Baisers salés (Terminée)

Chapitre 52 - La fille qui vole désormais de ses propres ailes

A des centaines de kilomètres de ceux qui avaient souhaité fêter leurs retrouvailles post-vacances, se trouvait une jeune femme qui avait autrefois été perdue. Une femme qui avait dû quitter son copain malsain, son appartement miteux et sa famille croyante qui avait vu son orientation sexuelle comme un péché impardonnable.

— Il ne fait vraiment pas beau aujourd'hui, souffla la voix de Thierry.

Angèle tourna la tête vers son collègue de boulot et haussa les épaules.

— J'aime bien la pluie, moi.

Elle faisait partie de celles qui voyaient la pluie comme un élément de romance. Tourner en rond en criant, avant d'embrasser la personne partageant sa vie, tout cela paraissait si beau lorsque son esprit l'imaginait.

— Dans ce cas, laisse-moi te dire que t'es vraiment étrange comme femme.

Elle n'aurait su dire pourquoi mais la réplique de Thierry la fit sourire. Autrefois, certainement aurait-elle pris cette remarque comme une insulte vis-à-vis de sa personnalité ou bien son orientation sexuelle. Mais désormais qu'elle était en paix avec elle-même, ça ne faisait plus que la faire sourire.

— Tu peux aller prendre ta pause, de toute façon, il n'y a pas grand monde aujourd'hui. Et si ce temps reste aussi merdique, on n'est pas prêt de voir la foule pousser les portes du restaurant, soupira Valérie.

Elle était la patronne du petit restaurant dans lequel Angèle avait fini par trouver du boulot. Cela lui avait permis de ne pas rester trop longtemps dans le foyer pour femmes.

— Allez, va retrouver ta chérie.

— Val, tu sais très bien qu'elle n'est pas ma...

Angèle ne termina pas la phrase, son sourire étant trop grand. Cela faisait plus d'un mois qu'elle bossait pour Valérie et elle pouvait s'avancer sans grandes craintes en disant qu'elle était comme une deuxième maman. Cette dernière lui avait même proposé de lui apprendre quelques bricoles en cuisine.

— J'y vais, l'informa Angèle avant d'aller ranger ses affaires de boulot.

Lorsqu'elle sortit dans la petite ruelle, les grosses gouttes de pluie qui lui tombèrent sur la tête l'obligèrent à fermer les yeux. Angèle huma l'air et sentit ses poumons se remplir.

Trempée, de la tête aux pieds, au milieu de la rue, les yeux fermés, elle se sentait libre. Elle se sentait femme. Elle se sentait vivante. Et ce fut dans cet état d'esprit que la jeune femme se mit à marcher.

Angèle n'avait pas envie de faire barrière avec une capuche. Elle aimait cette pluie, qui lui donnerait certainement la crève le lendemain. Pluie qui l'amena à pousser la porte d'un petit magasin de bijoux. Là, elle se stoppa et observa la femme qui se tenait à quelques mètres d'elle.

— Bonjour, bienvenu chez Eve jo...

Ladite Eve se stoppa en reconnaissant Angèle.

— Voici ma cliente préférée, sourit la blonde avant de quitter son comptoir de caisse.

Angèle regarda la vendeuse avancer vers elle. Tout dans sa démarche, dans son regard, dans son sourire, tout avait un air félin. Un air félin qui hantait les nuits de la jeune femme.

— Alors, quel est l'objet de ta convoitise pour aujourd'hui ?

Angèle en avait parlé avec Valérie et d'après cette dernière, c'était évident qu'Eve avait compris ce qu'il se passait. Mais à ce jour, la jolie vendeuse n'avait toujours fait comprendre à Angèle qu'elle partageait son avis.