Chapitre 7

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Vam sert encore un verre d'alcool à Faolàn qu'il engloutit aussi vite que les premiers. Ses yeux portent un regard dur tandis que son coeur sonne creux. Ses pensées ne sont plus qu'un immense mélange de mots et d'images qui s'enroulent les unes autour des autres jusqu'à ne plus faire sens. Bientôt, les hommes hurlent, bientôt Faolàn suit la troupe lorsqu'elle se met à avancer vers un village, vers les prochaines victimes.

Le jeune guerrier serre ses dents et marche, déterminé.
Plus de sentiments.
Plus de pitié.
Il sent les yeux de Vam sur lui. Le chef voit l'assaut du soir comme une épreuve. Ou Faolàn fait ce qu'il a à faire et se comporte en vrai boucher de l'hiver ou il ne le fait pas et il crève. Peu à peu, l'entrée du village apparaît et les deux gardes leur jettent un regard horrifié avant de sonner l'alerte - trop tard. Vam hurle de commencer et les hommes s'engouffrent entre et dans les maisons, sur les villageois apeuré qui court dans tout les sens en braillant.

Le visage de Faolàn se déforme en un rictus grimaçant, les yeux bleus illuminés d'une lumière malsaine. Quelle bande de faiblard, ces villageois, incapables d'accepter dignement leur mort ! Du coin de l'oeil, il voit une jeune femme qui s'appuie contre le mur d'une maison et tente de s'éloigner, tremblante. Il se retourne d'un mouvement brusque et la plaque contre la maison en lui offrant un sourire carnassier. La jeune femme gémit de peur et lève les yeux vers les siens, tétanisée.
"Me tuez-pas!", murmure-t-elle, presque en sanglots, "J'a-J'ai un enfant !" Elle entoure son ventre de ses mains. Faolàn l'observe encore un moment sans rien dire. Il se penche en avant.
"S'il-vous-plaît...", elle ferme les yeux pendant qu'une larme roule de son oeil. Elle ne l'essuie pas et attend. Faolàn ne bouge pas et la jeune femme arrête de trembler avant de brusquement rouvrir les yeux et prendre un air déterminé. La détermination de l'homme avant la mort, un acte de courage désespéré.

"Je ne te connais pas", dit-elle, "Je ne t'ai rien fait et pourtant je vois dans tes yeux que dans quelques secondes, guider par la fureur des Dieux, tu m'achèveras", elle tremble un peu et sourit. Le jeune guerrier, figé, la laisse parler, "Je l'accepte. J'accepte ma mort et la destruction de mon village, j'accepte tout ça. Mais entends-moi, guerrier ! Ne tue pas mon fils, tue tout le monde, tue moi, mais ne lui prend pas la vie, je t'en conjure !"
La femme garde les yeux grands ouverts en attendant sa réponse. D'abord, l'expression de Faolàn se durcit et il grogne.
"Crois-tu que je suis ici pour m'occuper des voeux personnels de chacun ?", siffle-t-il avant de prendre la jeune femme par les cheveux.
"Alors tu ne vaux pas mieux qu'une bête !",crache-t-elle.

Tu ne vaux pas mieux qu'une bête.

"Dégage !", hurle-t-elle, "Dégage espèce de monstre, laisse-moi mourir pour que je sois enfin débarrassée!"
"Brute !"
"Monstre !"
"La place des chiens, c'est dehors."

La voix de Freyja et du maître se mettent à résonner en boucle tandis qu'il regarde la femme, comme sonné.
Tu ne vaux pas mieux qu'une bête.
Dans un hurlement enragé, il lève son arme et l'abat sur la femme qui tombe au sol, du sang comme une auréole autour de la tête.
"Mon petit... Conan...", souffle-t-elle avant de sourire, "Soit maudit, bête"
Cette fois, Faolàn rit, il rit avec du sang sur ses mains, son visage, son corps presque nu. Il rit et ramasse son arme, sort du village éteint comme une bougie par un coup de vent. Il retourne lentement au camp et peu à peu, son rire se déforme et se casse la figure. Il s'arrête un instant et lève les yeux vers le ciel.
"Maudit ? Je le suis déjà. Vous m'avez maudit le jour de ma naissance, le malheur semble être ma destinée et le vivre ma malédiction !"

Il serre les dents tandis qu'à l'intérieur de lui quelque chose se brise encore et encore et ne laisse plus qu'une sensation de vide monotone.
"Je vivrai", dit-il au ciel, "Je vivrai et vous n'arriverez pas à me détruire, dieux de pacotille, tout simplement parce qu'il n'y a plus rien à détruire."
Quelq'un s'approche derrière lui.
"Alors comme ça, on parle tout seul?", dit Pranan, "La perte de la gamine t'as donc fait perdre la raison?"

Faolàn serre les poings un instant et se retourne vers son ami, un sourcil levé.
"Gamine? Quelle gamine ?" Pranan lui lance un regard perturbé.
"Mais tu sais bien... Freyja... "
Le visage de Faolàn se durcit.
"Elle est morte, Pranan, elle n'existe plus et je n'ai pas l'intention de la garder en mémoire "
Pranan secoue la tête.
"Mais qu'est-ce qui te prends... ", marmonne-t-il, "On en reparlera quand t'auras un peu moins d'alcool dans le crâne!"

Faolàn ne dit rien et les deux se mettent à avancer vers le camp, en silence. Quoique dise Pranan, la décision de Faolàn est prise. Freyja doit disparaître de sa mémoire, ses yeux, sa voix, son odeur. Elle le rend faible. Et tout ce qui le rend faible doit disparaître. Dans sa tête une petite voix pousse un grognement plaintif puis se tait.

Le coeur de Faolàn se referme, sur son passé, ses secrets, sa douleur, se referme comme une porte qui claque avec une arme volant la vie à une mère désespérée. Son coeur se referme, fatigué de subir, fatigué de émotions qui le brisent un peu plus chaque jour.

Ils atteignent le camp ou Vam s'est déjà installé, une femme de chaque côté, le visage ecstasique.
"Bon travail, mes enfants !", s'exclame-t-il et tape sur les épaules de Pranan et Faolàn. Ils restent impassibles tandis que leur chef se penche en avant.
"Tu es bien de retour dans la troupe, Fao, la scène avec cette idiote de femme qui te supplie pour la vie de son gosse... Génialissime !"
Le jeune guerrier penche seulement un peu la tête. Vam lui sourit de toutes ses dents.
"À demain, Fao, j'espère que tu vas continuer à me surprendre..."
Faolàn lui rend un sourire en coin.
"Je l'espère aussi."

Avec une excuse quelconque, le jeune guerrier se retire tandis que son chef le regarde avancer vers sa tente. Son sourire disparaît.
"Il devrait faire attention", dit-il à Pranan, "Quelque chose de malsain s'est installé dans ses yeux."
Pranan rit durement.
"Parce que ce n'était pas le cas avant ? Parce que tu n'es pas pareil?"
Vam se gratte la barbe.
"Ce n'était pas pareil", grommelle-t-il,"Moi, lui... On avait avant de s'enrichir et on était attiré par la destruction et la peur. Mais là, ce que je vois, c'est du vide et le vide, Pranan, c'est le pire état dans lequel un homme peut se trouver. "

Rebonsoir !Désolée pour ce chapitre pas fameux, mais il fallait bien que je l'écrive - promis, la suite sera mieux

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Rebonsoir !
Désolée pour ce chapitre pas fameux, mais il fallait bien que je l'écrive - promis, la suite sera mieux.
Bisous, bisous les cocos !
Blondie (frustrée) ❤

Vénus en fleursWhere stories live. Discover now