Une déclaration

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_octobre 1849_

- Je peux te raconter une histoire ? demanda Hypolite.

Morgane, concentrée, répondit à l'affirmative.

Cette dernière s'amusait à retirer tous les morceaux de feuilles et de brindilles coincés dans les cheveux du jeune homme.

- Il était une fois, dans un monde extraordinaire, une belle princesse qui vivait dans un royaume triste et désenchanté. 

« Un jour, un prince vint lui demander sa main. Elle refusa d'abord. Mais il ne se découragea pas pour autant.

Il était amoureux et savait que la jeune femme avait refusé pour des raisons autres que ses sentiments. 

En effet, elle craignait d'être déçue comme elle l'avait toujours été. Mais le prince revint avec un livre qu'il lui offrit. Chaque page de cet ouvrage contenait des dessins du royaume d'où il venait. La princesse était subjuguée par la beauté des lieux.  

Le prince, pour prouver ses sentiments, lui offrit ses services et lui proposa un marché. S'il parvenait à réaliser une mission qu'elle lui avait confié, la princesse devrait l'épouser et partirait avec lui dans son royaume. 

La belle jeune femme accepta les conditions du marché et réfléchi pendant une nuit entière à la mission qu'elle allait lui confier. 

La princesse l'envoya chercher un trésor d'une très grande valeur dans les contrées les plus sombres de son royaume. Celui-ci accepta sans hésiter. Sa quête ne fut pas sans obstacles, il dû combattre un dragon et affronter nombre d'autres forces malfaisantes sur le chemin. 

Un mois plus tard, le prince revint et lui offrit le précieux butin qu'il avait gagné. C'était un coffre en bois cerné de pierres précieuses. La princesse l'ouvrit et examina son contenu avec attention. 

Elle leva les yeux vers lui et sourit. 

- Vous auriez pu partir avec ce coffre et ne jamais venir me voir. Ainsi vous auriez gagné un trésor d'une valeur inestimable. Mais vous êtes revenu et m'avez prouvé votre sincère loyauté. 

- Le seul trésor qui ai de la valeur dans mon cœur est votre confiance. 

- Alors je vous l'accorde. Je vous confie ma vie.

Le lendemain matin, le prince la conduisait à son royaume. Un lieu merveilleux. Leur château, le plus beau d'entre tous, surplombait la vallée et s'érigeait en haut des falaises. Ils vécurent heureux et jamais elle ne regretta de lui avoir donné son amour. »

- C'est une jolie petite histoire. 

Hypolite, qui était assis contre un arbre, se tourna vers elle. 

Cette dernière rougit. 

- C'est ce que vous pensez de mon récit ? demanda-t-il avec un grand sourire aux lèvres. 

- Oui. J'aime quand vous racontez des histoires, avoua-t-elle à demi-mot. Celle-ci est très belle et... vivante. 

Le jeune homme prit les mains de Morgane dans les siennes. Elle frissonna au contact de sa peau. 

- Dame Morgane, ce récit, je l'ai pensé pour vous. 

Leurs cœurs battaient à la chamade.

- Est-ce que vous m'aimez ?

Hypolite sembla surpris par sa question. Il secoua la tête.

- Bien sûr que je vous aime. Vous êtes la princesse que je ne cesserais d'admirer, le matin en vous découvrant, le jour en vous écoutant et la nuit en rêve. N'en doutez jamais. 

Morgane hésitait. Qu'allait penser Viktor ? Arriverait-il quelque chose à Hypolite si elle osait l'aimer ? N'était-ce pas un peu précipité ?

Le jeune homme exerça une légère pression sur ses paumes.

- J'ai une question à vous poser. Seulement, soyez honnête, promettez-moi de dire la vérité. Jurez-moi que ni la pitié ni la crainte n'influencerons votre jugement et que seul vos sentiments seront exprimés. 

- D'accord.

- Jurez-le. 

- Je le jure. Rien d'autre que mes sentiments ne guiderons mon jugement.  

À cet instant, Morgane avait choisi. Désormais, elle était libre de s'amuser. Elle se libérait du poids qui pesait sur ses épaules en se laissant guider par la voix douce et rassurante du jeune homme.

-  Est-ce que vous m'aimez ?

- Oui, je vous aime Hypolite Bauvey. 

- M'aimez-vous plus que vous aimez mon cousin ?

La jeune femme fronça les sourcils.

- Je l'ignore.

- Vous m'aviez promis que votre jugement ne serait pas alterné par la pitié! Dites le fond de votre pensée, soyez honnête, je vous en supplie. J'ai besoin de le savoir.

- Pourtant je ne peux pas être plus honnête que cela. Je ne m'étais jamais posée la question. 

- Seriez-vous prête à m'épouser si je vous le demandais ?

- Est-ce une déclaration ?

- Accepteriez-vous si c'en était une ? 

 Morgane retint sa respiration.

- Oui. 

- Si je vous disais que c'était vraiment une déclaration, que diriez-vous ? 

- Mille fois oui. 

Le jeune homme en fut si bouleversé qu'il resta coi devant cette fille qui l'ensorcelait. 

Puis, sans briser le silence enchanté de cet échange merveilleux, il se le leva et partit.

Vengeances MacabresWhere stories live. Discover now