Chapitre 47

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Je comprends toutes ces personnes qui ne veulent pas faire affaire avec l'amour. Pourquoi accepter de souffrir quand tout peut aller si bien ? Avant de connaître Chloé, tout était parfaitement équilibré dans ma vie et dans ma tête. Avant de tomber amoureuse d'elle, mon esprit n'était pas embrumé par ses noisettes brillantes ni par sa personnalité éclatante. Je ne passais pas mon temps à penser à elle et mon cœur restait entier. Qui voudrait s'engager de manière volontaire dans une voie qui résulte inévitablement par une immense peine ?

J'ai essayé de la rassurer avant de définitivement baisser les bras. J'ai tenté de lui démontrer que je ne suis pas comme son harceleur. Que jamais je ne pourrais lui faire du mal, jamais délibérément en tout cas. Mais ça n'a rien changé. Et quelque part, je la comprends. Son cœur à elle est bien trop brisé. J'arrive trop tard. En passant derrière, je paye les pots cassés d'un connard qui ne pensait qu'à lui. Il faudrait du béton armé pour redresser tout ça et je ne dispose même pas d'un pauvre stick de glu pour recoller sa confiance.

Il faut dire que c'est nouveau pour moi tout ça. J'ai beau essayer d'appliquer les conseils de Pauline ou de Betty, je ne pense pas que l'amour puisse se contrôler. J'aurais besoin d'un mode d'emploi, d'un protocole, d'une marche à suivre pour savoir comment faire en sorte que quelqu'un nous aime. J'en suis même à envisager l'idée d'explorer un grimoire de sorcellerie pour concocter des philtres en tout genre. Mais la confiance en kit ne s'achète pas dans un grand magasin et on ne peut se fier qu'à soi-même pour se dépatouiller avec ses propres émotions. Je ne peux m'attendre à ce que Chloé m'ouvre son cœur en grand quand son état ne passerait même pas au contrôle technique. Et je ne suis ni mécano ni diplômée en relations sociales. Je n'ai pas les connaissances pour savoir comment gérer, je ne possède pas les outils adéquats, et peut-être qu'au final, ça n'est pas réellement mon rôle de la réparer.

Pourtant, si je me montre honnête avec moi-même, c'est un peu ce qu'elle a fait avec moi. Je pense sincèrement que sa présence lors de l'anniversaire de mon grand-père a opéré comme un véritable déclencheur. Je ne sais pas si j'ai tort de lui attribuer cet exploit, mais grâce à elle, j'ai pu m'affranchir de l'emprise de ma famille. J'ai enfin écouté mon frère pour décider d'aller de l'avant, et la force de Chloé, sa manière de ne pas porter attention à ce que peuvent penser les autres, m'a inspirée pour ne plus laisser à personne la possibilité d'exercer une quelconque ascendance sur ma vie. Qui sait où j'en serais sans elle ? Qui sait pendant encore combien de temps j'aurais permis à la haine et à la rancœur de me ronger de l'intérieur ? Elle a fait de moi un papillon libéré de sa chrysalide et je ne peux même pas lui offrir un champ de tournesols en retour...

Avant la fin du week-end, elle m'a appelée pour crever l'abcès et nous avons décidé de nous en tenir au travail. Je n'irai plus lui rendre visite de manière impromptue, et nous éviterons de passer du temps ensemble en dehors de ce que nous imposent nos missions. Elle m'a avoué que ça la peinait, mais que me voir souffrir était la dernière chose qu'elle souhaitait. C'est un peu tard pour ça, et je ne parviens même pas à réaliser comment on a pu en arriver là sans même avoir le temps de vivre quelque chose ensemble, mais encore une fois, je comprends sa décision. Ça ne la rend pas moins douloureuse, ça ne me rend pas moins triste, mais je la comprends, et je la respecte. À vrai dire, je pensais que je lui en voudrais, rancunière que je suis, que je n'arriverais pas à passer au-dessus et que je ne pourrais que nourrir de la rancœur envers elle. Mais il faut croire que mes vieux démons me font finalement défaut, car tout ce que je ressens, c'est l'envie qu'elle puisse enfin être heureuse et se débarrasser de cet immense bagage, avec ou sans moi. Je ne sais que trop bien ce que ça fait de se traîner des casseroles, et le silence se révèle tellement savoureux quand on s'en détache enfin, que c'est l'unique chose que je lui souhaite.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant