Chapitre 25

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Le bruit des pneus crissant sur la neige me réveille. J'inspire et m'étire sur mon siège avant de me contorsionner pour glisser mes pieds dans mes bottes. Nous sortons de la chaleur du car pour nous faire électriser par la fraîcheur des montagnes. Le temps s'annonce magnifique. Il est encore tôt, et la station se met à peine en marche. Le soleil a démarré son ascension et je le sens déjà essayer de brûler mes joues. Je me tartine de crème protectrice, enfile mon masque, mes gants, attache une de mes bottes à mon snowboard, et m'élance vers les remontées mécaniques en compagnie de Betty et Matthieu. Samy a choisi le groupe des skieurs frileux ou peu expérimentés et rejoint Agnès et Sandie. Je réajuste mon écharpe pour couvrir mon nez. Sur le télésiège, le froid fouette la moindre parcelle de peau restée à l'air libre, et je vois des larmes se former dans les yeux de Betty.

– Pourquoi tu ne prends pas un masque de ski au lieu de lunettes de soleil ? lui demande Matthieu.

– Parce que je kiffe pleurer. À ton avis ! Je l'ai oublié ce matin, c'est Sandie qui m'a prêté une paire qu'elle avait en double.

– Heureusement que certaines sont prévoyantes, la taquine Matthieu.

Arrivés au sommet, Betty nous dépasse tandis que Matthieu et moi attachons nos snowboards. J'admire la beauté du manteau blanc qui s'étire devant nous et croise le regard de Matthieu qui me fait un clin d'œil en enfilant ses écouteurs. Je l'imite, et nous sautons en même temps pour nous mettre dans le sens de la piste. La musique résonne dans mes oreilles tandis que je dévale la pente. J'y vais tranquille pour la première de la saison et effectue de grands slaloms, suivant les traces de ski de Betty. La vitesse est exaltante, et je ris du bien que ça me procure. Je me sens libre et heureuse.

Nos seules pauses sont destinées à décider des trajets à prendre, et nous dévalons piste après piste. Au bout de quelques heures, Matthieu s'arrête sur un côté et agite ses bras vers un sapin. Nous le rejoignons pour nous installer et sortons les sandwichs.

– Waouh, la neige est vraiment trop bonne !

– Grave, mais ça ne m'a pas empêché d'admirer la chute magnifique de Matthieu qui a dévalé la moitié de la piste ! lance Betty.

– Quoi ? Comment j'ai pu rater ça ?

– Oui ben ça va, marrez-vous, on verra qui se vautrera cette après-midi.

– Le mec qui a les boules, rigole Betty.

– Ça va mieux toi, dis donc !

– Eh oui ! sourit-elle de toutes ses dents.

Nous nous chamaillons comme des enfants en partageant notre pique-nique. C'est agréable de passer du temps entre collègues en dehors de l'agence, sans pression. Betty se laisse tomber dans la neige et se met à secouer les bras et les pieds. Je m'installe à côté d'elle pour faire de même, et Matthieu nous rejoint, de l'autre côté. Nos rires résonnent tandis que Betty prend nos mains dans les siennes et les lève en l'air.

– J'adore cette journée !! crie-t-elle au ciel.

Comme pour confirmer ses dires, le soleil s'étire derrière les sapins et nous réchauffe de ses rayons brillants. Nous profitons encore quelques instants de ce moment complice, avant de décider d'y retourner. On range nos affaires dans nos sacs et nous rapprochons du bord de la piste. Je m'apprête à m'élancer quand une snowboardeuse me coupe la route.

– Oh ! Ça ne va pas, faut faire attention !

Je rumine dans mon écharpe en la regardant descendre en petit slalom parfait, lui donnant une prestance particulière.

Ouais... Elle gère particulièrement bien, quand même. Mais ce n'est pas une raison !

Je rejoins mes collègues et on dévale la pente pour atteindre le tire-fesses. Je me laisse glisser jusqu'à la barrière et saisis le bâton de Betty pour parcourir les derniers mètres. Matthieu se positionne pour attraper la barre quand je remarque la fille qui m'a coupé la route. Elle porte un pantalon de ski baggy bleu sarcelle et un manteau anthracite à carreaux. Sa capuche pendouille derrière son bonnet bariolé doté d'un gros pompon blanc qui ne laisse échapper aucune mèche de cheveux. Son écharpe en laine épaisse beige, grise et bleue lui couvre une moitié de visage tandis que son masque noir cache ses yeux. Seulement un petit bout de nez rose dépasse de son attirail, et disparaît à mesure qu'elle remonte la pente tirée par le disque métallique.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant