Chapitre 1 (14)

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Tu te diriges vers les halles : au loin, le bâtiment de forme rectangulaire, à charpente en bois de chêne et de sapin, culmine à plus de dix mètres au faîtage, et de là émerge un élégant clocher octogonal. Un grand toit à deux versants et deux croupes brisées repose sur une rangée de courtes colonnes de granite, portées par un muret de pierre.

Tout à coup, des hurlements stridents détournent ton attention de l'impressionnante architecture de l'édifice.

— Lâchez-moi ! Je ne dis que la vérité !

Ce sont les cris d'une jeune adolescente dont la chevelure est dissimulée par le voile blanc des religieuses, et le visage lilial déformé par la fureur. Deux hommes retiennent vigoureusement ses bras souples, l'empêchant de griffer le visage du sévère homme d'église qui se tient face à elle.

— Lâchez-moi ! braille la jeune fille en se débattant comme un démon dans les griffes de ses tourmenteurs.

— Ramenez-la dans ses appartements et attachez-la, ordonne froidement l'homme d'église aux deux autres, et ceux-ci hochent la tête, au plus grand désarroi de la jeune religieuse, qui cesse soudain de lutter.

— Espèce de sale oiseau de malheur ! glapit-elle, avant de planter un coup de pied dans la bedaine de l'impitoyable abbé, qui bascule avec un gémissement.

La jeune fille a retrouvé toute sa fougue. Ses lèvres corallines se retroussent pour dévoiler des dents blanches et pointues, qu'elle plante violemment dans le bras crasseux d'un des deux hommes : celui-ci pousse un cri de douleur et de surprise, et son emprise sur elle se relâche un instant. L'adolescente en profite pour décrocher un coup de poing à l'autre homme et se délivrer de son joug. Elle se met alors à courir jusqu'aux halles, rapidement suivie par les deux hommes qui ont retrouvé leurs esprits, et ses mains délicates s'accrochent à la construction de pierre comme les serres d'un faucon autour de sa proie, tandis que ses petits pieds nus courent sur le granite : la voilà qui grimpe jusqu'au toit, ses petites jambes frêles donnant l'impulsion et la faisant presque voler, la mettant complètement hors d'atteinte de ses poursuivants. Elle se hisse sur le faîtage et se redresse, un sourire triomphant étalé sur son visage poupin. Elle est là-haut comme un ange, ses jupons déchirés flottant au vent, dévoilant une jambe blanche et gracile ; des mèches brunes s'échappent de son voile diaphane, et viennent fouetter ses joues rosies par l'excitation.

— Écoutez-moi tous ! braille-t-elle, s'adressant à la foule curieuse qui s'est rassemblée autour des halles. Je suis porteuse d'une vérité fâcheuse !

— Faites-la descendre ! rugit l'abbé, en gesticulant furieusement et s'empêtrant dans ses robes.

— Amis du peuple, continue fébrilement la jeune religieuse, l'Église vous ment ! Notre ville, que dis-je, notre monde est menacé ! Les attaques de monstres se sont multipliées ces derniers temps... Quelque chose est en train de se produire, quelque chose de terrible !

— Tais-toi, petite teigne ! beugle le strict homme d'Église. Tu racontes des sottises !

— Je ne dis que la vérité à ces gens, une vérité qu'ils méritent d'entendre ! s'exclame la jeune fille en serrant ses petits poings. Vous êtes en danger ! Nous sommes tous en danger ! Et l'Église préfère se vautrer dans son confort et ses richesses, se cacher derrière ses remparts d'argent, plutôt que de secourir son peuple !

— Faites-la taire ! grogne un homme, mais déjà, une femme se révolte :

— Non ! Laissez-la parler !

— Oui ! s'écrie un vieillard en agitant sa canne. Écoutons ce que la petite a à dire !

Aussi la jeune fille reprend avec force :

— Jamais auparavant des monstres n'avaient franchi la muraille d'une ville. Or, dans le nord, des villages et des cités entières ont été ravagées ! L'affaire a été étouffée comme un feu de bois, mais personne ne pourra empêcher la fumée de s'élever, et un jour, tout le monde découvrira la vérité : nous ne sommes plus en sécurité !

— Mais toi, comment le sais-tu? objecta un homme.

— Je le sais, répond la jeune fille, parce que je l'ai entendu de la bouche de celui qui se prétend le chef spirituel de la ville ! Dites-leur, Monsieur l'Abbé, comment vous comptiez quitter la ville pour fuir la progression des monstres sur le territoire ! Dites-leur comment vous parliez de sacrifier une population innocente pour sauver votre ignoble tête tondue !

— Mordiable, vas-tu te taire, misérable puterelle? aboie l'abbé.

— La Déesse vous punira dans l'au-delà pour vos méfaits, Monsieur l'Abbé ! s'écrie-t-elle. Mais moi, c'est ici bas que je les empêcherai !

— On verra si tu pourras les empêcher avec une lame en travers de la gorge ! rugit l'abbé, et il plonge une main grasse dans sa tunique pour en tirer un court poignard, dont la lame étincelle quand il la lève dans les airs.

[Voulez-vous intervenir?]

— Oui : rends-toi en (15)
— Non : rends-toi en (16)

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 11, 2018 ⏰

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