La Belle et le pilote

14 - Explications et changement de programme

Point de vue de Rosa.

Je laisse tomber mon sac sous la surprise. Simon Kentucky se tient devant moi, le regard noir et un léger sourire malveillant tracé sur ses lèvres. Il continue d'avancer dans le vestiaire comme s'il avait toujours le droit d'être ici. Les mains dans les poches de son jean, il s'arrête à quelques mètres de moi. Depuis qu'il est entré, je suis restée de marbre, comme bloquée par sa présence hostile. Je sens les battements de mon cœur contre mes tempes, ma respiration est hachée. Mes pensées se bousculent dans ma tête mais aucun mot ne franchit la barrière de mes lèvres.

-       Tu n'es pas contente de me voir ? dit-il après un long silence. Où tu ne t'attendais pas à me voir ? C'est dommage, je crois que j'ai raté mon entrée.

Il s'approche de plus en plus de moi. Mes pieds reculent avant que je le décide par moi-même. Lorsque mon dos vient taper doucement l'une des rangées de casiers, je commence à trembler légèrement.

-       Qu'est-ce que tu veux, Simon ? dis-je en espérant que ma voix ne trahisse pas la peur que je ressens.

-       Récupérer mon poste qui, par ta faute, m'a été retiré.

-       Je ne peux rien faire Simon. Ce n'est pas moi qui prends ce genre de décision.

Je lis sur son visage que ma réponse ne lui plaît pas mais c'est la vérité, je ne suis pas décisionnaire de ça.

-       Tu m'as volée ma place ! crie-t-il.

D'un seul mouvement, il se précipite vers moi, comble la distance et empoigne mon cou en claquant ma tête contre la porte métallique du casier. Une douleur aigue tape à l'arrière de mon crâne mais je n'ai pas le temps de m'attarder dessus.

-       Tu es une terrible menteuse, Rosa. Tu peux influencer les choix de Mattia pour qu'il me reprenne dans l'équipe. Il t'écoute, tu pourrais le convaincre.

Il passe son autre main sur ma joue, avant d'attraper une mèche de cheveux et de jouer avec entre ses doigts. Je déglutis et détourne le regard vers la porte du vestiaire. Je prie pour qu'une personne passe cette porte et fasse diversion. Mais je sais également qu'à cette heure, plus personne n'est présent dans les stands et que je suis seule face à un démon.

-       Il ne m'écoutera pas, Simon. Pas après ce que tu as fait à l'écurie.

-       Tu sous-estimes ton propre pouvoir de persuasion, ma petite mécanicienne, susurre-t-il en resserrant sa prise sur ma gorge et en attrapant une grosse poignée de cheveux, dis plutôt que tu ne veux pas que je revienne dans l'équipe.

Son visage s'avance de plus en plus comblant les derniers centimètres. Son after-shave me pique le nez. Je tente de détourner mon visage mais ses doigts s'accrochent à mon menton et me maintient immobile. Chacune de ses respirations me frappent aussi froide que la personne qui me bloque contre les casiers. Il me lâche en laissant courir sa main le long de mon cou mais s'approche de mon oreille.

-       Peut-être que tu as besoin d'une petite motivation ? me chuchote-t-il.

Au moment où il termine sa phrase, une silhouette apparaît dans l'encadrement de la porte. Mon cœur se met à battre plus vite. Peut-être par anticipation de ce qu'il pourrait arriver. Je sens une larme glisser le long de ma joue.

-       Un problème par ici, dit la personne encore plongée dans l'obscurité du couloir.

Je reconnais immédiatement la voix. Les larmes s'écoulent de plus en plus vite et le poids qui pesait dans ma poitrine disparaît. Ma respiration est plus rapide mais également plus légère. Simon détourne la tête rapidement vers la porte et s'écarte de moi en un sursaut. Il me jette un dernier regard avant de se retourner vers le nouvel arrivant, un sourire malveillant sur les lèvres.