Psychose

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_octobre 1849_

- Non, murmura-t-elle.

« C'est de ta faute! » pensait Morgane pour elle-même. 

- Le temps se gâte, nous ferions mieux de nous hâter, déclara Hypolite. 

Mais la jeune femme n'écoutait pas. Elle était tétanisée. 

Au loin, des flammes dépassaient des arbres. 

Tout son corps tremblait de terreur. Ce spectacle, ce n'était pas la première fois qu'elle le voyait. 

Bauvey était désemparé. Il ne comprenais pas l'étrange comportement de sa fiancée. Ce dernier regarda partout autour de lui, à la recherche de ce qui avait pu déclencher cette réaction chez Morgane. Mais il ne trouvait rien. 

Elle se mit à pleurer.

Ces cris, ils hantaient ses cauchemars depuis des années. Ils provenaient du brasier. C'étaient ceux de sa famille aux portes de la mort. 

Elle le savait.

Jamais la jeune femme n'avait oublié ces hurlements atroces, témoignant de la cruauté de leurs derniers instants. 

En plus de ces souvenirs affligeants, une pensée torturait son esprit. 

« Tu portes malheur! » disait-elle à l'infini. S'ancrant dans son cerveau comme un arbre dont les racines la détruisait à petit feu.

- Non, répéta-t-elle.

Morgane pris son courage à deux mains et tourna le dos à cet affreux spectacle. 

Mais elle pâlit aussitôt.

Très loin, sur le sentier, s'approchait un groupe d'hommes. Au début, elle n'en était pas sûre, mais au fur et à mesure qu'ils approchaient, elle les reconnaissait. C'était ceux qui l'avait poursuivie le jour où Théodore est mort.

Ils progressaient au pas de course. À vue d'œil, on les voyait grossir. Pourtant, il n'était pas plus aisé de les décrire maintenant qu'auparavant. On eut dit qu'ils n'avaient pas de visage.

Morgane recula. 

« C'est de ta faute! »

- Non, gémit-elle.

Elle prit sa tête entre ses mains.

Il fallait que cette voix cesse.

« Tu portes malheur! »

- Cela n'est pas vrai! 

« Tu l'as mérité! »

- Arrêtez, supplia-t-elle.

« C'est de ta faute! »

- S'il-vous-plaît. 

En réponse, Hypolite posa ses mains sur ses épaules. 

- Qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-il.

Cette voix. C'était celle d'Auguste.

Morgane baissa les yeux sur les doigts décolorés, presque bleus sur ses épaules. 

Elle hurla. 

C'était les mains d'un mort.

La jeune femme se tourna et se retrouva face à un Auguste terrifiant. 

Elle le contourna en courant aussi vite qu'elle le pouvait et partit dans la direction opposée au groupe d'hommes.

Il fallait qu'elle s'éloigne de tout cela le plus vite possible. Son corset ne l'avait jamais aussi serré. Elle se sentait oppressée et ne parvenait plus à respirer convenablement. 

Sa tête lui tournait et le paysage devant elle se troublait. 

Morgane devait se battre, ne pas laisser tomber. 

Avec un regain de force miraculeux, la jeune femme accéléra sa course et parvint à un virage. 

Le sentier bifurquait sur la gauche. Elle ralentit et repéra un pont à cinquante mètres. 

Un mauvais pressentiment l'envahît aussitôt. 

Morgane sentit un présence. On l'observait. 

Elle tomba nez à nez avec sa défunte petite sœur. 

- Louise?

- Morgane, tu avais promis. 

- Je...

La jeune femme s'interrompît. Tous, ils étaient là. Les fantômes de son passé, ceux qui hantaient ses cauchemars et obsédaient son esprit. 

Morgane se tourna pour les regarder, les uns après les après les autres.

La pluie n'avait pas cessé de tomber et, à chacun de ses mouvements, répondait le craquement d'une branche ou le bruissement des feuilles. Mais c'était à peine si la jeune femme s'en rendait compte. 

En réalité, autre chose, de beaucoup plus fort, retenait son attention.

C'était cette voix dans son esprit. 

 Cette pensée qui prenait vie en elle depuis si longtemps;

« Tu portes malheur! »

Hors, cette fois, elle n'avait pas résisté. Ce mur invisible qui, a défaut de le faire disparaître, étouffait ce souffle maléfique, était tombé. 

Les visages effroyables défilaient autour d'elle. Une migraine l'assailli rapidement. 

- Hypolite ? appela-t-elle en proie à l'effroi.

L'avait-il abandonnée à son sort ? Morgane ne pouvait se l'imaginer. Mais elle se sentait défaillir de façon croissante. 

- Je vous en supplie... Rendez-moi Hypolite et laissez-moi en paix. 

La jeune femme ne réfléchissait plus, elle en était incapable. 

Dans un ultime appel à l'aide, elle s'effondra au milieu des sinistres silhouettes. 

Soudain, c'est là qu'elle le vit; Théodore. 

Il était penché sur elle. Un air inquiet sur les lèvres.

Morgane baissa les yeux vers son torse d'où dépassait une pointe de flèche. 

- Pardonne-moi, Théodore. 

Puis elle perdit connaissance. 



Vengeances MacabresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant