Sous le signe de la panthère

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- Tu m'as obligé à te chercher dans le jardin

Ces simples mots, prononcés d'un ton posé et grave, étaient enrobés d'une menace voilée. C'étaient les premiers qu'il prononçait depuis qu'il l'avait conduit dans son air de détente, et que Lilith avait reçu ordre de s'asseoir à même à terre, sur un cousin, dans une pièce en bois, entourée des nombreux bonzais, dont les fenêtres étaient inexistantes et la vue sur le jardin impresionnante. Ken, assis en face d'elle, lui lança un regard qui voulait dire: " je t'avais prévenu".  Elle se tenait rigide, mains sur ses genoux, espérant pouvoir échapper au regard de feu du yakuza.

Lilith n'avait pas l'habitude de se faire sermoner, à l'école elle était une élève modèle, avec d'excellentes notes, jamais on la concidererait comme une trouble fête. Mais depuis 48 heures, son coté le plus sombre pointait du nez surtout quand elle faisait face à deux yakuzas qui faisaient tout pour compliquer son existence.

Malgré tout, Lilith trouvait les prunelles de linx fascinantes dans leur contrariété. Sa proximité lui donnait des palpitations, elle était convaincue qu'on les entendait à des kilomètres. C'est impossible que cet homme, né sûrement de la cuisse droite de Venus, puisse se balader dans ce monde  sans qu'il soit victime de tentative de viol à chaque coin de rue. Vêtu d'un kimono bleu sombre, qui laissait entrevoir son torse lisse et musclé, elle n'avait aucun mal à imaginer que tout son corps n'était que dureté et vigueur. 

Elle ravala sa salive de peur qu'elle ne coule le long de sa bouche, et respira avec parfait contentement son parfum épicé, qui contenait un soupçon d'air de l'océan. Chaque respiration la rapprochait plus de l'extase. Comment un criminnel pouvait être si aphrodisiaque et lui inspirer les pires craintes?

Une employée arriva suivie de son assistante qui poussait un plateau à roulettes, et elles déposèrent un à un les plats sur la table. A la grande surprise de Lilith, au lieu des baguettes, elle eut droit a une fourchette et un cuillère. Elle les aurait embrassé si cela n'aurait pas été mal perçu.

Mais avant de s'attaquer aux délicieu diner, elle devait fournir une explication valable pour calmer le yakuza.

- J'avais besoin d'être seule, dit-elle d'une voix qui se voulait ferme

Ken se servit tranquillement plusieurs boulettes, du tofu fermenté sous le nez de la jeune fille. Il en mangea en mastiquant consciencieusement. Le ventre de Lilith grogna.

- Ken ne pouvait te rejoindre, pointa le yakuza en détachant les syllabes, comme si il parlait à une attardée. Si tu as un cellulaire c'est pour pouvoir savoir où tu te trouves, à chaque moment du jour 

Il fit une pause comme pour évaluer l'effet que ses paroles produisaient sur elle. Lilith se ratatina davantage, consciente de n'être qu'une brebis sans défense devant le grand méchant loup.

- Tu es notre invitée, Yoko, tu suivras nos règles

Elle dégloutit. C' était dit avec une telle douceur qu'elle aurait préféré qu'il crie mille fois. 

- Je veux parler à mon père, demanda Lilith. Je ferai ce que vous voulez mais je dois lui parler

Son regard était pénétrant. Elle retint sa respiration.

- Je prends ta demande en considération, fit-il, d'un ton moins revêche

Elle n'obtiendrait rien de plus pour l'instant. 

Ken l'encouragea d'un geste à manger. Elle se concentra donc  à remplir son assiette de crevettes tampura et des boules de pulpes. Son estomac jubila. Ken esquissa un sourire au coin;

- Essaie les sobas

Elle suivit son conseil. Comment se pouvait il qu'elle ait vécu jusqu'à là sans avoir goutté ce que le monde offrait de meilleur? Elle ignorait la moitié de ce qui était dans son assiette, mais tout avait des saveurs paradisiaques. La maison comptait 2 chefs de cuisine, 1 la semaine  et un autre qui œuvrait les fin de semaine. Tous les deux composaient des menus selon les goûts des membres de la famille.

Lilith remarqua que l'assiette du boss était à moitié remplie. Il se contentait de boire le thé et picoter dans les boules de takoyaki. Ses yeux bridés suivaient chacun de ses gestes, chaque cuillerée qu'elle prenait, chaque bouchée qu'elle mâchait, comme si il s'attendait qu'elle commette une impair. Elle allait lui montrer! 

C'était plus simple maintenant qu'elle utilisait des vrais ustensils. Elle ne rechigna pas quand la bonne lui servit un thé vert très amer dans une adorable tasse de céramique, ici au japon, ils ne le buvaient sans  sucre.

- Goûte notre spécialité, fit le boss en lui servant, avec une nouvelle baguette, un morceau de viande

Elle aperçut Ken qui semblait surpris puis inquiet. Elle regarda cette boule de chair et tenta de desceller son origine organique. Elle savait que toute question serait la mal venue. 

Lilith ferma les yeux et mâcha consciencieusement ce morceau qui tout compte fait avait bon gout.

- Tu aimes? Questionna le yakuza, d'on ton légèrement circonspect

Elle hocha la tête. 

- Madame Yin servez-lui deux autres ovaires de poule

Lilith recracha tout le contenu sur la table.

Le visage de la bonne montrait l'horreur, celui de Ken la stupéfaction tandis que le boss....elle n'osa le regarder en face. Elle essuya le coin de sa bouche avec la serviette mise sur la table, souhaitant être enterrée dans l'immédiat dix mètres sur terre, dans un cercueil de béton. Jamais de sa vie elle pourrait regarder le boss, subir sa réprobation.

Elle avait failli aux règles élémentaires de bienséance. C'était un faux pas impardonnable.

La bonne se hâta de vider la table, et partit avec. Puis un garde remit une table de bois propre. Quelques secondes plus tard, des nouveaux mets y furent déposés.

Tête baissée, Lilith était consciente du silence lourd qui régnait dans la pièce. Les murs semblaient la juger et la condamner. Non seulement, elle était une étrangère, mais elle était le modèle typique de la parfaite touriste blonde, dont seule une opération à crâne ouvert pourrait ressusciter les molécules mortes. Incapable de supporter davantage cette humiliation, Lilith se leva brusquement, sa serviette glissa par terre;

- Excusez-moi, fit-elle, d'une voix éteinte

- Je ne t'ai pas permis de quitter la table, remarqua le yakuza d'une voix sépulcrale

- Je sais

Elle ne voulait plus jamais le voir. C'était cruel de se payer sa tête. Elle marcha d'un pas rapide vers sa chambre, étonnée qu'il ne l'en empêche pas, croisa quelques serviteurs, qui fixèrent ses pieds nus. Evidemment, elle avait oublié ses pantoufles dans la pièce de repos. 

Lilith s'enferma dans sa chambre jusqu'au souper. Elle prétexta une indigestion pour expliquer son absence.

Tard ce jour là, on frappa a sa porte. 

- Ouvre, fit la voix de Ken

Elle fit la sourde oreille. Il n'insista pas, mais lui envoya un texto: " fais attention à ton doigt cousine, je connais quelqu'un à qui cela plairait de l'ajouter à sa collection ".


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La griffe de la panthère noireWhere stories live. Discover now