à tout ce que je laisserai inachevé

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le ciel était bleu clair le jour où tout s'est arrêté.

au milieu de la cité désertée, de rares fantômes passent, ils attendent de disparaître à jamais

j'aurais aimé être comme ceux qui existent. ceux que tout le monde voit.

les filles qui passent des après-midi entiers avec leur bande.

je les ai vues afficher sur les résaux le bonheur que j'aurais rêvé d'avoir.

seule, dans ma chambre à dix mille lieues du soleil, qui paraissait pourtant percer par ma fenêtre.

il n'a pas su éclaircir mes pensées noires.

j'aurais voulu avancer sans avoir l'impression que le monde me passe à travers. j'aurais voulu parler sans avoir l'impression de saouler tout le monde.

parce que j'en avais, des choses à dire. j'avais le monde entier à raconter.

j'aurais aimé raconter le bruit du monde face au silence de l'univers.

j'ai essayé en vain de l'exprimer. sur les toiles ou sur du papier. mais e n'ai pas trouvé les mots. je n'ai pas su trouver la couleur du monde.

à quinze mètres du sol, je peux maintenant dire que mon monde n'avait pas de couleur.

j'ai pensé que des gens seraient peut-être tristes après ma mort mais je me suis souvenue que je l'avais été toute la vie. cela n'avait dérangé personne.

une mort pour remédier à la vie, quel calcul foireux.

et le jour du solstice d'été, mon visage de verre s'est brisé contre le béton brûlant.

mes dernières pensées se sont envolées avec mes toiles et poèmes, avec mes pages remplies qu'à moitié. avec ma solitude incessante.

ma mort qui s'offrait à tous les crayons vidés, à toute cette peinture gaspillée.

à tout ce que je laisserai inachevé.

LES ÉTOILES ONT PLEURÉ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant