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Les aéroports avaient toujours dégagé quelque chose de festif. Toutes les cultures s'y mélangeaient harmonieusement. Il n'y avait rien de plus diversifié qu'un aéroport situé en pleine métropole. J'aimais bien m'amuser à observer les gens pour les associer à certaines catégories. Il y avait les touristes, ceux qui venaient de débarquer à Montréal et qui avait l'air extrêmement perdu (je faisais parti de cette catégorie), puis ceux qui quittait la métropole pour partir en vacances à l'autre bout du monde. Il y avait aussi les membres d'équipage, ceux qui se déplaçaient comme des mannequins lors de la Fashion Week. Ils étaient dans leur environnement, ils avaient le contrôle. Et ils le savaient. Puis, il y avait ces personnes en complet, les yeux rivés sur leur cellulaire, que peu de choses impressionnaient. Les voyages en avion faisaient parti de leur quotidien.

Lorsque j'ai fait part de mes observations à Sacha, elle m'a jeté un regard réprobateur.

— Tu les mets dans des cases, tu sais.

Je n'ai rien dit, me sentant légèrement mal d'avoir appliqué ce concept que Sacha détestait tant. Heureusement, mon amie ne semblait pas fâchée, simplement décidée à me prouver que j'avais tort. Elle m'a pointé une dame qui récupérait sa valise sur le carrousel.

— Tu la vois dans quelle catégorie ?

J'ai observé la femme en question. Elle devait avoir trente-cinq ans, tout au plus. Ses cheveux étaient bruns et semblaient avoir été fraîchement coupés. Elle portait des baskets et un jeans et ne cessait de regarder sa montre nerveusement.

— Définitivement touriste, ai-je dit.

— Et qu'est-ce qui te fais dire ça ?

— Sa tenue. Et le fait qu'elle regarde continuellement l'heure.

Sacha a souri.

— Ou peut-être qu'elle est simplement en retard pour un rendez-vous.

— Dans ces vêtements ?

Elle a haussé les épaules.

— Qui a dit que c'était un rendez-vous galant ? Elle ne va peut-être que chez le dentiste.

J'ai souri.

— T'es en train de me dire que cette fille a fait trois heures d'avion rien que pour aller chez le dentiste ?

— Non, a rétorqué Sacha. Elle était dans notre vol, donc elle n'a voyagé qu'une heure. Elle devait assister à un évènement à Toronto et maintenant que c'est le week-end, elle a décidé de rentrer chez elle.

— Pour se faire traiter une carie ?

Sacha m'a frappé le bras, en riant.

— Idiot ! J'en sais rien, moi. Tout ce que je cherche à dire, c'est que tu ne peux pas classer les gens comme ça.

— D'accord, d'accord. J'ai compris la leçon.

J'ai souri. Sacha s'est agrippée à mon bras et nous nous sommes dirigés vers la sortie de l'aéroport, nos valises traînant derrière nous. Arrivés devant les portes, nous nous sommes arrêtés. Sacha a jeté un regard circulaire autour d'elle.

— Ton père est là ? lui ai-je demandé.

Elle a secoué la tête.

— Non, il travaille en ce moment, m'a-t-elle informé. Mais il nous a appelé un taxi. Le voilà, justement !

Nous sommes sortis à l'extérieur pour rejoindre la voiture noire. J'ai glissé nos valises dans le coffre de la bagnole, puis j'ai rejoint Sacha sur la banquette arrière. La blonde a donné notre adresse au chauffeur et nous sommes partis. Durant tout le trajet, mon regard se fixait sur le paysage. J'étais tout simplement émerveillé d'être ici. Rien que maintenant, je pouvais dire avec certitude que Montréal était une ville vivante. Semblable à Toronto, mais bien différente sur certains points. La musique de rue, le bruit des klaxons, les conversations sur les terrasses... Je n'avais qu'à regarder pour savoir que ça me plairait. J'étais suffisamment chanceux d'être ici, chanceux que mes parents aillent accepter de me laisser partir seule avec Sacha dans un autre coin de pays. J'avais réussi à les convaincre en leur disant que pour les deux derniers mois de l'année scolaire, j'allais me forcer au maximum et faire augmenter mes notes. Maintenant, je n'avais plus qu'à tenir ma promesse.

La théorie des cactusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant