Chapitre 27 - À corps perdu

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Jamais réveil ne fut plus doux.

La lumière filtrait à travers les carreaux poussiéreux et laissait deviner une journée radieuse. Lovée dans les bras de son amant, Miracle savourait ce moment. La couchette bien exiguë faisait son affaire. Il aurait été difficile pour deux personnes d'y dormir confortablement, à moins de se trouver aussi imbriqués qu'elle et Lukas.

Lukas... Elle rougit à la pensée des ébats auxquels ils s'étaient livrés au cours de la nuit. Après s'être embrassés et étreints jusqu'à plus soif, ils avaient fini par s'endormir, leurs corps à bout de carburant. Lukas l'avait réveillée quelques heures plus tard et les effusions avaient repris de plus belle. Un peu plus tard, au cœur de la nuit noire, c'est elle qui l'avait tiré du sommeil pour se livrer à des jeux coquins, pendant lesquels ses mains avaient glissé jusqu'à des endroits de l'anatomie masculine qu'elle aurait été choquée d'évoquer quelques jours plus tôt. Elle s'étonna de son appétit pour les relations intimes, elle qui n'avait jamais noué de lien proche avec qui que ce soit. Sans parler de sexe, évidemment.

Mais pour l'heure, elle ne souhaitait que prolonger cet instant de calme. Sentir la respiration calme et régulière de Lukas, dont la poitrine se soulevait contre son dos. Caresser son bras noueux posé sur sa poitrine, serrer sa main contre son sein. Ah, voilà qu'elle recommençait. Du calme, espèce d'obsédée, se rabroua-t-elle. La journée ne faisait que commencer. Certes, la matinée semblait bien entamée, mais le temps leur appartenait, tout comme ils appartenaient l'un à l'autre.  Dans ce cocon d'intimité, personne ne viendrait les...

« Moniyah ! » s'écria-telle de sa voix rocailleuse en se redressant.

Sa réaction soudaine réveilla Lukas, qui posa sa main sur son épaule dénudée.

« Mmmmh ? Qu'est-ce qu'il y a ? Tu vas bien ? » Dans sa confusion, il s'était exprimé dans sa langue natale.

« C'est pas normal, elle rentre toujours au moins pour la nuit. Quelque chose a dû lui arriver. »

Elle s'empressa de se lever et de ramasser ses vêtements éparpillés au sol. Lukas l'arrêta dans ses préparatifs.

« De quoi parles-tu ?

— Moniyah ! rétorqua-t-elle. Il faut aller la chercher.

— Attends, c'est une louve. Elle a certainement besoin de vivre sa vie comme une bête sauvage.

— Mais elle n'est PAS sauvage, protesta-t-elle malgré sa gorge enrouée. C'est mon amie.

— Si tel est le cas, elle reviendra tôt ou tard. »

À force de paroles réconfortantes, Lukas finit par lui faire entendre raison. Miracle lui décrivit comment la louve avait pris ses distances, ces derniers temps. Comment elle sortait de plus en plus longtemps et rentrait le pelage maculé de taches de boue, parfois de sang. Ces arguments confortèrent l'opinion de Lukas, selon lequel il fallait donner de l'espace et du temps à la louve pour se découvrir, renouer avec ses instincts naturels. Si son lien avec Miracle était aussi fort que le prétendait la jeune fille, elle se souviendrait. Et elle reviendrait.

Miracle acheva de se laisser convaincre quand il lui offrit ses bras pour qu'elle s'y blottisse et apaise ses tourments. Mais elle dut se fâcher et lui mettre une petite claque sur le bras quand les mains du garçon commencèrent à s'aventurer avec un un peu trop d'insistance sur des zones plus propices à une autre sorte de réconfort. L'inquiétude gâchait le désir. Elle se défit de son étreinte et alla se poster à la fenêtre.

Son ardeur douchée, Lukas s'habilla et sortit chercher du bois et inspecter les alentours. Certainement dans l'espoir de regagner les faveurs de sa conquête. Toutefois, les nouvelles qu'il rapporta ne suffirent pas à décrisper Miracle. Aucune trace dans la neige autour du chalet. Il avait bien étendu son périmètre de recherche à l'orée du bois, mais sans succès. Pourtant, il répéta à sa dulcinée que son anxiété était exagérée et prématurée. Cela ne contribua guère à adoucir la disposition de la métisse à son égard. Les arrêts de jeu, les prolongations, les troisième et quatrième mi-temps pouvaient bien attendre. En ce qui concernait Miracle, la chose était limpide, il ne mettrait plus la main sur elle tant que Moniyah ne serait pas de retour au chaud dans la cabane. Quoique la perspective de renouveler ses ébats sous le regard perçant de la louve ne lui inspirât guère d'enthousiasme.

Babylon - Les Mondes de MiracleWhere stories live. Discover now