Chapitre V

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V.

     Je crois bien que je n’avais jamais autant baillé de ma vie que ce jour là. Après l’étrange phénomène ayant eu lieu dans ma chambre la veille, et l’affreuse sensation que quelque chose en était la cause, j’avais eu beaucoup de mal à m’endormir. Je m’étais donc levée, horrifiée à la vue de mes cernes et attristée en me rendant compte que je ne profiterais pas vraiment de mon jour férié. C’était vendredi 11 novembre, fête de l’armistice de 1918. Je n’avais pas cours et allais en profiter pour me rendre à la bibliothèque en compagnie de Wendy afin que l’on travaille sur notre article. Après une douche rapide et un repas relevant de la même précipitation, je m’étais vaguement préparée et avais pris aussitôt la route pour la mairie, où se trouvait la médiathèque.

     -Spencer ! s’écria Wendy lorsqu’elle me rejoignit. Ca va ?

     -Salut Wendy ! lui répondis-je avec un sourire. A quelle heure est-ce que tu prends ton train ?

     -A 17h, on a intérêt à vite se mettre au travail ! dit-elle avec un sourire qui faisait ressortir ses fossettes.

     Nous nous dirigions donc vers la rangée des magazines d’actualité qui se trouvait au fond de la pièce. La bibliothèque était un très vaste espace, plutôt moderne, qui avait été établi sous les combles du bâtiment, tandis que les autres services de la médiathèque se trouvaient aux étages inférieurs. Les murs étaient peints d’un vert olive très apaisant et plusieurs paravents organisaient cet espace en plusieurs zones selon leur fonction. On trouvait un espace lecture où se situaient plusieurs canapés bien confortables, un second où on trouvait les ouvrages scolaires, et puis d’autres encore avec les rayonnages de bandes-dessinées, d’œuvres classiques, de mangas… et enfin l’espace ordinateur où se trouvait également tous les magazines possibles et imaginables.

     -Regardons par là, on trouvera bien un sujet d’actualité intéressant, dit Wendy tout en pointant du doigt les journaux quotidiens. Et sinon, quoi de nouveau depuis hier ?

     -J’ai appelé Austin hier soir, répondis-je dans ma barbe, honteuse de l’avoir fait.

     Wendy ne répondis pas. Elle avait la bouche ouverte mais aucune parole n’en sortait. Elle me toisait de ses grands yeux gris, souhaitant sans doute me sermonner en utilisant ces derniers puisqu’aucun mot ne sortait de sa bouche. Evasive, je pris un quotidien au hasard et feuilletait les pages à la recherche d’une idée.

     -Je voulais lui poser des questions pour lui choisir un cadeau mais au lieu de ça il a joué le mentaliste et s’est amusé à me dire ce qu’il avait deviné de moi : pas de mère, pas de père… Je ne peux rien tirer de lui, j’abandonne ! lui dis-je en simulant un petit rire pour qu’elle ne devine pas ma rancœur.

     -Point positif : il t’observe, donc tu lui plais. Je ne suis pas sûre que tu doives abandonner. Il est juste un peu spécial, plaisanta-t-elle. En tout cas, je comprends mieux pourquoi il n’a pas voulu de ma compagnie au cinéma, ajouta-t-elle avec un petit rictus.

     Dans un autre journal local, je vis une photo de l’équipe de France de handball masculin. Mais bien sûr, pourquoi n’y es-je pas pensé plus tôt ?

     -Regarde ça ! lançais-je à Wendy en lui montrant la photographie.

     Elle me considéra d’un air sceptique.

     -Oui, je vois. Tu veux faire un article sur le championnat interlycées c’est ça ? me demanda-t-elle en posant un doigt sur sa tempe, ce qui signifiait qu’elle avait enfin compris. Mais en attendant, tu sais que je déteste que l’on change de sujet alors pose ça et viens avec moi.

Amor MortisWhere stories live. Discover now