Chapitre 21 - Sauvetage en mer

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Dès le départ de Claire, Luce avait senti un courant d'air parcourir son dos. Il ne s'agissait nullement du vent qui s'était levé. C'était plus une sorte de pressentiment. Venait-elle de perdre sa meilleure amie ? Avait-elle été bouffée par son ego ? A cent pour cent !

La canne à la main, la jeune femme s'engagea sur le sable. Elle avait peiné à retrouver le chemin étroit menant à la plage. Mais désormais, elle savait qu'elle était au bon endroit. Les bourrasques qui firent voler ses cheveux, le cri d'une mouette au loin, le son des vagues déchaînées, tout lui confirma qu'elle était arrivée à destination.

En temps normal, elle aurait trouvé cela magnifique, apaisant, remarquable. Pourtant, en ce moment, ça ne faisait qu'augmenter son sentiment de solitude. Le sable dans lequel ses pieds s'enfonçaient, les éclaboussures d'eau, la fraîcheur de l'air, tout semblait se retourner contre elle.

Tout en réprimant un sanglot, Luce continua sa route. Elle était fatiguée. Ses jambes semblaient sur le point de rompre. Malgré cela, la jeune femme se força à avancer et lorsqu'enfin ses pieds rentrèrent en contact avec la mer, une pensée interdite la traversa.

— Oh mon Dieu Jacques !

Cette voix, inconnue, lui apparut comme un mirage. Est-ce que quelqu'un se trouvait vraiment sur la plage ou était-ce son imagination ?

La froideur de l'eau fit frissonner Luce.

La dernière fois qu'elle s'était mouillée dans une étendue d'eau semblable à celle-ci, c'était en compagnie de Claire. Mais la dernière fois qu'elle avait nagé dans la mer, cela remontait à de nombreuses années. Elle n'était qu'une adolescente. Une adolescente qui se plaignait du couple que formaient ses parents. Une adolescente qui répétait sans cesse que sa vie était un cauchemar.

Une adolescente qui pouvait encore observer ces vagues s'écraser à ses pieds. Les couleurs, les matières, la lumière, la brillance, ses yeux y avaient encore accès. Une adolescente qui n'avait pas su apprécier la vie à sa juste valeur et qui rendait la Luce de maintenant jalouse.

— Idiote, murmura-t-elle.

Pourquoi fallait-il toujours attendre que l'on nous arrache quelque chose pour nous rendre compte que nous comptions à cette chose justement ? Pourquoi fallait-il que l'humain soit à ce point bête ? Luce était-elle une exception ? Elle n'arrivait plus à réfléchir désormais.

Avec une amertume qu'elle connaissait bien, elle sentit une larme couler sur sa joue. La jeune femme se détestait. Tous les mots blessants qu'elle avait dit à Claire tournaient en boucle dans son esprit. Depuis quand avait-elle abandonné son rôle de meilleure amie ?

L'eau froide monta jusqu'à ses mollets. Peu stable, elle fit deux nouveaux pas. Désormais, Luce avait l'impression d'avancer dans une mer inconnue. Tout ce qui l'entourait et jouait avec ses sens, devenait étrange. C'était comme si elle se retrouvait dans une bulle. Une bulle qui lui criait d'avancer, encore et encore.

— Mademoiselle ! Oh non !

A nouveau cette voix. Après la surprise, c'était la panique qui avait envahi ce ton un brin fatigué.

Ce fut le moment que choisit Ange pour arriver sur la plage, son portable éclairant plus ou moins le sol afin de ne pas chuter. Un couple de retraités lui tournait le dos. Et bien vite, il se rendit compte qu'ils regardaient avec effroi une jeune femme aveugle qui avait abandonné sa canne pour s'enfoncer dans la mer agitée et éclairée uniquement par le reflet de la lune.

— Luce ! hurla-t-il en passant à côté des personnes âgées.

— Vous la connaissez ? demanda le papy.

Baisers salés (Terminée)Where stories live. Discover now