Chapitre 46

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Le vendredi, je rejoins Chloé avec des papillons dans le ventre et un sourire figé sur mon visage. J'ai tout essayé, impossible de le décoller de là. La moindre pensée à notre balade de la veille fait clignoter une énorme pancarte sur mon front, marquée « je suis amoureuse et j'aime ça ».

En arrivant chez elle, je gare la voiture à côté d'une moto grise que je n'ai jamais vue. Ceci dit, je ne suis pas au fait de toutes les connaissances de Chloé, et savoir qu'elle a de la visite me stresse un peu. Elle ouvre avant même que j'aie le temps de toquer à la porte et en me voyant, un grand sourire lui mange le visage. Mon cœur manque de se transformer en grenade. Je prends beaucoup trop l'habitude de ces instants de bonheur, et je me complais dans le déni de la réalité. Celle-là même dans laquelle Noisettes est inaccessible. Celle-là même dans laquelle Chloé et Charly n'existent pas avec un trait d'union. Celle-là même qui m'éclatera bien trop vite à la gueule. Mais pour l'instant, je ne pense qu'au bien-être que me procure ce sourire ravageur et je m'empresse de le lui rendre.

Derrière elle, je découvre un homme doté de jambes gigantesques en train de passer une grosse veste. Ses cheveux bruns en bataille rejoignent une barbe de quelques jours qui encadre son visage. La lumière dorée de la fin de journée se reflète dans ses petits yeux rieurs.

– Salut ! me lance-t-il en m'apercevant.

Je le reconnais immédiatement. Il était venu voir Chloé devant l'agence alors qu'on l'épiait avec Betty. J'étais persuadée qu'il s'agissait de son copain à ce moment-là.

– Je te présente Adrien, déclare Chloé en lui saisissant les épaules malgré sa grande taille. Frérot, voici Charly !

C'est marrant, ils ne se ressemblent pas du tout. Pourtant, cette annonce ne m'étonne pas. La sorte de connivence dans le câlin que j'avais observé prend sens désormais. Chloé porte cette carapace constante – hormis quand elle est bourrée – et ça me semble alors bien logique que la seule personne susceptible de l'enlacer comme il l'avait fait ne pouvait être que son frère. Ce dernier s'avance vers moi. Je tends la joue, m'attendant à recevoir deux bises, mais il écrase ses bras musclés autour de moi dans une sorte de câlin.

Ah d'accord.

– Content de te rencontrer enfin, depuis le temps que j'entends parler de toi !

Le sourire installé sur mon visage se fige légèrement et je dirige un regard interrogatif vers sa sœur. Sœur qui pique un fard et détourne immédiatement la conversation sur le passage de son frère en France.

– Il vit en Californie la majorité du temps, mais revient plusieurs mois en France en fin d'année. Alors il est venu me voir...

Je hoche la tête face à son besoin de se justifier avec un léger sourire narquois sur les lèvres. Elle a parlé de moi à son frère, et visiblement pas qu'une fois. Et vu ce qu'il a dit, ça ne doit pas être de manière si négative ! Un feu de camp prend naissance dans ma poitrine tandis que mon cœur se tartine de chocolat fondu face à cette information. Il y a peut-être un espoir que ce que nous avons vécu hier était bien réel.

– En fait, je t'ai déjà aperçu devant l'agence il n'y a pas si longtemps. Mais j'ai cru que tu étais son petit ami ! avoué-je.

– Oula, rit-il, personne ne peut supporter une tornade pareille !

Il attrape sa sœur dans ses bras avant qu'elle ne puisse répliquer, lève un chapeau imaginaire en ma direction, et rejoint sa voiture.

De retour au chaud, Chloé reprend son tri. Après avoir passé chaque pièce de sa maison au peigne fin, il ne lui reste que celle qu'elle redoute le plus : la chambre. Face à sa penderie, les mains sur les hanches, elle semble affronter le dernier obstacle de son grand ménage. Noisettes fait coulisser la paroi droite du placard dans un silence édifiant, révélant des vêtements colorés et flashy. Elle souhaite trier les affaires qu'elle possède en souvenir de Zoé, mais ne se résout pas à le faire seule.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant