Épilogue

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Le pied tapant au sol, une main en visière et l'autre rabattant mes cheveux en arrière, je souffle. Qu'est-ce que je fous ici en vrai ? Ah si, je sais, j'attends. Patiemment. Bonne blague. Impatiemment oui. J'en ai marre. Et ça ne fait qu'une minute que j'ai les pieds ici.

Mes yeux scrutent l'horloge digital au mur. Bordel, pourquoi le temps n'avance-t-il pas plus vite ? Encore dix putain de minutes avant la délivrance. C'est long dix minutes. Un coup d'oeil en arrière me permet de vérifier que je ne suis pas seul. On est nombreux à taper du pied en espérant désespérément que le temps passe plus vite. Je souris et me retourne. Le tableau est franchement comique.

J'attrape mon téléphone, regarde si j'ai reçu quelque chose. Rien et ça me serre le coeur. Comment peut-on devenir aussi accro à une personne ? A des messages ? Comment peut-on être dépendant à ce point de quelque chose de fictif, virtuel ? 

Je n'en ai aucune putain d'idée mais c'est arrivé. Oh oui, comme une boule de roc en pleine face. Je l'ai mangé dans les dents et comme un abruti, je n'ai pas cherché à m'en cacher : je suis devenu dingue de ce type. Mais merde, elles sont toujours pas passées ces foutues dix minutes ? Ah non, encore huit. Je me mords la lèvre et glisse mes mains dans mes poches. Je vais finir par péter un plomb : j'ai horreur d'attendre. 

Mes doigts se resserrent autour de mon téléphone alors que je me mords la lèvre. C'est ignoble l'attente. Et puis quelle idée d'arriver en avance aussi ? Ça n'allait rien changé ! Quel con. Je grogne dans ma barbe, frotte mon visage de mes deux mains puis les range encore dans mes poches. Je dois avoir l'air d'un fou furieux mais en même temps, j'ai la boule au ventre et je suis en train de devenir fou. L'attente me rend barge. La dame à côté de moi rigole doucement et je lui jette un regard amusé. Elle est calme, douce et le poupon qu'elle tient dans les bras me jette un coup d'œil et tend une main vers moi.

Sans même réaliser, j'approche mon doigt qu'il agrippe en riant. Je pouffe et joue au bras de fer avec lui sous le rire de sa mère. J'ai l'air d'un gamin. Mais c'est ce que je suis de toute façon. Un coup d'oeil à l'horloge : plus que cinq minutes. Mon dieu. Je vais mourir.

Je les laisse tranquille et souris une dernière fois à la maman en m'écartant. J'attrape mon paquet de cloque et en sors une. En cinq minutes j'ai le temps d'en griller une. Et il vaudrait mieux que je le fasse sinon je vais m'énerver. Je n'aime pas attendre. J'allume la cigarette et tire une taffe. Ça change rien. Rien de rien. Je roule des yeux, la fume sans intérêt puis la balance dans un container après l'avoir écrasé. Je soupire à nouveau. Et enfin, les cinq minutes sont passées.

- Allez...

Les portes grises s'ouvrent alors. Mon ventre se tord, mon coeur se serre. Je jette un oeil comme un gamin à la recherche de ses cadeaux de Noël. Et je ne vois rien. Je grogne et renfonce mes mains dans mes poches. L'attente va finir par me rendre fou.

Plusieurs personnes sortent, valise à la main. Enfin. Des groupes d'amis se marrent en se bousculant, des couples se tiennent pas la main et des solitaires soupirent en prenant la direction de la sortie pour la majorité. Mais toujours pas l'objet de mes désirs. Un homme métisse se dirige alors vers la maman. Il s'empresse de la serrer contre elle et ses lèvres se déposent sur le crâne de gosse. Je souris attendri. Je me détourne à nouveau pour jeter un oeil à l'entrée du bâtiment. Peut-être que je l'ai loupé. Je secoue la tête, me déprimant tout seul de cette pensée stupide. En même temps, je suis stressé, pressé. Putain, on met pas quinze ans à sortir d'un train ?!

Je grogne et passe une main dans mes cheveux. Mais il fout quoi merde ? Déjà une trentaine de personnes sont descendus mais toujours pas lui. Le seul qui m'intéresse est à l'intérieur.

Décris-toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant