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Ce que ni Emile ni Florian ne savaient (du moins, ce qu'ils ne savaient pas avant ce jour là), c'est que Nora et Héléna étaient en fait une seule et même personne. Nora, la véritable Nora, n'était pas plus la Nora d'Emile (celle qu'il décrivait) qu'elle n'était la Héléna dont parlait Florian. Ce n'était pas non plus une fille atteinte de trouble de la personnalité multiple. Non, c'était une fille normale. « Normale ? » Quelle plaisanterie ! C'est bien la première fois que j'emploie ce mot en référence à celle qui est aujourd'hui ma fiancée. C'est une fille extraordinaire. Ça l'a toujours été, et particulièrement à mes yeux bien sûr. Elle est plus spéciale que quiconque pour moi : absolument unique. Et pourtant elle est normale. Dans le sens où chacun est spécial à sa propre façon. Dans le sens où ce qui dans les premiers temps a semblé si incroyable à Emile et Florian (le fait qu'elle puisse être à la fois ces deux personnages différents) est quelque chose qui pourrait probablement se retrouver sous une forme ou une autre chez n'importe qui. Aucune personne ne comporte qu'une seule facette. Le comportement des gens dépend du contexte, la description qui est faite d'eux dépend de la personne qui les observe. Et chacun est complexe à sa façon, chacun comporte des contradictions : il suffit de suffisamment connaître quelqu'un pour pouvoir le remarquer. On le remarque forcément, à moins que l'on ne prenne jamais conscience du fait que les différents aspects de la personne que l'on connaît (ou de soi-même d'ailleurs) pourraient être jugés contradictoires.

Nora est Nora. Emile l'a aimée. Florian l'a aimée. Et j'ai envie de dire qu'aucun des deux ne l'a aimée. Chacun d'eux n'a aimée qu'une part d'elle, ou que la perception qu'il avait d'elle. Quant à moi, je l'aime parce qu'elle est les deux à la fois : Nora et Héléna, puis plein d'autres facettes encore. C'est amusant ; quand je l'ai rencontrée, avant de savoir qu'elle était Nora ou Héléna, ce qui m'a tout de suite plu en elle a été une contradiction comme celle-là. Elle était déjà un paradoxe auquel je voulais trouver la solution. Puis elle est devenue toute une collection de paradoxes. Plus tard, quand j'ai trouvé (ou plutôt qu'elle m'a donné) la solution des paradoxes, j'ai réalisé que j'aimais ces solutions plus encore que je n'avais aimé les paradoxes. Je crois que ce n'est qu'à partir de là que je l'ai vraiment aimée, dans le sens complet que j'accorde à ce terme.

Comme elle nous apparaîtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant