17

1.9K 348 51
                                    

      
     Assis sur les marches du carrousel, j'ai attendu patiemment que Sacha se pointe. Lorsque je lui avais parlé au téléphone, quelques heures auparavant, elle m'avait donné rendez-vous ici-même, à seize heures pile. Seulement, il était seize heures passées et Sacha n'était toujours pas présente. J'étais donc seul dans ce parc d'attraction hanté, confronté à mes pensées. Je détestais me retrouver seul avec moi-même ces jours-ci, parce que ça me ramenait toujours au fait que je m'étais disputé avec mes potes. Trois jours s'étaient écoulés depuis. Chaque jour me torturait de plus en plus. Je ne regrettais pas ce que j'avais dit à Olivia, loin de là. Après tout, je n'avais fait que lui dire le fond de ma pensée. J'avais défendu Sacha et je ne pouvais pas regretter un geste pareil. Mais j'avais peut-être sous-estimé les dommages de cette dispute. Je pensais bien que ça allait se terminer comme tout le reste : l'un de nous allait finir par s'excuser et admettre ses torts. Seulement, ça faisait déjà trois jours. Trois jours, c'était beaucoup à mes yeux. Olivia n'avait toujours pas fait les premiers pas, si bien que je me demandais si ce n'était pas à moi de le faire. Cependant, je refusais de le faire. Peut-être était-ce par orgueil ou bien parce que je n'étais tout simplement pas convaincu d'être le fautif dans cette histoire, mais une chose était certaine : je n'étais pas prêt de sitôt à m'excusez. Traitez-moi d'idiot si ça vous chante, moi ça m'est bien égal. J'ai mes raisons d'agir ainsi. Si je m'excusais, les choses allaient redevenir comme avant entre Olivia et moi. Et je n'avais pas envie que ça se produise. Je n'avais plus envie qu'Olivia lance des piques en permanence à Sacha et qu'elle la juge sans tout à fait la connaître. Aussi, j'en avais plus qu'assez qu'on s'inquiète pour moi comme si je n'étais rien de moins qu'un gamin. Mes amis ne pouvaient pas me protéger vingt-quatre heures sur vingt-quatre. J'étais suffisamment grand pour me défendre.

— À quoi tu penses ?

J'ai sursauté. Derrière moi, Sacha approchait tranquillement.

— Je t'ai déjà dit que c'était flippant de débarquer sans prévenir ?

— Je t'ai prévenu, a-t-elle rétorqué. Et oui, tu me l'as déjà dit.

Sacha s'est assise sur les marches du carrousel, à ma gauche.

— T'as la tête d'un gars qui vient de penser à quelque chose de triste.

— Non, ça va.

— T'es certain ?

— C'est moi qui devrait m'inquiéter, pas toi.

Elle a levé les yeux au ciel.

— On peut s'inquiéter tous les deux, je t'assure.

J'ai souri.

— Tout va parfaitement bien.

— Arrête, Logan. Ne fais pas semblant. Pas avec moi.

— Je pensais à mes amis, c'est tout.

Sacha s'est mordue la lèvre inférieure, soudainement très mal à l'aise. Je lui avais brièvement parlé de ma dispute avec Olivia quelques jours auparavant, mais en omettant quelques détails. Je l'avais aussitôt regretté. Sacha s'était immédiatement mise à se sentir coupable à ce sujet. Elle avait l'impression que j'avais dû choisir entre elle et mes amis. Ce n'était pas le cas. Enfin, pas vraiment. Je ne laissais pas tomber Olivia pour Sacha. Je n'étais pas ce gars-là, quand même. Je la laissais tomber parce que j'en avais marre de ses opinions pré-faites au sujet de Sacha Macleod et j'avais besoin de croire qu'en m'éloignant un peu, elle allait y réfléchir et revenir sur certaine de ses idées.

— Tu veux en parler ? a demandé Sacha.

— Non, pas vraiment.

— Alors, n'en parlons pas.

La théorie des cactusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant