Chapitre 28

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Un sanglier.

Un putain de sanglier.

Freyja sent son cœur rater un mouvement lorsqu'elle regarde l'animal sauvage en face d'elle, un air fou dans ses yeux de bêtes. Elle recule d'un pas.

« Doucement. Tout... Doucement. », dit-elle la voix tremblante, les mains levées, reculant lentement, les yeux posés l'animal, dans l'espoir de le calmer. Le sanglier pousse un bruit étrange et d'un coup brusque, dans un fracas assourdissant, fonce sur elle. Freyja pousse un cri étouffé, recule plus vite, se retourne, désespérée, n'ayant rien pour se protéger. Elle entend l'animal se rapprocher, elle accélère, ses pieds se prennent dans une racine, elle trébuche. Il est tout près. Dans un geste de désespoir, elle se protège la tête des deux mains, ferme ses yeux. Ne me tue pas... Ne me tue pas...

Mais l'attaque ne vient pas.

Freyja entend seulement un cri perçant de l'animal et un sifflement violent. Elle ouvre les yeux.

« Alors ? Tu as peur ? »

Lorsque Freyja entend une voix froide derrière elle, son corps se tend. Qui est-ce? La voix a quelque chose de familier. Elle baisse ses mains, peu à peu, et fait un tour sur elle-même pour se relever difficilement. Ses yeux observent attentivement la scène. La première chose qu'elle voit, c'est le sanglier. Mort. Les yeux fous tournés vers le ciel, une flaque de sang qui imbibe l'herbe autour de ses flancs. Elle relève la tête un peu plus, jusqu'à ce que son regard tombe sur le côté opposé de la prairie.

En face d'elle, il y a une femme. Des cheveux blonds platines qui tombent en cascade dorés le long de ses épaules blanches. Des yeux bleus laiteux qui regardent nulle part. Aveugle. Freyja déglutit. A côté de la femme, un homme. Il tient un arc dans sa main et a un air cruel dans les yeux. La jeune femme retourne son attention sur la blonde. Elle se mordille la lèvre. Elle sait qu'elle la connaît, elle cherche dans ses souvenirs en bordel jusqu'à ce qu'elle arrive à placer un prénom sur la tête sournoise qu'elle a en face d'elle.

Vila.

Elle grogne.

Vila fait un signe de la main hautain et l'homme hoche la tête avant de s'éloigner.

« Je suis étonnée, Freyja, je ne m'attendais pas à te revoir un jour. J'avais même espéré ne plus jamais avoir à revoir ta tête de paysanne. »

« Oh Vila, crois-moi, je ne tenais pas à te revoir non plus. »

La jeune femme pousse un rire cristallin et machiavélique. Pour la première fois, Freyja étudie ses yeux en détails. Ils ont l'air aveugle et Vila à toute l'attitude d'une femme qui a perdu la vue mais...Son regard instable semble faux. Surjoué. La femme semble sentir son regard sur elle. Elle tourne un peu la tête.

« Ne me regarde pas comme ça. », le sourire de la femme blonde s'élargit et Freyja fronce les sourcils. Ne me regarde pas comme ça.  Son cœur rate un battement lorsqu'elle se rend à l'évidence, lorsqu'elle se rend compte de quelque chose qu'ils auraient dû tous voir auparavant. Vila n'est pas totalement aveugle. Elle voit. Freyja serre les poings. Comment... ? « Et oui, ma petite Freyja. Je ne vois pas aussi bien que d'autres mais je ne suis pas totalement aveugle. Surprenant, n'est-ce pas ?» Elle glousse et cligne plusieurs fois des yeux d'un air provocateur.     «Et puis ne m'appelle pas Vila, mon prénom est Vera. Vila est morte il y a bien longtemps, cette petite catin. »

Freyja sent tout tourner dans sa tête et des questions lui brûlent la langue mais elle se retient. Elle n'a pas envie de parler à cette femme pour laquelle elle sent la haine pulser à travers ses veines. Vila n'est pas Vila? Elle n'est pas aveugle?  Qu'est-ce qu'elle me veut? Et pourquoi la mise en scène avec la pauvre bête?

Vénus en fleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant