Hating, Craving, Falling

Chapitre 13

J'ai à peine terminé de remplir la gamelle d'Artémis de croquettes quand j'entends Chloé klaxonner. Je frotte une dernière fois la nuque de ma petite boule de poils du bout des doigts, attrape ma veste, souffle un coup et claque la porte derrière moi.

Ma conductrice ne sort pas de sa voiture pour me dire bonjour. Elle n'a même pas coupé le contact. Mais en repensant à la manière dont s'est terminée la soirée de la veille, je ne peux pas lui en vouloir.

– Salut, dis-je en grimpant sur le siège en cuir.

Je ne sais pas si je dois me pencher pour lui faire la bise, mais elle ne fait aucun mouvement, du coup je me contente de m'attacher.

– Écoute, je suis désolée pour hier soir. C'était déplacé de ma part.

– Laisse tomber, répond-elle en fronçant légèrement le nez. Bon, on va où ?

Je lui donne l'adresse de chez mon grand-père qu'elle entre sur le GPS sans poser de question, ce qui m'étonne, et elle quitte mon allée en trombe. Je me trouve à nouveau propulsée dans le fauteuil et m'agrippe à la portière avant de lui rappeler ma sensibilité en voiture.

– Ah oui, c'est vrai.

Un silence flotte pendant une dizaine de minutes avant qu'elle soupire. Elle me jette un coup d'œil et semble se détendre.

– C'est chez qui, cette adresse, à deux heures de route d'ici ?

Je me demandais quand elle allait se réveiller. Comme si ça lui arrivait tous les week-ends de conduire une collègue qu'elle ne peut pas saquer vers une destination inconnue juste pour le plaisir.

– Mon grand-père.

– Ton grand-quoi ?! s'écrie-t-elle en donnant un coup de volant un peu trop brusque pour s'insérer sur l'autoroute.

– C'est euh... son anniversaire.

– C'est pour célébrer l'anniversaire de ton grand-père que tu avais besoin de mon aide ? C'est quoi ces conneries ?!

– J'ai...

Elle ne semble pas m'entendre lorsque je commence à parler et me coupe en s'excitant sur place, ne pouvant s'extraire de son siège.

– Tu te fous de ma gueule, Charly ? Tu n'avais pas du tout besoin d'aide en fait, tu voulais juste pourrir mon week-end, comme si ces dernières semaines n'ont pas été suffisamment affreuses, il fallait que ta meuf et toi vous vous payiez ma tête !

Son pied écrase l'accélérateur pour doubler une voiture et je m'agrippe à la portière. Je ne sais pas comment lui expliquer qu'aller chez mon grand-père relève de l'exploit pour moi. Mais surtout, je me demande comment elle peut être aussi furax, sans pour autant chercher à m'abandonner sur le bord de la route pour rentrer chez elle.

Attends... Quoi ?

– Ma meuf ? Comment ça ma meuf ?

– Tu me fais un vieux coup de victimisation en mode tu as besoin d'aide et tout ce que tu as à dire quand je te demande des explications, c'est bégayer sur Betty ?!

Je ne comprends vraiment plus rien. Qu'est-ce que Betty vient foutre dans la conversation ?

– Tu fais chier, Charly, franchement ! Tu abuses !

– Chloé ! Oh ! Tu vas redescendre d'un étage direct, là !

Ayant crié plus fort qu'elle, elle la boucle enfin et rive ses yeux sur la route, l'air renfrogné.