Chapitre 49

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Sagitta, Douzième Royaume, Palais de Valyar...

Les coursives du Palais étaient silencieuses. Les servants chuchotaient à voix basse, se taisant dès qu'apparaissait un Seyr ou un Seyhid.

Une atmosphère morose régnait depuis quelques jours. Les rumeurs les plus extravagantes circulaient depuis la fin du bal organisé pour les vingt-deux ans de la Durckma. Une chose était sûre : personne ne l'avait revue depuis...

Si Damien fulminait d'être tenu à l'écart des réunions de l'Assemblée, il était en revanche très heureux de la mystérieuse disparition de Satia. Qu'elle soit réellement partie en mission comme semblaient le penser certains, ou qu'elle ait été enlevée par Dvorking lui-même, son absence servait parfaitement ses plans. En glissant de discrets sous-entendus aux Seyhids lors des fréquentes soirées qu'il organisait, il étalait sa capacité à diriger une Fédération abandonnée par ses dirigeants : entre un Souverain mourant et une Durckma ne donnant aucun signe de vie, il ne restait que lui pour sauver ce qui pouvait encore l'être. Encore quelques jours et il pourrait directement lancer l'idée que Satia était une traitresse ayant vendu la Fédération à Dvorking.

Oui, d'ici peu, il serait le maître des douze planètes. Il restait cependant encore quelques obstacles sur le chemin menant au sommet du pouvoir, et le plus important restait son père. Le vieil homme s'accrochait à la vie plus qu'il n'aurait dû ! Il aurait déjà dû être mort. La Grande Prêtresse d'Eraïm passait beaucoup de temps avec lui, arrivait-elle à limiter les effets du poison ? Peut-être devrait-il demander l'autorisation de l'éliminer ? Pouvait-il prendre une telle initiative sans risques ?

Damien craignait celui avec qui il avait passé un pacte ; surtout après avoir vu de ses propres yeux que toute désobéissance se soldait par la mort.

Les Djicams n'étaient pas encore très réceptifs à ses propositions, et l'échéance approchait. Il devait rapidement les mettre au pas, pour apparaître comme le sauveur de la Fédération toute entière.

*****

Domaris épongea délicatement le front de son époux. Contrairement aux premières prévisions, son état ne s'améliorait pas. Il était rongé par un mal devant lequel les plus grands guérisseurs de la Fédération s'avéraient impuissants. La fièvre ne le quittait plus, et ses moments de lucidité étaient de plus en plus rares.

Et Satia qui avait disparu au pire moment possible. Que lui était-il arrivé ? Avait-elle fui ses responsabilités de Durckma par peur des armées de Dvorking, comme la rumeur le prétendait ? Avait-elle été enlevée ? Alors pourquoi aucune demande de rançon n'était parvenue au Palais ?

Elle était sûre que le Djicam de Massilia lui cachait quelque chose. Que manigançait-il dans son dos ? En l'absence du Souverain et de la Durckma, son ancienneté lui donnait l'ascendant sur les autres Djicams. Oserait-il renverser Dionéris ?

Non, c'était absurde. Ivan avait toujours été un bon ami. Il était loyal, comme tous les Massiliens. Mais quand même...

Et s'il avait tout prévu depuis le début ? Si son but était bien de prendre le pouvoir ? Ivan était un stratège, elle ne l'oubliait pas. Il était l'une des dernières personnes à avoir vu Satia en vie ; de plus, il lui répétait sans arrêt de ne pas s'inquiéter pour elle.

La logique lui soufflait qu'il n'était pas innocent dans cette affaire. Comment pourrait-elle le confondre ?

La porte s'ouvrit, et Damien pénétra dans la chambre, la tirant de ses réflexions. Son fils était si admirable ! Si prévenant envers son père, toujours présent.

–Mère, fit-il en l'embrassant. Comment va-t-il ?

–Toujours pareil, soupira Domaris. Chaque jour moins bien que le précédent.

Les Douze RoyaumesWhere stories live. Discover now