Oxelle

4] Horizon

Il est dans les alentours de dix-neuf heures lorsque Line et Oxelle ont terminé de vider leur valise et ranger leurs affaires.

-La nuit va tomber d'une minute à l'autre...

Oxelle regarde par la fenêtre une seconde avant de tourner son visage vers son amie:

-J'ai envie d'aller mettre mes pieds dans l'eau.

Line hausse un sourcil:

-Maintenant?
-Oui... Oh allez s'il te plaît. Si on se dépêche on sera au bord de l'eau pile pour le coucher de soleil!

Line réfléchit une seconde et finit par se lever du lit:

-Apres tout, c'est vrai qu'attendre jusqu'à demain pour aller sentir de près les effluves de l'océan serait une torture...

Oxelle sourit jusqu'aux oreilles et les deux amies quittent la chambre en emportant avec elles que la clef de leur porte.
Elles ne croisent personne et trouvent facilement la porte de derrière dont avait parlé Silvain qui se situe juste en bas des escaliers. Elles sortent et une fois à l'extérieur retirent leurs chaussures et se mettent à courir comme des enfants, passant de l'herbe du jardin au sable de la plage.
La marrée est basse et une bonne centaine de mètres les séparent de l'eau. Le sable devient de plus en puis humide au fur et à mesure qu'elles se rapprochent de l'eau. Et finalement enfin, alors que le soleil touche tout juste l'horizon, elles arrivent enfin au bord de l'océan.

Oxelle retrousse son jean au maximum et regrette de ne pas avoir fait comme Line en mettant une jupe. Cette dernière touche déjà du bout des orteilles l'eau et pousse un cri:

-Elle est gelée!

Oxelle éclate de rire:

-Tu t'attendais à quoi? On n'est pas à la Méditerranée.

Les deux filles ne sont pas venues en vacances à la mer pour se baigner, il est encore trop tôt avant l'été pour ça. Elles voulaient simplement profiter de la solitude, du grand air et du soleil. Oxelle est déjà pressée de se mettre à lire allongée sur le sable, mais en attendant elle met à son tour ses pieds dans l'eau. Un frisson lui parcours le corps: elle est très froide en effet. Mais sentir le courant, si léger soit-il, caresser sa peau après avoir passé la journée en baskets à conduire lui fait le plus grand bien.
La jeune femme ferme les yeux et ouvre ses poumons au maximum pour respirer à plein nez cet oxygène si libérateur. Elle se sent bien, et oublie alors tout le reste: Maxence, sa sœur, son job et la ville...

-Regarde...

Elle rouvre les yeux et suit du regard le doigt pointé de Line.
Le coucher de soleil est splendide. Les couleurs chaudes virevoltent dans le ciel et viennent toucher la mer pour s'y confondre tandis que le soleil se noie peu à peu jusqu'à finalement disparaître totalement derrière l'horizon...
Les deux jeunes femmes restent muettes, fixant ce merveilleux spectacle avec admiration.
Finalement, Line entrouvre la bouche:

-J'aimerai rester ici pour toujours...
-Oui... moi aussi...

Les deux jeunes femmes décident de remonter dans leur chambre pour se rincer les pieds de tout ce sable avant de mettre d'autres chaussures et de descendre dîner.
Elles discutent en riant en essayant cependant d'être discrètes pour ne pas déranger les autres habitants de la maison quand.
Oxelle arrive sur la dernière marche, suivit de près par Line, mais en relevant le visage elle sursaute réalisant qu'elle est tout juste nez à nez avec l'aîné de la fratrie.
Elle est tellement surprise qu'elle perd l'équilibre en arrière et manque de tomber sur Line pour potentiellement que l'une comme l'autre se brisent la nuque, mais aussitôt l'homme la saisie par l'avant-bras et la rattrape avant qu'il ne soit trop tard.

-Attention, vous avez faillit tomber...

Oxelle pose sa main sur sa poitrine venant de voir sa vie défilée devant ses yeux.

-Oui... me...merci.
-Je suis désolé de vous avoir fait peur, ce n'était vraiment pas mon intention.

Il tient toujours son avant-bras, alors Oxelle se dégage doucement en souriant.

-Ce n'est pas grave.
-Vous êtes sure que vous allez bien?

La jeune femme prend Line par la main et passe devant l'homme en prenant garde à ne pas le toucher et lui répond tout en se dirigeant vers sa chambre:

-Oui, certaine.
-Bon et bien, à tout de suite pour le dîner alors. Ne soyez pas en retard...
-Oui c'est ça, à tout de suite alors.

Et une fois engouffrée dans leur chambre elle referme aussitôt la porte avant de lâcher un grand soupire:

-J'ai cru qu'il allait nous tenir la jambe une heure.
-Ne sois pas méchante, il a eu peur de l'avoir fait mal. Tu es une locataire après tout, il serait bien mal s'il y avait un accident.
-Oui peut-être... mais je n'ai pas aimé qu'il me tienne le bras comme ça.

Line regarde son amie un sourcil haussé, ne comprenant pas sa réaction si étrange:

-Pourquoi?

Oxelle hausse les épaules:

-Je ne sais pas.
-Comment il s'appelle déjà lui? C'est l'aîné c'est ça?
-Oui. Fidèle.
-Ah oui c'est vrai... « Fidèle »...

Line pouffe de rire en répétant ce prénom. Oxelle lui balance un petit rictus en coin:

-Et c'est moi qui suis méchante?
-Je ne suis pas méchante! Je... constate.
-Tu constates quoi?
-Que ces gens n'ont définitivement aucun goût en matière de prenom.

Oxelle rit malgré elle. Line reprend:

-Tu n'as peut-être pas aimé son contact parce que tu as peur d'y prendre goût...
-Qu'est ce que tu racontes encore?
-Vue la façon dont il te regardait je pense que tu n'aurais aucune difficulté à te l'approprier.
-«Me l'approprier » sérieusement? Tu as cru que c'était un crayon de papier le mec?

Line éclate en fou rire. Oxelle reste sérieuse:

-Non par contre vraiment arrête avec ça. Prosper tout à l'heure, maintenant lui... Tu veux me caser avec tout la fratrie?
-Celui qui a un bébé et une femme ça va peut-être être un peu plus compliqué... mais les autres open bar!

Oxelle lève les yeux au ciel, préférant stopper la conversation plutôt que parler à un mur.
Elle ne peut alors s'empêcher de repenser a Maxence. Line a beau la taquiner elle a raison: Oxelle va devoir se décider. Est-elle encore avec lui ou non? Mais pour y répondre il faut qu'elle sache la réponse à la question la plus importante: l'aime-t-elle encore?
Peut-être que cette semaine va l'aider à y répondre.

-Bon allez au lieu de rire comme une débile dépêche toi. On se rince les pieds, on change de chaussures et on se dépêche de descendre avant d'être en retard...