Chapitre 5

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Mon premier réflexe en arrivant chez moi est de dégrafer mon soutien-gorge.

Meilleure sensation au monde.

Je réfléchis à la proposition de Betty. En dehors de l'épisode brumeux de l'anniversaire de Pauline, cela fait un moment que je ne me suis pas amusée un peu.

En saisissant mon portable pour lui envoyer un message, la sonnerie attribuée à mon frère se déclenche.

– Salut, Alex. Tout va bien ?

– Oui, Charly, tout va bien. Tu sais que je ne t'appelle pas uniquement quand il y a un problème, n'est-ce pas ?

– Pas toujours, mais il y a souvent une raison bien précise.

– C'est vrai, répond-il en riant. Et tu as tapé dans le mille. Je te contacte à propos des cent ans de Grand-Père.

Je grince des dents.

– Il a tenu jusque-là le vieux croûton ?

– Charly !

Désolée, c'est sorti tout seul.

Mon frère s'indigne au téléphone pendant que je bougonne. On pourrait difficilement qualifier ma famille paternelle d'unie. Mes grands-parents se trouvaient aux antipodes l'un de l'autre. J'ai toujours adoré ma Mamie, mais son mari était vieux jeu et persuadé que l'on n'était jamais sorti de l'état de guerre. Il a élevé ses quatre enfants dans une ambiance militaire pendant les nombreuses absences de ma grand-mère qui travaillait dans l'aviation. Il a donc façonné mon père à son image : un bon gros vieux con.

Son autre fils ne lui adresse plus du tout la parole, ayant été marqué au fer rouge par cette éducation, tandis que les deux filles ont décidé de suivre leurs propres voies. Elles sont restées en bons termes avec tout le monde et appliquent les valeurs qu'elles revendiquent dans leurs familles. Ainsi, j'aime énormément le clan des Branille et celui des Ramirez avec qui j'ai passé tous mes étés depuis ma naissance. Cependant, en grandissant, chacun a pris un chemin différent, et bien que je les apprécie toujours autant, nous ne nous voyons que très rarement.

– Oh, ça va ! Tu ne vas pas me dire que tout d'un coup c'est devenu ton meilleur pote, répliqué-je à propos de mon grand-père.

– Bien-sûr que non, tu connais mon avis là-dessus, mais malgré tout, je le respecte et tu devrais faire de même. Il est d'un autre temps, mais il reste correct avec nous.

– Avec nous, ou avec toi ? lancé-je d'un ton cinglant.

Mon frère marque une pause et je n'entends plus que son souffle dans le combiné. Je sens mon corps se tendre. Je me lève du lit et commence à arpenter l'espace.

– Je sais qu'il ne s'est pas toujours montré très tendre avec toi, mais il s'est calmé quand Mamie est décédée. Si tu passais le voir plus souvent, tu l'aurais remarqué.

– Alex, la dernière fois que j'ai franchi le perron de leur maison, c'était il y a sept ans et je me suis pris un coup de savate dans la gueule. Il y a mieux comme accueil.

– Tu as insulté Papa de tous les noms en regardant Grand-Père dans les yeux, lui signifiant clairement que c'était de sa faute. Tu l'as un peu-

– Ne dis pas que je l'ai cherché ! le coupé-je. C'est lui qui m'a virée de chez lui.

Alex soupire à l'autre bout de la ligne. Je le vois d'ici prendre sa tête dans ses grandes mains et passer son pouce autour de sa bouche plusieurs fois, tic qu'il possède depuis aussi longtemps que je me souvienne.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant