Chapitre vingt-huit

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— Alors tu penses quoi de mes grands-parents pour l'instant ?

Étant donné le petit sourire enfantin de Léo, j'ai envie de lui répondre un truc hyper positif. Pourtant, le premier truc qui me vienne à l'esprit c'est le magnet « Manif pour tous » sur le frigo de ses grands-parents. C'est un des premiers trucs que j'ai remarqué en arrivant chez les grands-parents de Léo, en fin de journée aujourd'hui, en Vendée.

Et pourtant, il y en avait des choses à voir entre la salle de billard et du flipper, la piscine et les voitures de collection. Je ne suis pas habitué à ça dans ma famille ! Faut dire que je connais que très peu la famille de mon père et que celle de ma mère est assez modeste, alors j'ai les yeux qui brillent ici ! Ils ont vite arrêté en voyant le magnet.

Un magnet c'est souvent inoffensif : ceux offerts avec des marques alimentaires ou ceux qu'on te ramène de vacances. Mais là, c'est politique tout de même et ça m'a fait chier de savoir d'emblée que je n'étais pas complétement accepté ici. Parce que, c'est un fait, beaucoup de personnes des « Manif pour Tous » sont en réalité homophobes, et pas contre leurs droits comme ils le manifestent.

Ça m'a d'autant fait chier parce que j'ai passé un très bon repas avec sa famille et j'ai même un très bon feeling avec le grand-père de Léo. Mais, voilà, le magnet, ça m'a fait quelque chose. Alors, je ne sais pas vraiment que répondre à mon copain.

— T'en mets du temps à répondre, fait remarquer le châtain allongé à mes côtés, visiblement déçu.

Ne voulant pas qu'il perde son sourire, je tente de faire preuve de souplesse :

— Franchement, ils sont sympas, surtout ton grand-père. Après, je t'avoue que leur magnet sur le frigo, ça m'a fait bizarre.

— Quel magnet ? m'interroge Léo, visiblement pas du tout au courant.

— Sérieux ? T'avais jamais remarqué qu'il y avait un magnet « Manif pour tous » ?

— Ah, ça, ouais. Tu sais, du côté de ma mère, pas mal y sont allés à ces manifestations.

Et sa réponse est pire parce qu'il sait, mais visiblement il s'en fiche. En plus, il précise que c'est quelque chose de normal dans sa famille de manifester contre les droits des personnes homosexuelles. Je ne sais pas pourquoi il le précise d'ailleurs, c'est d'autant plus énervant, vraiment. C'est ce genre de moments qui me font réaliser à quel point on est différents tous les deux concernant tout ça. J'ai l'impression que c'est plus normal pour lui d'être homophobe, c'est même dans son quotidien.

— T'es fâché ?

Léo m'observe, maintenant silencieux et je ne sais pas réellement comment réagir. Si je suis fâché, ce n'est pas entièrement contre lui car ce n'est pas sa faute si sa famille est comme ça. En revanche, une partie de moi est fâchée de son indifférence, parce que ça, pour le coup, il l'a choisi.

— Pas vraiment.

— Alors pourquoi t'en parles ?

Stupéfait, je fixe mon copain. « Pourquoi j'en parle ? », il en pose des questions ! Ne mâchant pas mes mots, je sors spontanément :

— Pourquoi j'en parle ? J'en parle parce qu'à peine j'arrive que j'ai l'impression que je ne devrais pas être là !

Léo paraît embêté et me fixe un moment avant de lâcher un petit « désolé ». Je ne sais même pas ce que son « désolé » signifie. Cependant, je n'ai pas envie de me prendre la tête, beaucoup trop fatigué de la route, alors je ne commente pas davantage. Un petit malaise s'est toutefois installé entre lui et moi et je n'aime pas ça du tout. Alors, sans un mot, je viens poser ma tête sur le torse de mon copain et l'enlace. Aussitôt, Léo vient caresse mes cheveux et, automatiquement, je me fous du reste. Honnêtement, ce foutu magnet peut aller se faire mettre, ça n'a plus d'importance maintenant. Maintenant que je suis dans les bras de celui que j'aime.

La Prochaine Fois, tome 1✅Where stories live. Discover now