La tueuse

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Elle était belle comme tout
Mignonne, sage et polie
Elle était gentille surtout,
Appliquée, silencieuse et érudit

C'était la fille devant qui l'on passe
Sans la remarquer, sans la voir,
Cachée au fond de la classe,
Qu'on bousculait sans le vouloir

Elle était souriante et soucieuse
Un peu perdue, un peu rêveuse
Toujours en tête à tête avec ses livres
Elle lisait jusqu'à s'en rendre ivre

La solitude pesait sur ses épaules
Mais elle souriait, tenait son rôle
Elle la fille chouette, elle la fille drôle
Elle qui pourtant ployait comme un saule

Peut-être que l'histoire aurait pu avoir une autre fin
Si seulement quelqu'un lui avait tendu la main
Si quelqu'un avait prêté attention
À son simple besoin d'affection

Si on avait su voir derrière les masques et les sourires
Si on avait su, qu'elle savait si bien mentir
Peut-être l'aurait-on surveillée,
Comme l'eau endormie qui d'un coup peu s'éveiller

Elle n'était pas si sage
Cette fille calme et réfléchie
Elle était un tigre en cage
Rêvant d'une liberté infini

Alors elle a bien préparé son évasion
Caché derrière sa politesse, sa perfection
Perdu dans sa folie, elle planifiait
La mort de son geôlier

Dans l'ombre de sa sympathie,
Elle s'arrangea et réfléchit
Dans un coin de son esprit,
Le meurtre parfait prenait vie

Le corps devait être introuvable
Personne ne devait la surprendre
Son regard insondable
Et toute preuve partit en cendre

Elle avait déjà choisi sa victime
Elle rôdait, attendant l'heure du crime
Un assassina orchestré
Le clou d'un spectacle bien monté

Elle guettait sa cible comme sa proie
Pourquoi ici, pourquoi comme ça ?
Peut-être par revanche ou par hasard
Peut-être par rage, ou par désespoir

Elle rêvait de sang et de violence
Elle préparait tout en silence
Et nous dans notre ignorance
Continuions nos vies sans importance

L'arme du crime était bien là,
Cachée dans sa salle de bain
Et un soir, après un long débat
Elle se décida enfin

Une haine aveuglante
Une lame assassine
Une haine brûlante
Le sang qui fascine

Les mains tremblantes, le souffle court
Elle avait tué, ce soir là après les cours
Et personne n'en sut jamais rien
Jusqu'au lendemain matin

On ne la revit pas,
Au fond de la classe, ce matin là
Un professeur bouleversé nous apprit
Qu'elle avait prit une vie

Nous écoutions, silencieux
Incapables de réaliser
Personne n'avait su lire dans ses yeux
Ce mal qui la rongeait

Comment s'appelait-elle déjà ?
Impossible de se souvenir
Comme un fantôme qui s'en va
Seulement pour mieux revenir

Elle était gentille et sans histoires,
Tant et si bien que personne ne vit ses idées noires
Elle avait quinze ans, une lame de rasoir,
Et elle c'était tuée, seule dans sa baignoire.

Feuille BlancheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant