Chapitre 16

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— Elle a pas encore décidé, dit Clément à Manu ce soir-là.

Il tient son téléphone entre son épaule et son oreille, debout dans sa chambre, rangeant une pile de DVD, pliant un tee-shirt, en jetant un autre sur une pile de linge sale.

— Elle l'a bien pris ? demande Manu.

— Ça va, ça aurait pu être pire. Ça lui a fait un peu un choc, forcément, mais elle était plus boudeuse qu'autre chose.

— C'est normal, c'est une enfant.

— Des fois, je l'oublie. Elle est tellement compréhensive, tellement intelligente, que parfois je me rends plus compte que c'est qu'une enfant de huit ans à qui on demande de bousculer de nouveau sa vie, alors qu'elle a déjà été bien malmenée jusque-là.

— Eh, t'inquiète pas. Une fois qu'elle aura pris sa décision, elle s'y jettera avec toute sa candeur d'enfant. Elle boude peut-être maintenant, mais ça lui passera.

— J'espère. Elle a même pas fini son gratin dauphinois, ce soir, alors que d'habitude elle adore ça.

— Peut-être elle avait juste pas faim.

Clément sourit et s'assoit sur son lit.

— T'es chou.

— De quoi ?

— À essayer de me réconforter. C'est gentil. Ça marche pas trop, mais c'est gentil.

— Au moins tu souris un peu, non ?

— Ouais. Mais... en fait, j'ai peur qu'elle décide d'aller en Normandie. Tu vois, autant y a cinq ans je savais pas comment je pourrais faire pour vivre avec elle, autant aujourd'hui... je sais pas comment je pourrais vivre sans elle.

— Ça n'arrivera pas, si tu veux mon avis. Il y a pas de raison que ce soit pas toi qu'elle choisisse.

— Mais, et si...

— Clément. Arrête de te prendre la tête, ça sert à rien. De toute façon, ça relève pas de toi.

— Je sais. Mais je peux pas m'empêcher de... attends. Je viens d'entendre sa porte grincer. Je te rappelle.

— Ok. Bisous.

Clément pose son téléphone sur le lit à côté de lui. Il entend les petits pas de Sarah sur le carrelage du couloir, puis trois coups discrets frappés à sa porte

— Rentre, l'invite-t-il.

La poignée se baisse, puis le visage de Sarah apparaît dans l'embrasure de la porte, hésitant. Il lui sourit.

— Tu dors pas encore, puce ?

Elle secoue la tête. Il tapote la couverture à côté de lui.

— Allez, viens.

Elle s'avance, refermant derrière elle, et vient s'asseoir à sa gauche. Il pose son bras sur ses épaules et l'attire contre lui.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— J'ai pas envie de déménager.

— Tu veux pas quitter tes copines ?

Elle secoue la tête.

— Et mamie non plus. Je veux pas la laisser toute seule.

— Moi non plus. Mais mamie pense que c'est ce qui sera le mieux pour elle. Et puis, elle sera pas toute seule, il y aura quelqu'un qui viendra l'aider tous les jours, et moi aussi je viendrai souvent. Et toi aussi, tu pourras venir la voir quand tu veux. Enfin, sauf pendant les heures d'école, hein, la taquine-t-il.

La cuisine ne ment jamais [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant