Chapitre 51

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Mayar, Dixième Royaume, Temple d'Eraïm.

Itzal rejoignit le Messager Aioros à l'extérieur du Temple. Le soleil se levait à peine, et pourtant les Prêtres et Prêtresses d'Eraïm s'activaient déjà, donnant au complexe l'aspect d'une ruche bourdonnante. Sous leur direction, les Disciples ôtaient des vases les fleurs fanées ou balayaient les parquets. D'autres battaient les lourds tapis pour en extraire la poussière.

–Prêt à commencer l'entrainement ?

Itzal opina du chef, frissonnant à la pensée des courbatures qui s'annonçaient.

–Je ne sais pas ce que tu avais l'habitude de pratiquer avec Lucas, poursuivit le Messager, mais nous allons nous intéresser à un aspect plus précis de ta personne.

Cette fois-ci, Aioros en était sûr, il avait attisé la curiosité de l'Envoyé. Il eut un sourire.

–Si j'en crois ce que j'ai vu, tu possèdes le Don du Wild. Est-ce que Lucas t'a expliqué en quoi ça consistait ?

–Il ne m'a pas dit que j'avais un « Don » balbutia Itzal, pris au dépourvu. Il m'a seulement ordonné de ne parler de Roïk à personne.

–Sage décision, approuva Aioros. Le Don est rare, et pouvoir être lié à plus d'un animal est une qualité précieuse pour rester en vie. Mais, car il y en a un, les personnes possédant le Don sont aussi fortement courtisées. Et souvent, il reste préférable d'éliminer un adversaire qui risque de devenir trop puissant, notamment s'il ne désire pas être un allié.

–Je n'y avais pas pensé, admit le jeune homme. Quel rapport avec l'entrainement d'aujourd'hui ?

–J'y viens. Ta force réside dans tes Compagnons. C'est la faiblesse des Mecers, que les esprits soient liés jusque dans la mort. Quand tu possèdes le Don, et plusieurs Compagnons, tu survis au décès de l'un d'entre eux. Bien sûr, leur perte t'occasionnera une douleur plus grande que tout ce que tu pourrais imaginer, mais tes liens avec les survivants t'empêcheront de basculer dans la folie et de mourir à ton tour, comme c'est le cas de Lucas.

–Donc, avec seulement Roïk pour Compagnon, je suis vulnérable ?

–Tu l'es autant que n'importe quel Mecer, tempéra Aioros. N'oublie pas que cette faiblesse fait aussi notre force. Deux existences liées et entièrement dévouées l'une à l'autre, qui survivent bien souvent là où seuls ils seraient morts. Nous puisons aussi dans les qualités de nos Compagnons pour nous les approprier. D'où l'intérêt pour toi qui a le Don de te lier avec différentes créatures, pour acquérir un large éventail de capacités.

–Pourtant, Lucas m'a dit que c'était le Compagnon qui choisissait, non le Mecer.

–Il n'a pas tort. Sauf que le Don modifie la donne. Tu attireras les animaux comme la lumière attire les papillons.

–Que dois-je faire, alors ?

–Trouve-toi un deuxième Compagnon.

–C'est tout ? s'étonna Itzal. Ça va être rapide, alors.

–Non, je ne le pense pas, rétorqua Aioros avec un sourire.

*****

Pensif, Itzal se demanda pour la centième fois ce qu'il faisait ici. Ne sachant trop par où commencer, le Messager Aioros lui avait conseillé la forêt toute proche comme premier territoire de recherches.

Les arbres y étaient différents de ceux qu'il connaissait. Il n'y en avait que très peu sur le Cinquième Royaume M-555 où il avait grandi, et lorsqu'il avait suivi les Faucons Noirs sur Sagitta, il n'avait connu que la forêt de Farion, composée comme la majorité des forêts tempérées d'arbres à feuilles caduques tels que les chênes, hêtres ou frênes. Ses connaissances sur le sujet se limitaient donc à ses acquis théoriques de l'école, et il aurait été bien en peine aujourd'hui de différencier un sapin d'un mélèze.

Les Douze RoyaumesWhere stories live. Discover now