Chapitre 11

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2 jours plus tard

Leny se morfondait, emmitouflé dans sa couette. Toute la nuit durant, il lui avait été impossible de dormir. Malgré ce que lui avaient dit les guérisseuses, il gardait toujours cette peur profonde. Cette peur de se retrouver dans un endroit inconnu, sans indications, et donc en danger.

On lui avait déjà dit : «Tu ne vas pas rester enfermé toute ta vie ! On sait que c'est dur, mais il faut passer à autre chose. Il faut admettre que c'est finit et que c'est comme ça. On ne peut rien y faire. »

Ces mots, si douloureux à entendre pour le jeune homme, tournaient en boucle dans son esprit.

Au fond, partir, faire des rencontres, découvrir de nouveaux endroits, voyager, il le voulait. Depuis qu' il était petit, il adorait regarder les émissions de voyages qui passaient à la télé et il s'extasiait devant les ruines antiques, la nature sauvage, les contrées pittoresques et les milliers de paysages époustouflants que renfermait la Terre. Non, là n'était pas le problème.

La problème venait de ce qui s'était passé en ce matin de Juillet, il y avait deux ans de cela.

Il ne voulait pas s'en rappeler, car il savait à quel point il en souffrirait.

Il souffrirait de ces déchirures du cœur, de ces retords de l'âme, de ces souvenirs qui hantent, de ces fantômes du passé.

Il se souviendrait de ce cri, déchirant, et de lui, impuissant face à l'horreur. Et puis, le vide. Le silence, pesant, lui écrasant la poitrine.

Le bip sonore des machines de l'hôpital. Et ce bruit, continu. La fin.

Des promesses arrachées, déchiquetées, écrasées et roulées dans la boue. Un avenir anéanti, en quelques secondes.

La douleur.

Puis la peur.

La peur de s'aventurer dans des chemins inconnus, la peur de dépasser les limites, et ses limites.

Et la peur, qui s'étend et qui recouvre tout, qui va jusqu'à vous envahir tout entier.

Pendant un certain temps, même le chemin du lycée, pourtant si familier... Il ne voulait plus y aller seul. Et pourtant, quoi d'effrayant sur une simple route goudronnée ?

Les souvenirs. Car oui, parfois, les souvenirs peuvent terrifier. A cause de la douleur qu'ils procurent.


Il alluma son téléphone et regarda l'heure.

Peut être que cela pourrait l'aider. Peut être pourraient-t-elle l'aider.

Il était temps d'avancer.

Sans attendre, il sortit de son lit et s'empressa d'ouvrir les volets.

La lumière l'aveugla un instant. Et il vit, à l'horizon, le soleil qui se levait et le firmament se colorer de teintes roses. Les gouttes de rosée sur l'herbe, la légère odeur d'humidité, une douce brise, presque imperceptible et le chant d'un oiseau.

On lui donnait une chance.

A lui de la saisir.





Quand il pénétra dans le domaine des guérisseuses, Leny ne les vit d'abord pas. Intrigué, il appela.

Apparu alors la silhouette de Menat qui descendait les escaliers.

Elle avait revêtu une robe en fourreau aux couleurs chatoyantes et s'était maquillée et parée de splendides bijoux. Ainsi, elle ferait honneur à sa déesse.

- Bonjour Leny ! Je t'en prie, va te changer, je t'ai tout mis dans le laboratoire.

- Merci ! Lui répondit-il tout en se dirigeant vers le fond de la maison.

Quand il revint, il vit que la musicienne était à présent accompagné de Satis, qui avait elle aussi revêtu une robe fourreau rouge, s'était tiré un trait de khôl au coin des yeux et portait également de très belles parures.

- Il ne manque plus que notre magicienne ! S'exclama la guerrière.

Celle-ci se montra très bientôt. Elle avait conservé son bandeau rouge qui entourait sa tête et dont les extrémités flottaient au gré du vent, s'était parée de nouveaux bracelets de couleur et d'un pectoral d'or et avait chaussé de délicates sandales. Quant à sa robe, elle était légèrement vaporeuse et d'une blancheur éclatante. Comme ses compagnes, elle avait appliqué du trait de khôl à ses yeux, un fard léger à ses paupières et un baume sur ses lèvres.

Envoûté par les senteurs délicates des onguents dont elle s'était recouvert le corps, il mit du temps à réaliser qu'il la fixait.

Lorsqu'il s'en rendit compte, le rouge lui vint au joues.

Laissant les guérisseuses le guider, il essayait de calmer l'angoisse qui commençait à lui étreindre la poitrine.

Ils revinrent devant la porte qui l'avait emmené dans le royaume des dieux, pour faire la rencontre des déesses.

La suivante de Meretseger demanda alors à tout le monde de se prendre la main. Voyant bien que le jeune homme se sentait mal, elle lui offrit sa main tout en lui souriant.

- Ne t'inquiète pas, tout va bien se passer. Jamais nous n'avons de problème pendant la traversée, ce n'est pas aujourd'hui que ça va nous arriver !

Et ils s'enfoncèrent dans le couloir dont les murs couverts de hiéroglyphes s'illuminèrent.

Les guérisseusesWhere stories live. Discover now