Chapitre 8 : sous les trombes d'eau

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 Tous les documents signés, le groupe était à présent certain que le Hall allait prendre en charge leur loyer. Vu que la demande précisait tout de même qu'ils devaient s'y rendre au plus vite et qu'ils avaient de toute façon toutes leurs affaires sur eux au cas où ils auraient trouvé une mission qui leur demandait de partir dans l'instant, ils ne perdirent pas une seconde et se dirigèrent vers la place des téléporteurs.

Heureusement, si le voyage à pied vers Edorif était long à cause de la chaîne d'Hara qu'il fallait contourner, la ville n'était pas si éloignée que ça de Léfarène à vol d'oiseau. De ce fait, les titres de transports qui permettaient d'activer les portails étaient à un prix abordable.

— J'en ai marre d'être pauvre, souffla Syara en se rendant compte que même cette petite dépense avait fait un trou dans son budget.

— Tu crois qu'on pourrai demander à toucher une part d'héritage vu que notre mère adorée a rendu l'âme ? J'aurai bien fait la même proposition du côté de mon père, mais on a comme qui dirait réduit son manoir en un tas de gravats.

— Je n'en suis pas certaine, mais je pense que le fait d'avoir commis un matricide nous a immédiatement rayées de son testament.

— Dommage... Elle ne semblait pas avoir de problème d'argent elle.

— Même si elle se faisait discrète, c'était en effet l'une des plus grosses fortunes du monde, répondit Guard. Mais bon, vu qu'elle avait endoctriné toutes les personnes de l'île et que nous n'y sommes pas les bienvenus, si vous retournez là-bas pour réclamer une part de l'héritage, il est possible qu'on vous reçoive avec des armes à la main.

— Chouette, on y retourne quand ? Sourit la demie-dragonne.

— Tu es irrécupérable, souffla sa sœur.

— Je sais, répondit-elle avec fierté comme si elle venait de recevoir le plus beau des compliments.

Une fois le portail traversé, il ne leur fallut que quelques secondes pour atteindre leur destination. Si les deux villes étaient proches géographiquement, la chaîne de montagne faisait que le temps était bien différent. Là où ils avaient quitté une Léfarène nuageuse qui, pour eux, était synonyme de beau temps, Edorif se trouvait elle sous la pluie battante d'un orage qui grondait au-dessus d'eux et s'étendait jusqu'à l'horizon quelle que soit la direction qu'ils regardaient.

— Manquait plus que ça...

— Allons nous mettre à l'abri !

Avec des températures qui pouvaient être considérées comme estivales, aucun d'eux n'avait prévu de vêtements chauds ou protecteurs. En voyant Phi grelotter, Syara se dit immédiatement qu'il était dommage qu'elle n'ait rien pris. Avec un simple manteau léger doté d'une poche intérieure, elle aurait pu la mettre à l'abri, mais là, avec ses affaires dans une bourse dimensionnelle, elle ne pouvait pas... à moins que.

— Phi, je ne peux pas t'abriter, mais Guard a un sac normal sur le dos. Transforme-toi et va t'abriter dedans.

— Non, ça va aller.

— Tu vas attraper froid si tu...

— Si tout le monde se retrouve trempé, je ne vois pas pourquoi j'aurai le droit à un traitement de faveur, répondit-elle avec conviction.

Un raisonnement un peu simpliste, mais qui montrait avant tout que la jeune fée continuait à s'affirmer et ne voulait pas qu'on la protège à l'excès. Face à ça, la beast ne pouvait rien dire de plus et lui sourire.

— Et si tu créais un dôme protecteur ? Proposa Rael. On serait à l'abri.

— On va surtout se faire remarquer. La lumière qui émane de ses sorts ne passe pas inaperçu, commenta Guard.

— Et alors ? On n'est pas en mission d'infiltration, répondit Elyazra. On s'en fiche de se faire remarquer. En tout cas, entre me faire remarquer et rester comme ça, mon choix est vite fait !

Vu que tout le monde semblait s'être rallié à la demie-dragonne, Phi les engloba dans un dôme protecteur sur lequel la pluie se fracassa. Avec le ruissellement qui s'écoulait dessus, il était compliqué de discerner ce qu'il y avait à l'extérieur, mais au moins, ils étaient au sec.

— Petite nature, piqua Syara à l'intention d'Elyazra.

— Tu devrais plutôt me remercier d'avoir insisté. Grâce à ça, il ne va pas y avoir d'odeur de chien mouillé qui va nous suivre.

— C'est à moi que tu fais référence là ?

— Tu t'es sentie visée ?

— Au moins moi je ne sens pas constamment le lézard desséché !

— Les filles, se désola le satyre. Ça ne va pas recommencer.

— Mais quoi ? On a plus le droit d'exprimer à notre manière notre amour sororal ?

— Vous donnez un bien piètre exemple de ce qu'est un amour sororal à Phi.

— Ne t'en fais pas, je sais qu'elles aiment bien se chercher comme ça, répondit la jeune fée.

— Elle grandit si vite, s'émut Elyazra en feignant d'essuyer une larme.

— Et si nous cherchions plutôt la taverne, proposa Rael.

— Bonne idée, il commence à faire soif !

— Pas pour boire, mais parce qu'on nous a donné rendez-vous dans l'une d'elles !

— Et alors ? On peut très bien allier travail et plaisir, non ?

— Au secours, j'en ai marre d'elle, souffla Syara en levant les yeux au ciel.

En plus de la protection offerte par Phi, Elyazra y ajouta une fonction chauffante. De petites flammes noires se baladaient dans l'habitacle et réchauffaient l'intérieur. Chacune avait une trajectoire indépendante et qui semblait aléatoire, mais jamais elles ne s'approchaient au point de toucher l'un des membres de l'équipe.

Un tel confort était plus qu'apprécié de tous et, finalement, avec la pluie battante qui avait chassé un grand nombre de personnes des rues, ils ne se faisaient pas si remarquer que ça. Heureusement, pensa Syara. Vu que la visibilité était presque nulle, ils ne voyaient que très vaguement où ils se rendaient et auraient très bien pu heurter quelqu'un sans qu'ils ne s'en rendent compte.

Pendant ce trajet, le groupe se mit à imaginer comment ils pouvaient améliorer leur système pour y voir plus clair. Ils se dirent qu'un système de baguette qui passerait sur le dôme et enlèverait le surplus d'eau serait une bonne idée. Il ne restait plus qu'à Phi à voir comment elle pouvait intégrer une telle chose à sa protection. Elle ne pouvait pas faire d'essai à cet instant sous peine de voir toute la protection disparaître, mais promit de travailler dessus dès qu'elle en aurait l'occasion.  

Le violon de cristal : l'autre mondeWhere stories live. Discover now