Chapitre cinq

139 18 3
                                    

Après avoir fini mon bol de céréales, je pris mes carnets et les rangeai dans une sacoche. J'ouvris la porte de mon balcon le moins bruyamment possible, et la refermai derrière moi.

- Tiens, la revoilà, entendis-je.

Je soupirais, et me tournai.

- Tu vis sur ton balcon ? Dis-je ironiquement.

- Très drôle. Je prends juste l'air.

Mon immeuble ressemblait aux bâtiments de Brooklyn : il y avait un escalier de secours qui se trouvait juste à côté de mon balcon. Le seul problème était qu'il y avait cinquante centimètres de vide entre eux deux. J'escaladai le muret.

- Non, mais t'es sérieuse ? Tu te la joue vraiment à la Tarzan ?

Je l'ignorai et attrapai une barre de l'escalier. Je me hissais sur le muret, et tendis la jambe vers lui. Soudain, ma jambe encore sur le muret glissa, et je manquais de tomber.

- Putain mais qu'est-ce que tu fous ? Je veux pas avoir ta mort sur la... Commença-t-il.

- Ferme la, où tu vas attirer mes GEP ! Criais-je en posai mon pied sur une barre.

- Tes quoi ?

J'entendis une porte coulisser. Et une voix très familière m'appeler.

- Lenny ! Mais qu'est-ce que tu fais ? Reviens tout de suite, ou je te jure que tu seras punie à vie ! S'écria mon père.

J'atteignis enfin l'étage. Je dévalai rapidement les escaliers, puis glissai sur la rampe. Un vent de liberté frotta mon visage. Une fois le dernier étage franchi, je tournai un levier qui fis descendre une échelle jusqu'au sol. Je la descendis rapidement, et sautai pour arriver par terre. Je levai la tête, et mes parents étaient rentrés. Je sortis de la rue étroite où je me trouvais, et, un sourire plaque au visage, je commençai à marcher. Je sortis de la grande rue, et me dirigeai vers le parc.

- Eh, attends !

Je me retournai, et tombai sur ce fameux garçon. Il courait vers moi, et semblait être essoufflé. Je m'arrêtai, levant les yeux au ciel.

- Quoi ? Soufflais-je.

Une fois devant moi, il posa sur main sur ses genoux, respirant fort.

- Pourquoi t'as fait ça ? Dit-il en levant les yeux vers moi.

- Pourquoi ça te regarderait ? Répondis-je en me retournant et en recommençant à marcher.

- Tu veux faire ta mystérieuse, c'est ça ? Je le découvrirais de toute façon.

Il commença à marcher à côté de moi.

- Alors tu t'appelle Lenny ? C'est pas moche.

- J'imagine que tu essaie de faire un compliment, là. C'est plutôt raté.

- Moi c'est Jay. Jay Oslo.

Il me tendit la main. Je la regardai quelques secondes avant de reprendre mon chemin.

- Pourquoi t'es partie comme ça de chez toi ?

- Pourquoi tu me suis ?

Il ne répondit pas tout de suite.

- J'en sais trop rien. Tu m'intrigue, c'est tout.

- Parce que mes parents sont des putains d'ignorants doublés d'enfoirés riches. Ça te va comme réponse ?

Je tournai pour rentrer dans le parc.

- Si ils sont riches, prend leur de l'argent, et barre toi. Dégage de leur vie.

Je soupirais.

- J'ai déjà essayé, et ça n'a fait que les rapprocher de moi. Enfin, rapprocher n'est pas le bon mot. C'est plutôt qu'ils se sont souvenus qu'ils avaient une fille.

- Et t'as fait quoi exactement ?

Je m'arrêtais et me tournais vers lui.

- Arrête de me suivre d'accord ? J'ai pas besoin d'un chien qui me suit partout, dis-je froidement.

Il leva un sourcil, sûrement surpris par ce que je venais de lui dire.

- Pourtant, t'as pas l'air d'avoir d'amis du tout, je me trompe ? Répondit-il avec un rictus.

- Les amis ? Tu sais quel mot est sur la même page ? Antagoniste. Maintenant, fous moi la paix et va draguer une autre fille, s'il te plaît, soufflais-je avant de reprendre mon chemin.

- Et si j'avais envie de te draguer toi ? Entendis-je.

- Tu perdrais alors ton temps.

J'arrivais devant l'étang. Il y avait déjà quelques personnes qui se baladaient près de l'eau, mais il faisait encore trop froid pour que des jeunes se baignent.

- Pourquoi ça ? T'es gay ?

- C'est vrai qu'en te regardant, j'ai quelques pulsions lesbiennes, dis-je, un rictus se formant peu à peu sur mon visage.

- Très subtil, dit-il, me suivant toujours. On va où ?

- Toi, tu vas gentiment rentrer chez toi, ou aller voir tes copains.

- Ça va être compliqué...

J'arrivai devant la colline. Je commençai à la grimper, jetant un regard furtif à mon suiveur.

- Ça ne m'intéresse pas du tout de savoir pourquoi.

- Si tu le demandes, je me suis battu avec un gars, et il se trouve qu'il a retourné tout le monde contre moi, souffla-t-il. Tu peux me dire où on va, ou c'est trop compliqué pour toi ?

Je ne répondis pas et continuai à gravir la pente.

- Et puis, chez moi, c'est pas vraiment la joie. Ça nous fait un point commun, continua-t-il.

Je me tournai vers lui.

- Ne compare pas ma situation au vulgaire divorce de ton gentil papa et de ta mignonne maman, merci.

- Si seulement, Blanche Neige.

- Et, pour l'amour de dieu, arrête de m'appeler comme ça, ou mon pied gauche se retrouvera accidentellement dans ton entrejambe.

- Laisse mon entrejambe tranquille s'il te plaît. L'agressivité ne s'accorde pas avec ta personne.

- Ma personne ? Alors en plus d'être homophobe, t'es sexiste ? Tu baisse de plus en plus de mon estime, sache le, dis-je, atteignant le sommet.

Je me hissais sur le dessus de la colline, et me levai.

- Et toi, tu monte dans mon... Waouh.

Jay se trouvait maintenant à côté de moi, et était ébahi devant la vue qui s'offrait à lui. On ne voyait finalement pas que le parc, mais la ville. Le soleil embellissait le tout, sans pour autant nous éblouir.

- C'est magnifique, souffla-t-il.

- Si tu le dis, dis-je en m'asseyant.

Il fit de même, et se posa en face de moi. Je sentais son regard insistant sur moi, mais continuais à regarder le paysage.

- Pourquoi t'es aussi mystérieuse ?

Je le tournais vers lui.

- La vie m'a forgée ainsi. Moi je suis mystérieuse, et toi, tu es misogyne et mauvais dragueur.

Il rit suite à mes mots. On se tourna tous les deux vers la vue que l'on avait depuis cet endroit.

- T'es différente des autres filles, et ça me plaît.

CondamnéeWo Geschichten leben. Entdecke jetzt