'entends soupirer et dire.

- Tu ne pourras pas me fuir indéfiniment Megan.

Heureusement que je suis de dos sinon il m'aurait vu devenir aussi rose qu'une pêche, l'entendre prononcer ce nom, de sa bouche sonnait comme une douce mélodie à mes oreilles. J'entends un corbeau croasser au loin . D'ailleurs je n'ai pas envie d'entendre davantage sa voix m'ayant déjà déstabilisé à un point inimaginable et le monde extérieur si déprimant. Je sors mes écouteurs de mon sac, les branche à mon téléphone que l'orphelinat m'a payé pour les tenir au courant de ma situation, et lance Imagine Dragons "I'm So Sorry". Le son se répand dans mes tympans comme un antiseptique après une brûlure. La même brûlure qui me suit depuis mon plus jeune âge et dont je ne peux me débarrasser. Je réponds aux nombreux messages de Sophie d'un "ça va" si elle savait tout ce qu'il se passe, elle exploserait de joie, elle qui est une addict aux choses paranormales comme les films d'horreurs. Moi je suis plus soft avec des séries de science-fiction.

Le long du trajet mes forces s'amenuisent, j'arrive presque en rampant jusqu'à chez moi où je n'ai le temps que d'enlever ma chaude doudoune avant de m'effondrer à l'entrée épuisée. Je sens un liquide chaud coulé de mon nez. J'ai l'habitude de saigner du nez en hiver, vu que mon nez est très sensible au froid mais je ne pense pas que c'est la raison de ce saignement soudain.

- Ho mon dieu ! Megan, même si tu me détestes je ne vais pas te laisser mourir. J'aurais dû te dire plus tôt qu'une fois le tatouage apparu tu dois t'entourer de personnes surnaturelles où tu te condamnes à ta perte. Choisir de rester auprès des humains est comme désobéir à Luxa. Je pensais que tu serais rentrée plus tôt je suis vraiment désolée. Je suis nulle comme guide mais je n'ai personne pour m'épauler. Tiens bon !

Je sens et vois Olly s'enrouler autour de ma main avant de plonger dans le noir complet encore une fois.

Lullaby Tome 1 : ÉveilléeWhere stories live. Discover now